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Céleste Albaret chez monsieur Proust + Inédits de l’auteur à paraître

Les grandes héroïnes de la littérature française : la duchesse de Guermantes

D 15 août 2019     A par Viktor Kirtov - C 2 messages Version imprimable de cet article Version imprimable    ................... PARTAGER . facebook


15/08/19 : Des textes inédits de Marcel Proust éclairent le rapport tourmenté que l’auteur entretenait avec son homosexuaiité. A paraître en octobre. Plus ICI.

19/08/19 : Les grandes héroïnes de la littérature française : la duchesse de Guermantes. Plus ICI.

PARTIE I - CELESTINE ALBARET CHEZ MONSIEUR PROUST

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France Culture dans ses émissions « Grande traversée » vient de présenter, du 26 juillet au deux août, cinq émissions exceptionnelles « Céleste Albaret chez monsieur Proust ». Avec les enregistrements audio de Céline Albaret de 1973.
La dernière émission s’intitule « Vous n’oublierez pas Céline Albaret » et c’est effectivement le sentiment éprouvé en l’écoutant dans cette dernière émission où elle relate la mort de Marcel Proust. Enregistrement audio que nous vous proposons ci-après, comme aussi l’article « Céleste Albaret, la muse de Proust. » que lui consacre Emmanuelle GUILIANI dans La Croix du 26/07/2019.

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Grande traversée : Céleste Albaret chez monsieur Proust
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Production Philippe GARBIT en partenariat avec Le Point.
DU 29 JUILLET AU 2 AOUT


Cette grande traversée vous emmène sur les traces de Céleste Albaret, la gouvernante de Marcel Proust qui l’a accompagné de nombreuses années. A travers des enregistrements retrouvés tard, Céleste nous ouvre les portes de l’intimité de Marcel Proust. En partenariat avec Le Point.

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La voix de Marcel Proust ? Hélas, on ne la connait pas : l’écrivain, dont on célèbre cette année le centenaire du Prix Goncourt pour A l’ombre des jeunes filles en fleurs, n’a jamais été enregistré…En revanche, Céleste Albaret, servante, gouvernante chez Proust près de huit années durant, jour et nuit, nuit et jour, l’a été, et abondamment, en vue de la publication de son livre de souvenirs recueillis par l’écrivain Georges Belmont, livre paru en 1973 sous le titre Monsieur Proust (Editions Robert Laffont).

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Qu’étaient donc devenues ces bandes magnétiques…. ? Mystère…

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Et voici que récemment…miraculeusement…elle ont resurgi…à la Bibliothèque nationale de France… ! Près de 49 heures d’enregistrement !

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Chaque jour, dans les Grandes Traversées, nous vous proposons de suivre, racontés par une Céleste Albaret à la mémoire intacte et respectueuse, les jours et les nuits de deux reclus, intermittents et très volontaires : elle-même et, bien sûr, Marcel Proust !

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Et, chaque jour, un proustien (émérite, comme il se doit) viendra nous parler de « sa » Céleste Albaret…

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Vous n’oublierez pas Céleste Albaret : le récit de la mort de Proust

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Dans cet ultime épisode, la gouvernante de Marcel Proust, Céleste Albaret, s’épanche sur les derniers instants de la vie de l’écrivain. Plus qu’une simple gouvernante, elle l’épaule dans la rédaction de son oeuvre et veille sur lui jusqu’à sa mort en 1922.


Céleste Albaret en 1973Crédits : Nicole PRAYER – Getty
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Marcel Proust meurt en 1922, épuisé, et emporté par une bronchite mal soignée. Mais selon Céleste, Proust ne devait pas mourir. Pourtant, l’écrivain avait en tête la perspective de la mort. Dans La Recherche, il décrit longuement la mort du romancier Bergotte, artiste reconnu et admiré par le narrateur. Bergotte meurt après avoir revu le tableau qu’il aimait tant, la Vue de Delft de Johannes Vermeer, et son petit pan de mur jaune.
Dans La Prisonnière, cinquième tome de La Recherche, Proust met en scène la découverte de la toile par Bergotte en ces termes :

Il remarqua pour la première fois des petits personnages en bleu, que le sable était rose, et enfin la précieuse matière du tout petit pan de mur jaune. Ses étourdissements augmentaient ; il attachait son regard, comme un enfant à un papillon jaune qu’il veut saisir, au précieux petit pan de mur. "C’est ainsi que j’aurais dû écrire", disait-il. Mes derniers livres sont trop secs, il aurait fallu passer plusieurs couches de couleur, rendre ma phrase en elle-même précieuse, comme ce petit pan de mur jaune. La Prisonnière, cinquième tome de La Recherche, Marcel Proust.
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Accédez aux cinq émissions ICI :

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Lien sur la page : Cliquez l’image
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Céleste Albaret, la muse de Proust
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GIULIANI Emmanuelle,
La Croix, le 26/07
« Toutes les choses heureuses qui m’arrivent, je me dis que c’est lui qui me les envoie, parce qu’il ne me voulait que du bien. Chaque fois qu’il m’est arrivé quelque chose d’heureux de son vivant, ou qu’on lui faisait un compliment de moi, il était si content. Quand on a été puissant comme lui sur la terre, il est impossible qu’on ne le demeure pas après, et je suis sûre que même au delà il est avec moi. »

Dès la première page de ses Souvenirs (lire Repères), Céleste Albaret, qui fut la gouvernante de Marcel Proust de 1913 à 1922, exprime son dévouement absolu, sa dévotion même, envers son génial employeur. Alors qu’on la pressait de toute part de confier le secret de ses années proustiennes, elle aura attendu 1973 et l’âge de 82 ans pour livrer son témoignage à Georges Belmont.

« Je n’étais jamais sortie de mon village d’Auxillac dans la Lozère (où elle était née le 17 mai 1891, NDLR) (...) Nous avions une grande maison. J’adorais ma mère, mon père, ma sœur, mes frères, je ne songeais ni à me marier ni à m’en aller », raconte Céleste Gineste. Elle cède cependant à la cour aimable d’Odilon Albaret, « un garçon très gentil avec un bon visage rond et de bonnes moustaches comme à l’époque », l’épouse et le suit à Paris. Son mari, en effet, de dix ans son aîné, « fait le taxi » dans la capitale. Au nombre de ses clients, un certain Marcel Proust qui d’ailleurs a adressé un télégramme de félicitations au jeune couple. Une photographie de l’époque nous montre une femme grande, brune, au visage classique et distingué, aux pommettes marquées, à la bouche longue et bien dessinée.

La petite provinciale n’imagine pas alors la place exclusive que l’écrivain parisien va prendre dans la vie de son ménage, et la sienne plus encore. Un jour qu’elle accompagne Odilon au 102 du boulevard Haussmann, Céleste le rencontre pour la première fois. « Je vois ce grand seigneur qui entre. Il faisait très jeune - mince, mais pas maigre, avec une très jolie peau et des dents extrêmement blanches, et aussi cette petite mèche sur le front, que je devais toujours lui voir et qui se faisait toute seule. Et puis cette élégance magnifique, et cette façon curieuse, cette espèce de retenue que j’ai remarquée ensuite chez beaucoup d’asthmatiques, comme pour économiser leurs forces et leur souffle. [...] M. Proust me dit en me tendant la main : « Madame, je vous présente Marcel Proust, en négligé, décoiffé et sans barbe. » »

En 1913, Proust a déjà publié Du côté de chez Swann et travaille à ce qui deviendra à l’ombre des jeunes filles en fleurs. La maladie puis la Grande Guerre qui éloigne nombre de ses amis et met fin aux fêtes et dîners mondains qu’il fréquentait jusqu’ici assidûment, le poussent à une réclusion quasi constante dans sa chambre tapissée de liège. Quand le couple Albaret, en 1914, s’installe à demeure dans l’appartement de l’écrivain, Céleste accompagne toutes les étapes de cet enfermement et de cette addiction à l’écriture. Elle qui a commencé comme « courrière », portant çà et là les exemplaires dédicacés de Swann que Proust offrait à ses amis et connaissances, se voit investie progressivement des tâches les plus diverses et les plus astreignantes. « Moi, j’allais, je venais, je faisais tout, quand ce n’était pas ceci c’était autre chose, le café, la propreté, aller téléphoner ou chercher quelque chose de spécial, porter une lettre, mettre du linge au chaud, préparer ou changer les bouillottes, ranger les journaux et les papiers que M. Proust laissait en tas sur les draps - et il fallait bien ranger, sinon tout cela aurait fini un jour par le sortir de son lit, tant il y en avait - allumer et entretenir le feu de bois dans sa chambre, apprêter l’eau du bain de pieds - mais le tout comme en chantant dans une espèce d’allégresse, comme un oiseau qui s’envole d’une branche à l’autre. »

La paysanne qui jadis se couchait avec les poules et se levait avec les coqs vit désormais la nuit comme son maître, supportant les acres fumigations avec lesquelles Proust espère soigner son asthme et dont elle va chercher les poudres à la pharmacie Leclerc à l’angle des rues de Sèze et Vignon. Cette femme intelligente mais sans instruction devient aussi l’oreille privilégiée des pensées, des réflexions et des impressions du créateur. Elle est un élément indispensable de son œuvre : « Dites-lui bien que, si jamais elle partait, je ne pourrais plus continuer à travailler », avoue Proust lui-même à Odilon.

C’est qu’elle a pris toute la mesure du processus créatif de la Recherche, à la fois permanent et continu, et qu’elle est à même de le comprendre dans ses aspects les plus matériels, se mouvant intuitivement dans les strates complexes des multiples cahiers et « papiers » qui la fabriquent. Au-delà, elle a intériorisé l’essence même du génie proustien, celui de l’homme et celui de l’œuvre, la relation fondatrice, fascinante et douloureuse au temps : « [...] Toute la recherche de M. Proust, tout son grand sacrifice à son œuvre cela a été de se mettre hors du temps pour le retrouver. Quand il n’y a plus de temps, c’est le silence. Il lui fallait ce silence, pour n’entendre que les voix qu’il voulait entendre, celles qui sont dans ses livres. »

Et, plus loin, « au fond, s’il n’a plus tellement cherché à revoir ce Grand Monde, pendant ces dix dernières années où je l’ai connu, c’est qu’il s’agissait comme pour son enfance d’Illiers, d’un paradis perdu, qu’il sait bien ne plus retrouver autrement qu’en lui-même. Par rapport à sa famille, par exemple, il y avait le même éloignement. Toute la tendresse était dans le souvenir. »

À vivre ainsi si proche de l’écrivain, Céleste n’a pas pu ignorer l’homosexualité de Marcel Proust et s’agaçait à demi-mot de ses « secrétaires » successifs. Toutefois, en femme de son époque et en ange gardien discret et respectueux, elle a toujours refusé la moindre anecdote sur ce sujet. À peine évoque-t-elle avec dédain, voire dégoût, Albert Le Cuziat (qui servit de modèle au personnage de Jupien), « un tenancier de mauvaise maison pour hommes... ». Après avoir suivi son exigent employeur dans son exil, rue Hamelin dans le 16e arrondissement de Paris, à partir de 1919, Céleste le voit mourir le 18 novembre 1922. « Voilà. C’est fini. Que puis-je dire d’autre ? ».« Pendant les semaines qui ont suivi sa mort, je n’avais plus que le désir de mourir. Je ne pouvais plus me supporter. » Céleste « s’arrache » de la rue Hamelin, fait une cure à Bagnoles-de-l’Orne et, en 1924, s’installe avec Odilon qui a acheté rue des Canettes, près de Saint-Sulpice, un petit hôtel. Les visites et les sollicitations affluent. Elle accueille simplement les unes et repousse les autres. Puis, le couple vend le modeste commerce. Odilon meurt en 1960 et, pendant quelques années, Céleste devient la gardienne du musée Maurice-Ravel à Monfort-l’Amaury, dans la région parisienne. Elle confesse « y avoir beaucoup plus parlé de M. Proust que de Ravel aux visiteurs ».... Elle le rejoint enfin lorsque, fidèle d’entre les fidèles, elle s’éteint le 25 avril 1984 à Méré, en Seine-et-Oise.

EMMANUELLE GIULIANI

Sur "Céleste et Monsieur Proust" voir aussi l’article de A.G. ICI.

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PARTIE II - LES GRANDES HEROINES DE LA LITTERATURE FRANCAISE : LA DUCHESSE DE GUERMANTES

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Portrait d’Elisabeth de Caraman-Chimay, comtesse Greffulhe, l’un des modèles qui ont inspiré Marcel Proust pour Oriane de Guermantes. Photo Philip Alexius de Laszlo (1905).
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La duchesse de Guermantes dans la création littéraire qu’en fit Proust :

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Tout d’un coup, pendant la messe de mariage, un mouvement que fit le suisse en se déplaçant me permit de voir assise dans une chapelle une dame blonde avec un grand nez, des yeux bleus et per¬çants, une cravate bouffante en soie mauve, lisse, neuve et brillante, et un petit bouton au coin du nez. Et parce que dans la surface de son visage rouge, comme si elle eût’ eu très chaud.je distinguais, diluées et à peine perceptibles, des parcelles, d’analogie avec le portrait qu’on m’avait montré, parce que surtout les traits particuliers que je relevais en elle, si j’essayais de les énoncer, se formulaient précisément dans les mêmes termes : un grand nez, des yeux bleus, dont s’était servi le docteur Percepied quand il avait décrit devant moi la duchesse de Guermantes, je me dis : cette dame ressemble à Mme de Guermantes ; or la chapelle où elle suivait la messe était celle de Gilbert le Mauvais, sous les plates tombes de laquelle, dorées et distendues comme des alvéoles de miel, reposaient les anciens comtes de Brabant, et que je me rappelais être, à ce qu’on m’avait dit, réservée à la famille de Guermantes quand quelqu’un de ses membres venait pour une cérémonie à Combray ; il ne pouvait vraisemblablement y avoir qu’une seule femme ressemblant au por¬trait de Mme de Guermantes, qui fût ce jour-là, jour où elle devait jus¬tement venir, dans cette chapelle : c’était elle ! Ma déception était grande. Elle provenait de ce que je n’avais jamais pris garde, quand je pensais à Mme de Guermantes, que je me la représentais avec les couleurs d’une tapisserie ou d’un vitrail, dans un autre siècle, d’une autre matière que le reste des personnes vivantes. Jamais je ne m’étais avisé qu’elle pouvait avoir une figure rouge, une cravate mauve comme Mme Sazerat, el l’ovale de ses joues me fit tellement souvenir de personnes que j’avais vues à la maison que le soupçon m’effleura, pour se dissiper d’ailleurs aussitôt après, que cette dame en son principe génèrateur, en toutes ses molécules, n’était peut-être pas substantiellement la duchesse de Guermantes, mais que son corps. Ignorant du nom qu’on lui appliquait, appartenait à un certain type féminin, qui comprenait aussi des femmes de médecins et de commerçants. « C’est cela, ce n’est que cela, Mme de Guermantes ! » disait la mine attentive et étonnée avec laquelle je contemplais cette image qui, naturellement, n’avait aucun rapport avec celles qui sous le même nom de Mme de Guermantes étaient apparues tant de fois dans mes songes, puisque, elle, elle n’avait pas été comme les autres arbitrairement formée par moi, mais qu’elle m’avait sauté aux yeux pour la première fois, il y a un mo¬ment seulement, dans l’église ; qui n’était pas de la même nature, n’était pas colorable à volonté comme elles qui se laissaient imbiber de la teinte orangée d’une syllabe, mais était si réelle que tout, jusqu’à ce petit bouton qui s’enflammait au coin du nez, certifiait son assujettissement aux lois de la vie, comme dans une apothéose de théâtre, un plissement de la robe de la fée, un tremblement de son petit doigt, dénoncent la présence matérielle d’une actrice vivante, là où nous étions incertains si nous n’avions pas devant les yeux une simple projection lumineuse

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Mais en même temps, sur cette image que le nez proéminent, les yeux per¬çants, épinglaient dans ma vision (peut-être parce que c’était eux qui l’avaient d’abord atteinte, qui y avaient fait la première encoche, au moment où je n’avais pas encore le temps de songer que la femme qui apparaissait devant moi pou¬vait être Mme de Guermantes, sur cette image toute récente, inchan¬geable. j’essayais d’appliquer l’idée : « C’est Mme de Guermantes » sans parvenir qu’à la faire manœuvrer en face de l’image, comme deux disques séparés par un intervalle.

LE CONTEXTE
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Pour le narrateur d’« À la recherche du temps perdu », Oriane de Guermantes est une femme qui fait rêver. Dès la première fols qu’il la volt, dans la chapelle de Combray, Il tombe sous le charme d’une aristocrate symbole parfait d’un monde auquel Il voudrait accéder. Elégance, chic, raffinement des manières, la duchesse représente le vieux monde de l’Ancien Régime, dont Proust raconte le délitement tout en en saisissant avec nostalgie le caractère singulier.

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Mais cette Mme de Guermantes à laquelle j’avais si souvent rêvé, maintenant que je voyais qu’elle existait effectivement en dehors de moi, en prit plus de puissance encore sur mon imagination qu’un moment paralysée au contact d’une réalité si différente de ce qu’elle attendait, se mit à réagir et à me dire : « Glorieux dès avant Charlemagne, les Guermantes avaient le droit de vie et de mort sur leurs vassaux ; la duchesse de Guermantes descend de Geneviève de Brabant. Elle ne connaît, ni ne consentirait à connaître aucune des personnes qui sont ici. »

Et - ô merveilleuse indépen¬dance des regards humains, retenus au visage par une corde si lâche, si longue, si extensible qu’ils peuvent se promener seuls loin de lui - pen¬dant que Mme de Guermantes était assise dans la chapelle au-dessus des tombes de ses morts, ses regards flânaient çà et là, montaient le long des piliers, s’arrêtaient même sur moi comme un rayon de soleil errant dans la nef, mais un rayon de soleil qui, au moment où je reçus sa caresse, me sembla conscient. Quant à Mme de Guermantes elle-¬même, comme elle restait immobile, assise comme une mère qui semble ne pas voir les audaces espiègles et les entreprises indiscrètes de ses enfants qui jouent et interpellent des personnes qu’elle ne connait pas, il Q1e fut impossible de savoir si elle approuvait ou blâmait, dans le désœuvrement de son âme, le vagabondage de ses regards.

Je trouvais important qu’elle ne partît pas avant que j’eusse pu la regarder suffisamment, car je me rappelais que depuis des années je considérais sa vue comme émi¬nemment désirable, et je ne déta¬chais pas mes yeux d’elle, comme si chacun de mes regards eût pu matériellement emporter et mettre en réserve en moi le souvenir du nez proéminent, des joues rouges, de toutes ces particularités qui me semblaient autant de renseigne¬ments précieux, authentiques et singuliers sur son visage. Mainte¬nant que me le faisaient trouver beau toutes les pensées que j’y rapportais - et peut-être surtout, forme de l’instinct de conserva¬tion des meilleures parties de nous-mêmes, ce désir qu’on a tou¬jours de ne pas avoir été déçu - la replaçant (puisque c’était une seule personne qu’elle et cette duchesse
de Guermantes que j’avais évoquée jusque-là) hors du reste de l’huma¬nité dans laquelle la vue pure et simple de son corps me l’avait fait un instant confondre, je m’irritais en entendant dire autour de moi : « Elle est mieux que Mme Sazerat, que Mlle Vinteuil >>, comme si elle leur eût été comparable. Et mes regards s’arrêtant à ses cheveux blonds, à ses yeux bleus, à l’attache de son cou et omettant les traits qui eussent pu me rappeler d’autres visages, je m’écriais devant ce croquis volon¬tairement incomplet : « Qu’elle est belle ! Quelle noblesse ! Comme c’est bien une fière Guermantes, la descendante de Geneviève de Brabant, que j’ai devant moi ! »
Et l’attention avec laquelle j’éclairais son visage l’iso¬lait tellement, qu’aujourd’hui sije repense à cette cérémonie, il m’est impossible de revoir une seule des personnes qui y assistaient sauf elle et le suisse qui répondit affirma¬tivement quand je lui demandai si cette dame était bien Mme de Guermantes. Mais elle, je la revois, surtout au moment du défilé dans la
sacristie qu’éclairait le soleil inter¬mittent et chaud d’un jour de vent et d’orage, et dans laquelle Mme de Guermantes se trouvait au milieu de tous ces gens de Combray dont elle ne savait même pas les noms, mais dont l’infériorité proclamait trop sa suprématie pour qu’elle ne ressentit pas pour eux une sincère bienveillance, et auxquels du reste elle espérait imposer davantage encore à force de bonne grâce et de simplicité. Aussi, ne pouvant émettre ces regards volontaires, chargés d’une signification précise, qu’on adresse à quelqu’un qu’on connaît, mais seulement laisser ses pensées distraites s’échapper incessamment devant elle en un flot de lumière bleue qu’elle ne pouvait contenir, elle ne voulait pas qu’il pût gêner, paraître dédaigner ces petites gens qu’il rencontrait au passage, qu’il atteignait à tous moments. Je revois encore, au-dessus de sa cra-vate mauve, soyeuse et gonflée, le doux étonnement de ses yeux aux¬quels elle avait ajouté sans oser le destiner à personne, mais pour que tous pussent en prendre leur part, un sourire un peu timide de suze¬raine qui a l’air de s’excuser auprès de ses vassaux et de les aimer. Ce sourire tomba sur moi qui ne la quittais pas des yeux. Alors me rap¬pelant ce regard qu’elle avait laissé s’arrêter sur moi, pendant la messe, bleu comme un rayon de soleil qui aurait traversé le vitrail de Gilbert le Mauvais, je me dis : « Mais sans doute elle fait attention à moi. » Je crus que je lui plaisais, qu’elle penserait encore à moi quand elle aurait quitté l’église, qu’à cause de moi elle serait peut-être triste le soir à Guermantes. Et aussitôt je l’aimai, car s’il peut quelquefois suffire pour que nous aimions une femme qu’elle nous regarde avec mépris comme j’avais cru qu’avait fait Mlle Swann et que nous pen¬sions qu’elle ne pourra jamais nous appartenir, quelquefois aussi il peut suffire qu’elle nous regarde avec bonté comme faisait Mme de Guermantes et que nous pensions qu’elle pourra nous appartenir. Ses yeux bleuissaient comme une per¬venche impossible à cueillir et que pourtant elle m’eût dédiée ; et le soleil, menacé par un nuage mais dardant encore de toute sa force sur la place et dans la sacristie, don¬nait une carnation de géranium aux tapis rouges qu’on y avait étendus par terre pour la solennité, et sur lesquels s’avançait en souriant Mme de Guermantes, et ajoutait à leur lainage un velouté rose, un épiderme de lumière, cette sorte de tendresse, de sérieuse douceur dans la pompe et dans la joie qui caractérisent certaines pages de Lohengrin, certaines peintures de Carpaccio, et qui font comprendre que Baudelaire ait pu appliquer au son de la trompette l’épithète de délicieux

Crédit : Le Journal du Dimanche, 18/08/2019

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De la comtesse Greffuhle au personnage de la duchesse de Guermantes
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Élisabeth de Caraman-Chimay, comtesse Greffulhe (1860-1952), était la fille de Joseph de Riquet de Caraman, 18e prince de Chimay, et de Marie de Montesquiou-Fezensac
Elle se maria à l’âge de 18 ans, le 24 septembre 1878 avec le comte Henry Greffulhe, seul héritier d’un empire financier et immobilier. Le mariage religieux fut célébré le lendemain en l’église Saint-Germain-des-Prés, paroisse des Caraman-Chimay qui possédait un hôtel particulier, au no 17 quai Malaquais.

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La comtesse Greffuhle et le monde littéraire
Grâce à son cousin Robert de Montesquiou, elle se lia avec le monde littéraire : Edmond de Goncourt, José-Maria de Heredia, Stéphane Mallarmé, Judith Gautier. La comtesse Greffulhe recevait chez elle les membres du Tout-Paris littéraire, comme Anatole France, et fit de l’abbé Mugnier, un intime.
Marcel Proust l’aperçut à un bal chez la princesse de Wagram, née Berthe de Rothschild, le 27 juin 1892. Il fut aussitôt fasciné et en fit le principal modèle du personnage de la duchesse de Guermantes. C’est chez Robert de Montesquiou, lors d’une réception donnée pour Delafosse, qu’il l’approcha vraiment. La comtesse avait alors trente-quatre ans et était au sommet de sa beauté. Elle l’accepta plus tard dans son salon, mais elle le fit pour faire plaisir à Robert de Montesquiou, car elle ne l’appréciait pas spécialement au début.
Toutefois, une certaine amitié s’établît entre eux, par correspondance, après la parution du premier volume de La Recherche.
C’est à elle que Proust emprunta le rire cristallin de la duchesse de Guermantes : « Le rire de Mme Greffulhe s’égrène comme le carillon de Bruges », déclare-t-il.
En réalité, bien qu’elle l’ait nié à la fin de sa vie, la comtesse Greffulhe appréciait et recherchait la compagnie de Proust, à qui elle envoya de nombreuses invitations, qu’il déclinait pour la plupart. De son côté, Proust s’inspira d’elle beaucoup plus qu’il ne l’admit jamais, non seulement pour la duchesse et la princesse de Guermantes, mais également pour d’autres personnages, comme Odette de Crécy, à qui elle a « prêté » son élégance proverbiale. Son mari, le comte Greffulhe, est le principal et presque unique modèle du duc de Guermantes. L’analyse des œuvres de jeunesse de Proust, ainsi que de ses cahiers et carnets de brouillon, montrent qu’elle joua un rôle clé dans la genèse de la Recherche, et en particulier dans l’élaboration du nom « magique » de Guermantes, nourri des rêveries de l’auteur sur son illustre et très ancienne famille.
Le Salon de la comtesse Greffulhe, article que Proust destinait au Figaro qui ne le publia jamais, a été retrouvé en 2014, et édité dans un ouvrage consacré à la comtesse Greffulhe [1]
Crédit : Wikipedia

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PARTIE III - INEDITS A PARAÎTRE

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Des inédits éclairent le rapport tourmenté de Proust à son homosexualité. Publication en octobre.
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Vu du Royaume-Uni

The Guardian, (Londres) 08/08/2019

Les éditions de Fallois publieront début octobre neuf nouvelles que Marcel Proust avait renoncé à faire paraître de son vivant. Un événement littéraire qui dévoile un peu plus le rapport compliqué de l’auteur d’À la recherche du temps perduà son homosexualité.

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On les pensait “perdues”, mais les éditions de Fallois vont publier neuf nouvelles inédites de Marcel Proust, [se réjouit The Guardian, qui revient sur l’annonce faite la semaine dernière par l’éditeur parisien. Les textes “doivent être publiés pour la première fois à l’automne”, précise le quotidien britannique.

Ces nouvelles ont été écrites dans les années 1890, alors que Proust était âgé d’une vingtaine d’années. Elles auraient dû figurer dans le recueil Le Plaisir et les Jours, le premier livre publié par Proust, en 1896.Mais ce dernier avait finalement décidé de ne “pas les y inclure”, probablement à cause de ce qu’une présentation de l’éditeur décrit comme “leur audace” pour l’époque.

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Comme un journal intime

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Mêlant “contes de fées, rêveries et dialogues”, les neuf textes avaient été découverts par Bernard de Fallois, un grand spécialiste de l’œuvre de Proust, décédé en 2018.Comme le souligne l’universitaire Luc Fraisse, qui en a établi l’appareil critique, leur auteurconsidérait sans doute qu’ils “auraient pu heurter un milieu social où prévalait une forte morale traditionnelle”. Car, “sous le voile d’une fiction transparente”, le jeune Proust dessine à travers ces nouvelles un “journal intime”, abordant notamment le thème de l’homosexualité.

The Guardian le rappelle :

Proust n’a jamais reconnu publiquement son homosexualité, allant jusqu’à se battre en duel avec un critique qui avait laissé entendre, à juste titre, qu’il était gay.”

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Une prise de conscience douloureuse

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Si Proust n’a jamais souhaité en admettre la dimension biographique, le thème de l’homosexualité est pourtant bien présent dans son œuvre. Telle qu’elle est évoquée dans les textes à paraître, “la prise de conscience [de cette orientation sexuelle] est vécue sur le mode exclusivement tragique, comme une malédiction”, précise la présentation de l’éditeur.

Annoncé en librairie le 9octobre, sous le titre Le Mystérieux correspondant et autres nouvelles inédites, le nouveau recueil, devrait donc apporter aux proustiens un éclairage nouveau sur cette dimension de la vie et de l’œuvre de l’auteur d’À larecherche du temps perdu.Les anglophones devront toutefois attendre un peu pour s’y plonger : “Une traduction anglaise n’est pas encore annoncée”, note The Guardian.

Crédit : The Guardian

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Des textes inédits de Marcel Proust seront publiés en octobre
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La relation du Monde / AFP

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Les neuf textes, rédigés alors que Proust était âgé d’une vingtaine d’années, auraient dû figurer dans le premier livre de l’écrivain, « Les Plaisirs et les Jours ».


La tombe de Marcel Proust au cimetière du Père-Lachaise (Paris). JOEL SAGET / AFP
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La recherche du Proust perdu n’aura pas été vaine : quatre-vingt-dix-sept ans après la mort de l’écrivain, sonne désormais l’heure du Proust retrouvé.

Des nouvelles inédites de l’auteur seront publiées le 9octobre sous le titre Le Mystérieux Correspondant et autres nouvelles inédites, ont annoncé, lundi 5août, les Editions de Fallois.

Ces neuf textes, rédigés alors que Proust était âgé d’une vingtaine d’années, auraient dû figurer dans le premier livre de l’écrivain, Les Plaisirs et les Jours (1896), mais avaient été finalement écartés par l’auteur.

Ces nouvelles ont été redécouvertes par le créateur des éditions de Fallois, Bernard de Fallois, mort en 2018. Ce grand spécialiste de l’œuvre de Marcel Proust est déjà à l’origine de la découverte d’un roman composé entre 1895 et 1899, et resté inédit, Jean Santeuil, (publié chez Gallimard en1952), et du texte Contre Sainte-Beuve, finalement publié en1954.

Lire aussi : A Illiers-Combray, du côté de chez Proust

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Aux sources de la « Recherche »

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« Avec ce recueil de nouvelles et de textes divers entièrement inédits, nous remontons auxsources de la Recherche du temps perdu », ont souligné les Editions de Fallois dans un communiqué.

« Ces textes, explique l’éditeur, portent la marque d’un travail approfondi (…). La plupart de ces courts récits obéissent aux lois du genre : mise en scène d’une situation, péripéties, chute finale (…). On y voit le jeune écrivain multiplier les expérimentations narratives suggérées parfois par ses lectures mais déjà résolument engagé dans le processus de création qui annonce par bien des signes l’œuvre future. » « Ces pages inédites n’ont pas la perfection de la Recherche mais précisément, elles nous aident à la mieux comprendre en nous révélant ce que fut son début », estime encore l’éditeur.

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Textes trop audacieux

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Pourquoi Proust n’avait-il pas retenu ces textes ? « Sans doute considérait-il qu’en raison de leur audace ils auraient pu heurter un milieu social où prévalait une forte morale traditionnelle », suggère notamment l’éditeur.

Le thème dominant de ces œuvres, précise ce dernier, c’est l’analyse de « l’amour physique si injustement décrié ». « La prise de conscience de l’homosexualité y est vécue sur le mode exclusivement tragique, comme une malédiction », ajoute-t-il.

Le volume (180 pages+ 8 pages fac-similés, 18,50euros) est complété par un ensemble de documents présentés par l’universitaire Luc Fraisse sur les sources de la Recherche.

Crédit : Le Monde/ AFP 05/08/2019


[1• ↑ Laure Hillerin, La Comtesse Greffulhe, p. 459-465.

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2 Messages

  • Benoît Monneret | 17 août 2019 - 16:45 2

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    Proust évoque la Vivonne dans sa chambre tapissée de liège
    ZOOM : cliquer l’image

    Benoît Monneret
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    Hervé Bazin avait écrit un roman, « La tête contre les murs », Marcel Proust vit couché dans une chambre aux fenêtres et rideaux fermés, entre autres pour se protéger des crises d’asthme provoquées par le pollen des arbres de la rue. Les murs sont tapissés de panneaux de liège qui amortissent les bruits du dehors.

    Sa mère l’y avait souvent conduit plus jeune, et c’est ce lien à son enfance qui détermina son choix. Bientôt, l’écrivain va s’y emmurer dans sa recherche du temps perdu. La Vivonne en fait partie. La chambre bruisse de l’évocation de ses souvenirs. Ils ricochent contre les murs de la chambre, malgré le liège :

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    « Je m’amusais à regarder les carafes que les gamins mettaient dans la Vivonne pour prendre les petits poissons, et qui, remplies par la rivière, où elles sont à leur tour encloses, à la fois « contenant » aux flancs transparents comme une eau durcie, et « contenu » plongé dans un plus grand contenant de cristal liquide et courant, évoquaient l’image de la fraîcheur d’une façon plus délicieuse et plus irritante qu’elles n’eussent fait sur une table servie, en ne la montrant qu’en fuite dans cette allitération perpétuelle entre l’eau sans consistance où les mains ne pouvaient la capter et le verre sans fluidité où le palais ne pourrait en jouir. Je me promettais de venir là plus tard avec des lignes ; »<:span>

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    « …j’obtenais qu’on tirât un peu de pain des provisions du goûter ; j’en jetais dans la Vivonne des boulettes qui semblaient suffire pour y provoquer un phénomène de sursaturation, car l’eau se solidifiait aussitôt autour d’elles en grappes ovoïdes de têtards inanitiés qu’elle tenait sans doute jusque-là en dissolution, invisibles, tout près d’être en voie de cristallisation. »

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    « …quand quelqu’un, pensant qu’on était en retard pour la promenade, disait : « Comment, seulement deux heures ? » en voyant passer les deux coups du clocher de Saint-Hilaire (qui ont l’habitude de ne rencontrer encore personne dans les chemins désertés à cause du repas de midi ou de la sieste, le long de la rivière vive et blanche que le pêcheur même a abandonnée, et passent solitaires dans le ciel vacant où ne restent que quelques nuages paresseux), tout le monde en chœur lui répondait : « Mais ce qui vous trompe, c’est qu’on a déjeuné une heure plus tôt, vous savez bien que c’est samedi ! »

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    « Le Pont-Vieux débouchait dans un sentier de halage qui à cet endroit se tapissait l’été du feuillage bleu d’un noisetier sous lequel un pêcheur en chapeau de paille avait pris racine. À Combray où je savais quelle individualité de maréchal ferrant ou de garçon épicier était dissimulée sous l’uniforme du suisse ou le surplis de l’enfant de chœur, ce pêcheur est la seule personne dont je n’aie jamais découvert l’identité. Il devait connaître mes parents, car il soulevait son chapeau quand nous passions ; je voulais alors demander son nom, mais on me faisait signe de me taire pour ne pas effrayer le poisson. »

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    « Un donjon sans épaisseur qui n’était qu’une bande de lumière orangée et du haut duquel le seigneur et sa dame décidaient de la vie et de la mort de leurs vassaux avait fait place — tout au bout de ce « côté de Guermantes » où, par tant de beaux après-midi, je suivais avec mes parents le cours de la Vivonne — à cette terre torrentueuse où la duchesse m’apprenait à pêcher la truite et à connaître le nom des fleurs aux grappes violettes et rougeâtres qui décoraient les murs bas des enclos environnants ; »

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    « Depuis ces jours si différents de celui où je venais de les voir sur la digue, si différents et pourtant si proches, elles se laissaient encore aller au rire comme je m’en étais rendu compte la veille, mais à un rire qui n’était pas celui intermittent et presque automatique de l’enfance, détente spasmodique qui autrefois faisait à tous moments faire un plongeon à ces têtes, comme les blocs de vairons dans la Vivonne se dispersaient et disparaissaient pour se reformer un instant après ; »

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    « Le côté de Méséglise avec ses lilas, ses aubépines, ses bluets, ses coquelicots, ses pommiers, le côté de Guermantes avec sa rivière à têtards, ses nymphéas et ses boutons d’or, ont constitué à tout jamais pour moi la figure des pays où j’aimerais vivre, où j’exige avant tout qu’on puisse aller à la pêche, se promener en canot, voir des ruines de fortifications gothiques et trouver au milieu des blés, ainsi qu’était Saint-André-des-Champs, une église monumentale, rustique et dorée comme une meule ; »