Elle était sa « Anna-Teresa », parfois sa « très chère bien aimée Anna ». Pendant trente-deux ans, Jean-Paul II a écrit 343 lettres à son amie et compatriote, la philosophe Anna-Teresa Tymieniecka, par ailleurs mariée et mère de trois enfants. Cet échange épistolaire au long cours est au cœur du documentaire inédit d’Edward Stourton, co-produit par Blackeway, la chaîne américaine Thirteen, la BBC et Arte., diffusé sur Arte le 16 février [1].
Rien de graveleux, ni choquant. L’amitié d’un homme et d’une femme. Antidote à la solitude d’un homme de pouvoir. Le commentateur note cette face de solitude, peu souvent soulignée de l’homme seul, fut-il pape. C’est ce côté humain et psychologique qui m’a intéressé, ce besoin d’amour et d’amitié, de partage qui aide à vivre et à agir.
Dans une deuxième partie, nous évoquerons "Sollers et Jean Paul II" dans les écrits de l’écrivain.

Les lettres secrètes de Jean-Paul II

Une longue relation de plus de trente ans, plus de 300 lettres du côté Jean-Paul II (jusqu’à sa mort), des documents photographiques. Une relation qui a commencé, en 1973, à l’occasion de la traduction d’un livre de Karol Wojtyla - pas encore Jean-Paul II - par Anna-Teresa Tymieniecka. Elle est philosophe, mariée, trois enfants, elle a 50 ans.
- Anna-Teresa Tymieniecka
- (capture écran)

- Karol Wojtyla, archevêque de Cracovie
- (capture d’écran)
KW (il signe ses lettres de ses initiales) n’était encore que l’archevêque de Cracovie. Il a 53 ans. Dans ses lettres, le plus souvent, il ne l’appelle pas Anna-Teresa, mais Teresa-Anna. Peut-être en référence à Thérèse d’Avila avance le commentateur, eu égard à la profondeur mystique connue chez Jean-Paul II. Une « chaste passion » dit-il dans une de ses lettres de la fin de sa vie pour qualifier leur relation. Double relation au plan intellectuel d’une part, personnel et affectif d’autre part. A l’occasion d’un voyage officiel aux Etats Unis de l’archevêque de Cracovie, il a été reçu dans la maison de campagne d’Anna-Teresa à Pomfret (Vermont) et fait la connaissance du mari (conseiller économique de deux présidents des Etats Unis). Il en parle dans ses lettres et le souvenir de Pomfret restera vivant tout au long de sa vie, comme un moment privilégié, …images de son paradis terrestre(?).
De son côté, il l’invite lors de ses vacances. A la montagne, c’est un homme sportif qui aime skier. A la campagne, c’est un homme qui aime la randonnée et le camping avec des groupes de jeunes, ses élèves. Teresa partage avec lui ces moments. L’homme est séduisant. Elle en est probablement tombée amoureuse. Lui, considère cette relation comme un « don divin », qui vivifie son action. Leur relation démarrée sur un plan intellectuel – la traduction d’un livre - et épistolaire, s’est développée dans une collaboration intellectuelle. Teresa ne se limite pas à une simple traduction, elle approfondit et complète la pensée de Karol Wojtyla à la suite de leurs échanges. Elle pense même avoir influencé la pensée de ce dernier, mais la traduction « augmentée » du livre de Karol Wojtyla publiée en 1979, alors qu’il vient d’être élu pape, l’année d’avant, sera mal reçue par la critique du fait de ces ajouts.
Lors du voyage de l’archevêque de Cracovie aux Etats Unis, par les relations de son mari, elle lui avait fait rencontrer les ecclésiastiques catholiques importants du pays et ceci aurait pu jouer en faveur Karol Wojtyla lors de l’élection papale.
La Curie romaine a cherché à minimiser le rôle intellectuel de Teresa auprès de Karol Wojtyla, et elle s’est alors considérée insuffisamment soutenue par le nouveau pape, vivant cet épisode comme une trahison de Jean-Paul II à son égard. Mais elle a fini par lui pardonner. Leur relation a repris. Ces deux-là s’étaient reconnus et se nourrissaient de leur profonde amitié. Des gestes de tendresse, les photos de Teresa et du pape en gardent la trace : des bénédictions papales en forme de caresses sur la joue.
L’homme a besoin de la femme et réciproquement, sans doute.
Complémentarité et Symétrie de la nature.
Ce documentaire ne raconte que la moitié de l’histoire (on ne connaît pas les lettes de Teresa, probablement archivées à la Bibliothèque nationale de Pologne qui a racheté tous les droits sur les écrits d’Anna Teresa et n’autorise pas leur publication).
Néanmoins, au fil d’une enquête fouillée, Edward Stourton, le journaliste auteur du documentaire nous livre une facette inédite et profondément humaine de Jean-Paul II.
Captures d’écran




1973 : Début des relations épistolaires entre Anna-Teresa Tyemienecka et Karol Wojtyla.
1976 : Karol Wojtyla, l’archevêque de Cracovie en voyage officiel aux Etats Unis passe quelques jours dans la maison de campagne d’Anna-Teresa à Pomfret (Vermont)
1978 : Karole Wojtyla, devient le premier pape non italien et prend le nom de Jean-Paul II.
1981 : Attentat contre le pape, atteint par 4 balles.
1990 : Diagnostic de maladie de Parkinson du pape.
2005 : Mort de Jean-Paul II.
2008 : Anna-Teresa vend la correspondance du pape à la Bibliothèque nationale de Pologne (et probablement la sienne également).
2014 : Mort d’ Anna-Teresa Tyemienecka
2016 : La Bibliothèque nationale de Pologne entr’ouvre ses portes pour un documentaire sur les lettres de Jean-Paul II
Sollers et Jean-Paul II
Philippe Sollers aime les papes, certains critiques ont même utilisé le qualificatif « papiste » à son égard. Jean-Paul II qui a régné 27 ans était en bonne place dans son panthéon. Il était d’ailleurs allé à Rome lui remettre un exemplaire de sa « Divine Comédie ». On ne connaît pas la dédicace, mais une photo témoigne de ce moment.
On aperçoit la couverture du livre qu’a remis Sollers au pape.

Desclée de Brouwer, 2000
Illustration : Rodin, La Porte de l’Enfer (détail), Musée Rodin, Paris

Et du temps où Sollers tenait tribune dans les colonnes du Journal du Dimanche, avec son « Journal du mois », plusieurs entrées furent consacrées à Jean-Paul II. Dans sa rubrique du 29/10/2000, il relatait la remise de son livre à Jean-Paul II :
Il fait beau, ce matin-là, sur la place Saint-Pierre de Rome. Soixante-dix mille pèlerins de tous les pays attendent Jean-PaulII. On parle français, anglais, allemand, espagnol, portugais, italien bien sûr, mais aussi beaucoup polonais. Pas mal de Japonais, des Chinois interloqués, des Africains joyeux, des Indiens, des Hollandais, des Américains, des Canadiens, des Belges.Le pape arrive en voiture découverte, très fatigué, l’air de souffrir intensément. Il bénit tout le monde, s’assoit, récite la même homélie de cinq minutes en sept langues. Les Polonais, comme d’habitude, agitent leurs drapeaux et font un bruit d’enfer. Puis ce sont les audiences en plein air. Les cardinaux se lèvent un à un, vont vers le pape, lui chuchotent des choses à l’oreille. Au suivant. Cette fois, c’est mon tour. Je lui donne le livre sur Dante que je viens de publier [2], je lui rappelle le roman où je parlais de l’attentat dont il a été victime ici même [3], il y a vingt ans. Il prend le volume, me regarde fixement, et, à ma grande surprise, étend son bras droit sur mon épaule gauche, ce qui peut vouloir dire à la fois « oui, bon, ça va » et « très bien, continuez, bonne chance ».
Dante assistait, en 1300, au jubilé de Boniface VIII (qu’il met d’ailleurs en enfer). Ce pape polonais, lui, est encore là en 2000, est allé à Jérusalem se repentir de l’aveuglement catholique sur le peuple biblique, a échappé au coup de revolver soviétique à travers un Turc, et tient toujours debout malgré la fatigue. Les évêques et les cardinaux, dit-il, peuvent remettre leur démission à un supérieur, mais moi, à qui la remettre ? Et aussi : « Que ferait-on d’un ex-pape ? » Courage, sacré vieil homme blanc.Ph. S., 29/10/2000
Quelques autres entrées de son Journal du mois dans le JDD :
« Le pape ? Combien de divisions ? » demandait Staline, qui aurait été ahuri d’apprendre qu’il y avait brusquement un pape polonais. Le pacte hitléro-stalinien débouchant sur un jubilé : quel raccourci sanglant, si on y pense. Pour fêter tout cela, rien de mieux que d’écouter l’éblouissante Cecilia Bartoli dans son Vivaldi Album. Personne ne savait plus qui était Vivaldi en 1940. Les résurrections existent, elles passent par la musique, les mots, les voix.
Ph. S., 26/12/1999
Ph. S., 30/01/2000
Ah, ces catholiques sont fous, mais très forts. Voyez le suaire de Turin : une photo en négatif dans un linge avant l’intervention de la photographie. Aucun trucage acrobatique ne les arrête. Ce sont les as du virtuel. N’y a-t-il pas du diabolique dans cette affaire ? Ne me dites pas qu’on peut être à la fois pape et star des médias, il y a contradiction dans les termes. Et pourtant, il tourne, celui-là, il n’arrête pas, on a beau lui conseiller de passer la main, il s’obstine. Les Russes l’ont raté à l’époque, et il s’envole avec sa Vierge Marie ! Il serait quand même consternant que le XXe siècle s’achève sur une telle image. Ce pape est un perturbateur de studios, un gauchiste infiltré dans la production, un virus laissant les pellicules vierges.
Ph. S., 28/05/2000
Ph. S., 25/06/2000
Ph. S., 30/07/2000
Ce tableau idyllique aurait pu être plus précis, dans la mesure où Jupiter n’a jamais été un dieu grec. Il faut dire Zeus, aucun doute. Quant à la « claire lumière grecque », ce qu’on voyait surtout, lors de l’inauguration, c’était projecteurs sur projecteurs, écrans géants, figurante apparaissant enceinte d’une boule orangée (immaculée conception qui, dans son outrance kitsch, n’avait rien à envier aux vierges sulpiciennes de Lourdes). La flamme avait trente et un ans. Deux tableaux à revoir pour mesurer la régression générale.
Ph. S., 22/08/2004
L’union nationale a eu lieu, Allah est grand qui peut réaliser de telles merveilles. […] Au passage, cependant, il faut admirer l’art de la communication dont les ravisseurs sont capables. Ils ne sont donc pas aussi fous que l’on dit. On me raconte que Bush, Rumsfeld et Condi ont fait la grimace en apprenant la libération des otages français. Je n’arrive pas à le croire. Une telle inhumanité est impossible au pays du dieu américain en train de sauver le monde. […] Je peux l’avouer maintenant : ma tentative de médiation, à Venise, a échoué, pas de réponse de Condi, pas le moindre geste en direction de la vieille Europe. En revanche, la lettre la plus émouvante que j’ai reçue au sujet de mon Dictionnaire amoureux de Venise [4]m’a été adressée, au nom du pape, par le Vatican. La voici :
« Monsieur, vous venez d’offrir au Saint-Père un exemplaire de votre livre intitulé Dictionnaire amoureux de Venise, dont les nombreuses références aux auteurs d’œuvres littéraires et artistiques entraînent le lecteur à la découverte de la cité des Doges. Le Pape m’a chargé de vous transmettre ses remerciements pour cet hommage qui a été apprécié. En vous confiant à l’intercession de Marie, Mère de Dieu, il invoque sur vous les Bénédictions du Seigneur. »
Plus aucun doute : le seul vrai dieu d’amour est à Rome. J’espère que le gouvernement français en est conscient, et qu’il a déjà prévu, pour nos otages, un luxueux voyage de repos à Venise. Ils pourront oublier Bagdad.
Ph. S., 26/12/2004
Tout cela vous choque peut-être, vous scandalise, vous fait hausser les épaules ou ricaner, ou bien vous émeut quand même, un peu (non-croyant modéré), beaucoup (croyant aliéné). La communication du Vatican exagère : apparition à la fenêtre de la clinique, micro tendu à la forme blanche tassée, gargouillis inaudible, Angélus parti en fumée, reprise un peu plus ferme peut-être en play-back, petit geste de la main, et voilà.
Ce Saint-Siège se moque de nous depuis des siècles, et ça continue de plus belle. À quoi joue-t-il maintenant ? À l’exténuation du martyr ? À l’agonie en direct ? Ce pape est-il conscient, oui ou non ? Peut-il diriger l’Église par griffonnages et regards ? Jusqu’à quand nous infligera-t-on ce râle venu déjà d’outre-tombe ?
Ce qui est clair, en tout cas, c’est qu’il s’agit d’une offensive sans précédent contre l’esprit d’entreprise. Il est invraisemblable que ce pape n’ait pas été dessaisi de ses fonctions par la direction des ressources humaines. Aucun P-DG ne pourrait s’imposer de la sorte devant son conseil d’administration. L’Église romaine va trop loin : sans parler des sujets qui fâchent (avortement, préservatif, homosexualité, embryons, non-accès des femmes à la prêtrise), elle donne là un exemple accablant de non-respect des lois du marché.
Un chef d’entreprise (car, après tout, c’en est un comme un autre) doit être en forme, souriant, disert, autoritaire en souplesse, sûr de lui et dominateur. Bush, par exemple, ferait un bon pape. Ou Poutine. Ou Blair. Ou Zapatero. Ou Berlusconi. Et pourquoi pas Chirac ? On se demande ce qui leur manque pour ne pas postuler à cette fonction suprême. Bon, ils sont mariés, c’est vrai, et, pour certains, leur morale laisse à désirer. Mais enfin, cachez-nous ce vieillard bredouillant que nos actionnaires ne veulent plus voir. Et remplacez-le par un pape dynamique et progressiste. On vous en prie. Tous les médias vous en prient. Un beau jeune pape fringant et sportif ferait admirablement l’affaire. Un Noir. Un Sud-Américain. Un Chinois peut-être, demain.
Ph. S., 27/02/2005
Jean-Paul II est mort, le 2 avril 2005.
Dans son Journal du mois du JDD [5], publié en fin de mois, le 30 avril, Philippe Sollers lui consacrait les deux entrées suivantes :
Je me revois à New York, en octobre 1978, dans le bureau d’un chairman d’une université américaine. Je téléphone à Paris, et j’apprends qu’un Polonais, Wojtyla, vient d’être élu pape, premier non-Italien depuis presque cinq siècles. Cette histoire, immédiatement, me passionne comme un roman. Je me tourne vers mon chairman tranquille et je lui fais part de la nouvelle. Il me regarde avec un air de légère commisération, et me dit : « So what ? » Et alors ? On a vu la suite.
Le soir même, sur CBS, je vois apparaître ce Jean-Paul II à l’air sportif, s’exprimant en très bon anglais. Décidément, il tranche sur ses prédécesseurs, très différent, donc, du pauvre Italien Jean-Paul Ier, mort dans des conditions mystérieuses. Il ne faut pas être un grand spécialiste de géopolitique pour deviner ce qui va se passer comme bras de fer entre ce Polonais et l’Union soviétique qui était encore, à cette époque, une puissance énorme. So what ? L’insurrection polonaise et, plus tard, la chute du mur de Berlin. Mais pas tout de suite : il faut d’abord passer par l’attentat de la place Saint-Pierre, deux balles de revolver dans le ventre de ce pape gênant.
Comme on l’a constaté avec stupeur, ce sportif réagit très vite : il va tourner autour de la planète à une vitesse d’enfer, rassembler des masses compactes, séduire la jeunesse, répéter sans arrêt ses apologies de la paix et des droits de l’homme. « N’ayez pas peur ! » Formule choc.
On vous a resservi tout ça à la télé et dans les magazines. Vous êtes saturé, c’est l’overdose, vous n’en pouvez plus. Votre conscience laïque est accablée, vous trouvez insensé qu’on mette les drapeaux en berne pour ce rocker de la foi défiant la seule religion qui vaille, c’est-à-dire la républicaine. C’est entendu, il s’est réconcilié, via une repentance suspecte, avec les juifs, mais vous le trouvez implacablement réactionnaire sur les sujets qui vous tiennent à cœur : la contraception, l’avortement, le préservatif antisida, le mariage des prêtres, l’ordination des femmes, le mariage homosexuel. Il n’a pas l’air de s’intéresser à la sexualité, et c’est bien là le scandale. Il a une passion fusionnelle pour la Vierge Marie (celle-là, alors), il ne se rend pas compte que le catholicisme favorise le vice, par exemple la masturbation ou la pédophilie.
Qui sait, d’ailleurs, si le catholicisme n’est pas, au fond, une école de perversion secrète dont on comprend qu’elle ait pu attirer des centaines et des centaines de peintres, de musiciens, de sculpteurs, d’architectes ou de poètes douteux. Baudelaire, par exemple, qui est allé jusqu’à dire : « Personne n’est plus catholique que le Diable. » Ou Joyce, ce redoutable élève des jésuites irlandais, qui, en réponse à une question lui demandant comment lui, incroyant, ne passait pas du catholicisme au protestantisme, disait : « Je n’ai aucune raison de quitter une absurdité cohérente pour une absurdité incohérente . » Et voilà comment un esprit tordu a pu accoucher du pornographique monologue de Molly Bloom dans Ulysse, sans parler de ce livre illisible, Finnegans Wake, loué, en son temps, par L’Osservatore Romano.
Ph. S., 30/04/2005
Et, brusquement, l’épouvante : c’est Ratzinger, un Allemand, surnommé le « Panzercardinal ». Libération, qui, avec une exquise délicatesse, avait titré sur la mort de Jean-Paul II « La messe est dite », titre cette fois « Un pape en arrière ». Cette Église catholique et romaine, c’est un fait, n’avance pas. Elle se ferme, elle se bute, elle régresse. Elle est sourde à tous les appels qui montent vers elle, elle méprise la société, elle ne tient aucun compte, encore une fois, de la sexualité et de ses problèmes.
C’est une machine célibataire excluant les femmes, une officine obscurantiste qui ne veut pas voir à quel point nous avons rendu la sexualité attrayante à coups de cinéma, de publicité, de récits tragiques, d’embarras psychologiques incessants, de drames vécus, d’acrobaties diverses comme celle d’Édouard Stern et de Cécile Brossard, les criminels du jour. Ratzinger, le plus conservateur des conservateurs, est intelligent et cultivé, soit, mais quelle importance ? Est-ce qu’il ne lit pas en cachette les œuvres du penseur nazi Heidegger ? Moi, ça ne m’étonnerait pas outre mesure.
Ratzinger ! A-t-on idée ? Et le voici, cet Allemand, succédant au trône de Pierre après un Polonais, quelle obstination dans l’erreur. Un Africain, un Sud-Américain, un Indien auraient mieux fait l’affaire. Une Église un peu exotique et populaire serait de meilleur aloi. De plus, ce Ratzinger se fait immédiatement appeler Benoît XVI. Il y a donc eu quinze papes appelés Benoît avant lui ? Comme des Louis pour Louis XVI ? Cette brusque avalanche de siècles m’effraie.
Benoît XV, je connais un peu, c’est lui qui a essayé sans succès d’empêcher la boucherie de 1914-1918. J’ai vaguement entendu parler de Benoît XIV, au XVIIIe siècle, à qui Voltaire (Voltaire !) a dédié sa pièce injouable aujourd’hui, Mahomet. Mais du diable si je sais exactement qui est saint Benoît, fondateur des bénédictins, quelque part au VIe siècle, lequel, après avoir échappé à un empoisonnement féminin, a été décrété, en 1958, « père de l’Europe et patron de l’Occident ». Tiens, Ratzinger-Benoît XVI viendrait de voter européen ? En pleine crise française à ce sujet ? C’est probable.
Ph. S., 30/04/2005
Nous vous invitons à lire ou relire l’excellente enquête fouillée d’Albert Gauvin : « Le pape Jean-Paul II dans les romans de Sollers »