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Lumières sur Dali au parc de la Villette...

suivi de Sur les pas de Dali à Port Lligat de Cadaques

D 3 décembre 2023     A par Viktor Kirtov - C 1 messages Version imprimable de cet article Version imprimable    ................... PARTAGER . facebook


L’art dans la nature - La Villette - Paris. Un spectacle lumineux et interactif à La Villette avec les œuvres de Salvador DALI, du 16 novembre 2023 au 21 janvier 2024

Octobre 2012, nous étions en pays catalan espagnol et français sur les pas de Dali à Port Lligat de Cadaques et de Maillol à Banyuls. Relation présentée dans le cadre d’un article intitulé : Variations sur le nu féminin. Muses et artistes dont la section relative à Dali et Gala est reprise à la suite de la relation consacrée l’exposition Dali au Parc de la Vilette.

Lumières sur Dalí au parc de la Villette

Sculpture « L’Escargot et l’Ange » de Salvador Dalí exposée au parc de la Villette à Paris. (Crédits : © LetsGo)
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Au parc de la Villette à Paris, sculptures monumentales et projections plongent les veurs dans l’univers du peintre surréaliste.

Aude De Bourbon Parme

La Trbune Dimanche, 03 Déc 2023

« Ouah, c’est trop beau, papa ! » s’exclame une fillette en entrant dans « L’Art dans la nature ». À la nuit tombée, le parc de la Villette s’illumine pour donner vie à l’univers délirant de l’artiste surréaliste espagnol Salvador Dalí. Des rayons lumineux rouges, verts ou bleus éclairent ses sculptures monumentales en bronze. La voix du Catalan partage ses pensées. Des projections vidéo animent des motifs emblématiques de son univers. D’étranges yeux multicolores projetés sur un mur clignent. Un champ d’œufs lumineux attire les enfants qui y accourent, tapant sur certains pour changer leur couleur. Les arbres se parent de formes colorées mouvantes. Tout est fluide, tout est mouvement, à l’image du visiteur qui se promène, émerveillé.

La Villette propose cet hiver une déambulation lumineuse à travers des images et des sculptures monumentales en bronze tirées des plus célèbres tableaux de l’artiste, tel l’éléphant sur échasses portant un ange glorieux. Il les réalisa à la fin de sa vie, entre 1975 et 1977. Il est alors l’un des artistes les plus influents du monde occidental, reconnu en Europe mais aussi aux États-Unis, où il vécut pendant la Seconde Guerre mondiale. Ses amis sont Pablo Picasso, Joan Miró, le poète Gabriel García Lorca ou Luis Buñuel, avec qui il écrivit le scénario de l’étrange film Un chien andalou.

L’inconscient et les rêves

Le dandy excentrique à la moustache semblable à celle de Diego Vélasquez, qu’il admirait, a marqué le XXe siècle de son art et de sa personnalité. Il est le représentant majeur du surréalisme. Ses œuvres figuratives s’inspirent de la psychanalyse de Sigmund Freud, qu’il rencontra par l’intermédiaire de l’écrivain Stefan Zweig. Elles puisent leurs motifs dans l’inconscient et les rêves de l’artiste. De grandes horloges molles rythment le parcours lumineux. Elles incarnent pour lui un temps malléable, non soumis aux diktats, une manière de figurer sa soif de liberté. Les fourmis et escargots avançant en file indienne sont extraits de souvenirs de son enfance à Figueres en Catalogne. Le corps de sa muse et femme Gala, souvent représentée, lui permet de signifier la puissance de son amour. Il l’associe à un œuf ou à une licorne, tous deux symboles de pureté et de perfection. Ses allégories permettent à Salvador Dalí de raconter sa vie, de partager ses réflexions existentielles. L’introspection est sa source d’inspiration.

L’homme est un mégalomane notoire. À Figueres, où il est né, il conçoit en 1974 un théâtre-musée qui lui est depuis consacré. Il est aussi possible de visiter sa maison atelier à Port Lligat, près de Cadaqués. Elle est à l’image de l’artiste, complexe, excentrique, joyeuse. « L’Art dans la nature » raconte en filigrane la vie de l’artiste, les êtres qui lui sont chers, ses collaborations. Les yeux écarquillés projetés sur un mur du parc de la Villette sont extraits de La Maison du docteur Edwardes (Spellbound en VO) d’Alfred Hitchcock. Le réalisateur américain lui a commandé un décor peint. Il était à ses yeux le seul à pouvoir donner forme à un rêve.
L’exposition incite à retrouver son âme d’enfant en découvrant autrement l’art de l’artiste surréaliste catalan. Et parce que les parcours lumineux sont à la mode, Paris en accueille trois autres durant cette période festive : Jungle en voie d’illumination au Jardin des Plantes, Dragons et lanternes au Jardin d’Acclimatation et Lumières en Seine dans le domaine national de Saint-Cloud. Un seul conseil pour en profiter au mieux : couvrez-vous !

« L’Art dans la nature », au parc de la Villette à Paris jusqu’au 21 janvier 2024.

Crédit. latribune.fr

Quelques unes des œuvres exposées

Parmi les œuvres exposées, les visiteurs pourront, entre autres, admirer : La danse du temps I, Alice au Pays des Merveilles, Eléphant de Triomphe, les oeufs Dada, la Venus spatiale ou encore Le Profil du temps : la fameuse montre molle :

GIF Danse du temps


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Le parcours enchanteur de « L’Art dans la nature » débute par l’élément le plus emblématique de l’œuvre de Dalí : « Danse du temps ». L’artiste était obsédé par la notion de temps et a utilisé l’image de cette horloge dans plusieurs de ses œuvres. Sans être soumis aux lois rigides d’une horloge, le temps se déroule pour Dalí au rythme d’une danse perpétuelle qui s’accélère, se ralentit, s’étire et se liquéfie. Grâce à la projection vidéo sur la sculpture originale de 1979, vous pourrez vous immerger dans une brèche temporelle 100% Dalí.

GIF Alice au pays des merveilles


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Avec cette sculpture originale de 1977, Dalí représente l’innocence et la naïveté d’Alice, le personnage de "Alice au pays des merveilles", de Lewis Carroll, une œuvre qui le fascinait. Apparaissant comme figée dans l’air, la silhouette d’Alice sautant à la corde avec des roses dans ses mains et ses cheveux, symbolise la beauté féminine et la jeunesse éternelle. La béquille symbolise la stabilité, lui apportant un soutien émotionnel, agissant comme un lien avec la réalité. Cette magnifique sculpture est éclairée par des lasers et un dispositif de boules à facettes, qui rehaussent la beauté de l’installation.

GIF Les éléphants


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Un impressionnant défilé d’éléphants lumineux, symbole de l’avenir pour Dalí, nous montre le chemin vers la dernière partie de la visite. Ces éléphants défient les lois de la nature en se déplaçant avec grâce et sans effort. À leur image, vous serez invité à terminer ce parcours avec une agréable sensation de lévitation.

GIF Oeufs Dada


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L’œuf est l’un des motifs favoris de Dalí en raison de la dualité de son extérieur dur et de son intérieur mou. Ces œufs, présents dans des œuvres comme « La Vénus Spatiale » représentent la vie, le renouveau et l’avenir. Dans « L’Art dans la nature », les organisateurs ont souhaité représenter ces œufs à travers des sculptures lumineuses interactives qui associent nature et technologie. Voir plus avant, les œufs de sa maison de Port Lligat. On y voit dans un de ces œufs Dali et Françoise Hardy. Nous avons aussi poser poser dans le même œuf.

GIF La Vénus Spatiale


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Dans cette sculpture originale de 1977, Dalí représente Vénus, déesse de la beauté, sous la forme classique d’un buste féminin mais auquel il ajoute quatre symboles de son répertoire surréaliste. On retrouve en effet l’horloge qui ici rappelle le caractère éphémère de la beauté physique, opposé à celle de l’art, intemporelle et éternelle. Les fourmis représentent la mortalité humaine, tandis que l’œuf qui fait le lien entre les deux parties du corps, représente la vie, le renouveau et le futur.

GIF Le Profil du temps


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La promenade lumineuse se poursuit parmi les sculptures d’horloges qui fondent et vous donnent la sensation que le temps est déformé, un rappel de la fascination de Dalí pour le temps qui passe et une réflexion sur l’aspect illusoire de l’existence.

Le site du Parc de la Vilette

Qui était Salvador Dali ?

Salvador Dali, né en 1904 en Espagne, est l’un des artistes les plus emblématiques et excentriques du 20ème siècle. Figure de proue du mouvement surréaliste, Dali est célèbre pour ses œuvres captivantes, souvent teintées d’éléments oniriques et absurdes. Son style unique mélangeait habilement réalisme et fantaisie, créant des images qui défient la logique et invitent à l’interprétation. Dali n’était pas seulement peintre, mais aussi sculpteur, écrivain et cinéaste. Son œuvre la plus connue, "La Persistance de la Mémoire" avec ses montres molles, est devenue un symbole
du surréalisme. Dali était également connu pour sa personnalité flamboyante et ses apparitions publiques extravagantes, souvent accompagné de sa moustache emblématique. Au-delà de son art, Dali était un penseur profond, explorant des thèmes tels que la religion, la science et la psychologie. Son héritage perdure non seulement à travers ses œuvres, mais aussi à travers son influence sur l’art contemporain et la culture populaire. "L’Art dans la Nature" à la Villette est une célébration de cet héritage, invitant les visiteurs à plonger dans l’univers fascinant de ce maître du surréalisme.


Salvador Dali photographié par Allan Warren (1972)


Sur les pas de Dali à Port Lligat

Octobre en pays catalan espagnol et français sur les pas de Dali à Port Lligat de Cadaques

DALI / GALA


01. Gala de dos, face à la baie de Port Lligat, 1955

02.

03. Gala - Fundacio Gala-Salvador Dali, Figueras.

04. .

05. .

06 Expo Marilyn à la Métairie, oct. 2012. Ph. Bert STERN . .

07. Dali de dos peint Gala de dos face au miroir. A g., la baie vitrée de la photo précédente . .

08. La maison de Port Lligat, Ph. JORDI PUIG. .

09. Oeuf sur le pigeonnier. .

10. Autre vue du pigeonnier, Ph. V.K

11. Dans le jardin de Port Lligat

12. Gala appuyéé sur Dali,dans le jardin. En haut, le pigeonnier, Ph. DESCHAMPSt

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14. Dali et Françoise Hardy, Port Lligat, octobre 1968.

15. L’obsession de Dali, d’avoir tué son frère

16. Dans la chambre de Dali et Gala. Hors cadre, à g. deux lits jumeaux rouge.

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18. Leda atomica, 1949, Fundacio Gala-Salvador Dali, Figueras

19. A distance (20 m.), devient le portrait d’Abraham Lincoln. Musée de Figueras

20. Gala et Dali, Ph. BETMANN CORBIS

21. « Pourquoi portez-vous une moustache ? - Afin de passer inaperçu...

GALA

« Je veux que vous me fassiez crever »

Gala

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« C’est une muse redoutable. Mi-ange, mi démon, elle a envouté les hommes de sa vie, mais terrifié son entourage » nous dit Dominique Bona [1]. Epouse de Paul Eluard, maîtresse de Marx Ernst, la rencontre Dali-Gala a lieu à Cadaqués, l’été 1929 poursuit Dominique Bona. « Accompagnés de leur fille, les Eluard sont venus au bord de ma Méditerranée en convalescence amoureuse Eluard tente de récupérer l’amour en miettes de Gala qu’il vient de soumettre lui-même à la tentation du partage. Marx Ernst en a profité et Gala s’est laissée subjuguer. Max l’a peinte sous toutes les coutures sur les murs et les portes de sa maison d’Eaubone, transformée en cathédrale dédiée à l’amour de Gala. Une sainte païenne magnifique et nue qui peine à se remettre de cet épisode.

L’été brûlant de Cadaqués. La beauté des criques et la simplicité biblique du paysage enchassent un coup de foudre, qui restera dans les annales des histoires d’amour. Gala la Russe, comme l’appellent les surréalistes, envoûte littéralement le jeune Dali. Elle rend les armes devant sa jeunesse (dix ans de moins qu’elle), ses yeux de jais, ses éclats de rire phénoménaux et son accent où roulent des cailloux.[...] A sa question de chevalier servant. « Que voulez-vous que je vous fasse ? », la moins mièvre des muses, allongée sur un rocher brûlant répond : « je veux que vous me fassiez crever. »
Paul Eluard, repart seul avec sa fille.

Gala va devenir la muse, maîtresse, épouse, impressario, elle est consubstantielle à Dali qui dit : « Sans elle, je ne sais ni respirer, ni marcher, ni descendre un escalier ». Si Gala disparaissait disait-il à son ami Louis Pauwel, personne ne pourrait prendre sa place. C’est une impossibilité absolue. Je serais seul. »

Pour Dali, Gala est LA femme, la seule qu’il ait con nue et aimée. Elle est la mère et l’amante ; La sœur incestueuse. Transgressant tous les tabous, il la voit comme son autre moi. La moitié de lui-même. Le reflet de Narcisse dans les eaux de la mémoire, nous dit aussi Dominique Bona.

Mais Gala, c’est aussi « Avida Dollars » comme l’a surnommé Breton. Et Soupault, l’a vite taxée de « gale ». Elle « intimide ou agace », « parle peu et sourit rarement »... Elle a pourtant jeté son dévolu et réussi des prises d’exception. D’où tient-elle son pouvoir ? Peut-être de Kazan d’où sont originaires, dit-on, les femmes réputées les plus voluptueuses de l’Orient. [2].

*

Port Lligat et la maison-musée de Salvador Dali

Il est impossible de connaître ma peinture sans connaître Port Lligat.

Dali

Une petite baie bucolique vous attend là comme aux premiers jours de la création, ou presque, quelques barques de pêcheurs amarrées sur le quai de pierre ou sur le sable, la « barque de Gala » vous attend sur la placette devant l’entrée réservée aux visiteurs. Ils sont peu nombreux en ce mois d’octobre, l’endroit est paisible, une grande bâtisse éclatante de blancheur, est dressée là, en escalier, les tronçons suivant la pente de la côte rocheuse sur laquelle la maison de Dali est bâtie. Des percées vitrées dans le mur donnent sur la mer. De l’intérieur, les points de vue sont autant de tableaux naturels et vivants de la baie. Ils disent le temps atmosphérique, l’heure, la lumière, la vie des pêcheurs. Ce n’est plus la petite cabane de 1930, là où était remisé le matériel de pêche. C’est en effet, cette année là que Salvador et Gala, s’y étaient retirés, parcourant les deux ou trois kilomètres qui séparent cette petite crique de Cadaqués , à dos de mulet, sur un chemin terreux et abrupt, avec des valises chargés de livres.

Dali est un enfant du pays, son père est natif de Cadaqués - autre perle - et y possède une maison familiale. Salvador avait l’habitude d’y séjourner, jusqu’au jour où son père l’en chassa. Suite d’une querelle née d’une provocation de Dali pour étonner ses amis surréalistesparisiens : sur un chromo acheté sur la rambla de Figueras, représentant le Sacré-C#339 ;ur, il avait écrit : « Parfois, je crache par plaisir sur le portrait de ma mère ». Trop, c’est trop, Maître Dali, père, notable de Figueras où il est notaire, se fâche. Salvador n’est plus le bienvenu dans la maison familiale de Cadaqués. Il s’achète alors cette fameuse cabane de pêcheur à Port Lligat, puis un mois après, une autre, puis d’autres voisines au fil du temps. Résultat cette demeure labyrintique aux nombreuses petites pièces et escaliers rattrapant le niveau du rocher pour passer d’une première construction à la suivante, attenante. Le tout marqué de la patte de l’artiste et de celle de Gala. Les bouquets de fleurs séchées qu’elle suspendait un peu partout sont toujours là - changés tous les deux ans... Dali et Gala sont partout dans cette maison. Ils sont encore là. C’est incontestable. Allez-y, vérifiez !

Le tout, dans un jardin d’oliviers avec beaux points de vue sur la baie, et agrémenté des #339 ;uvres délirantes du maître. Un #339 ;uf symbolique des obsessions du maître se dresse sur le pigeonnier, les oeufs de Castor et Pollux sont aussi là. Deux #339 ;ufs à visage humain les symbolisent. L’un est entaillé , comme fendu par un coup de hache. Il a tué sin frère croît-il, en venant au monde. La mythologie de Léda et le cygne sera réinterprétée dans son tableau célèbre « [uLeda atomica/u-908#section6] », 1949 avec Gala en Leda. ...Une piscine, inspirée du chemin d’eau de l’Alhambra à Grenade, avec nombre d’#339 ;uvres folles à découvrir. Il y recevait ses amis.

Sept mois de l’année, la maison de Port Lligat se transformait en centre du monde dalinien. Les serveurs qui s’en occupaient et la gardaient en constituaient le premier cercle : on avait le droit d’y voir le maître « en visage de maison ». En 1971, il posa avec Gala et eux sur une photo intitulée La Calèche des oubliés [3]

Vous ne regretterez pas d’être venu jusque là, après avoir gagné Cadaqués par une unique petite route en lacets, avant de descendre sur la mer. Le goudron a aussi remplacé le chemin de mulet jusqu’à Port Lligat, mais le lieu a conservé toute sa beauté naturelle et les délires de Dali comme s’il était encore là, hier.

Cf. ICI

Salvador Dali, le génie et le bouffon de Port Lligat

Attention collector ! Ce documentaire de 2013 de la série « Une maison, un artiste » (France 5 ) est aujourd’hui introuvable sur le Net.

Réalisateur François Chayé Auteur Patrick Poivre d’Arvor

L’émission : En 1930, Salvador Dali, jeune peintre espagnol, souhaite s’installer dans une maison en Espagne avec sa compagne, Gala. Mais celle-ci est une femme mariée. La situation provoque une rupture avec sa famille installée à Cadaques. Il décide alors d’acheter une petite maison de pêcheurs à deux kilomètres de la demeure familiale, au bord de la mer, dans la crique de Port Lligat. Au fil des années, le couple agrandit progressivement la maison en acquérant des bâtiments voisins dont ils conservent le caractère simple d’habitat de pêcheurs. Ce refuge du couple témoigne du génie et de la folie de Dali, un des plus grands artistes de l’art moderne. (notice de présentation du documentaire)

LA MAISON DE LLIGAT VUE PAR ERIC DE SAINT ANGEL

C’est un paysage de commencement du monde, d’où pourrait surgir un animal monstrueux. Ce décor étrange, surréaliste, où les fantasmes peuvent s’ébattre librement, est le coeur du labyrinthe. Nous sommes à Port Lligat, à 2 kilomètres de Cadaqués, dans le nord de la côte catalane. Dans ce qui était un minuscule village de pêcheurs, Salvador Dalí a acheté en 1929 une baraque pour y abriter ses amours, réprouvées par son père, avec une Russe divorcée. Elena Ivanovna Diakonova, dite Gala, était l’épouse de Paul Eluard. Mais une rencontre à Figueras, la ville natale de Dalí, a bousculé le destin. Coup de foudre mutuel. Le jeune peintre a trouvé sa muse.

Leur maison, formée à l’origine, de cabanes de pécheurs accolées les unes aux autres, à des époques différentes, et réunies par des escaliers, est un assemblage de volumes. Cette forteresse symbolique, coiffée d’ oeufs géants et hérissée de fourches, sur fond de mer et d’oliviers, est assez austère. Mais l’intérieur est plein de recoins, de cheminées, d’objets inattendus, de miroirs truqués, de meubles espagnols anciens. Tout est sacré dans cette maison, tout est fétiche. C’est un mélange de caverne d’Ali Baba, d’antre de magicien et de laboratoire. Réglé comme une horloge, Salvador Dalí passe le printemps, l’été et une partie de l’automne à Port Lligat, novembre et décembre à Paris, et le reste de l’hiver à New York avant de regagner l’Espagne. Dans cette maison, il a surtout travaillé. Enormément. Des nuits entières. Car le bouffon aux mille déguisements, dont les moustaches captent l’attention des médias comme des antennes, est un artiste d’une grande exigence, dont l’ oeuvre regorge de références aux géants de la peinture.

Aujourd’hui transformée en musée, la maison où Dalí ne retourna plus après la mort de Gala, en 1982, semble toujours hantée par ce personnage baroque. Au détour de chaque corridor, on s’attend à le voir surgir, prêt à pourfendre quiconque serait assez sot pour nier que la vérité du délire est la seule échappatoire à l’absurdité, au néant de la vie.

Crédit : Eric De Saint Angel (Nouvel Obs)

Visite dans la maison du peintre à Port Llligat, qui a inspiré certaines de ses compositions. Catherine Grenier, sa biographe, et Robert Descharnes, son photographe et secrétaire particulier, évoquent la vie et la manière de travailler du maître. Antoni Pitxot, peintre et ami, raconte quant à lui plusieurs anecdotes qui permettent d’appréhender la personnalité complexe de l’artiste, au-delà du personnage qu’il avait créé pour les médias.

Un portrait hors des sentiers battus de ce peintre atypique qui cultivait l’art de l’excentricité jusque dans sa vie privée.


In Voluptate Mors

Cet assemblage de corps nus formant un crâne, repris depuis à de nombreuses occasions (dont cette affiche de Dom Juan à la Comédie Saint-Michel, en 2009), c’est Salvador Dali qui le conçut et dessina. Et Philippe Halsman le photographia comme portrait de Dali en 1951 à New York.
7 femmes qui ont posé pendant 3 heures pour s’approcher du croquis original de Dali. Variation sur le thème du sexe et la mort, l’œuvre est intitulée « In Voluptate Mors ».

A lire, à voir


22.

23.

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DVD de référence
Proposé dans la boutique de la maison de Port Lligat. Multilingue. Fonctionne très bien en français.

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Dali : sa Catalogne 30 ans après

Le Triangle Dalinien se situe au Nord-Est de l’Espagne. Il s’agit d’une figure géométrique qui apparaîtrait sur la carte de la Catalogne lorsque l’on relie trois lieux liés à Salvador Dalí, Figueres, Port Lligat et Púbol. Tout long de l’été, Dalí sera à l’honneur à travers l’exposition intitulée « Dalí, une histoire de la peinture » au Grimaldi Forum de Monaco. Le Centre de Congrès et de Culture poursuit ainsi ses grandes monographies d’artistes après Warhol, Picasso ou encore Bacon.

La Léda Atomica de Salvador Dali

« "La Leda Atomica est le tableau clé de notre vie", affirme Dali. Tout y est suspendu dans l’espace sans que rien ne touche rien. La mer elle-même s’élève à distance de la terre. » (Dali, Leda atomica : anatomie d’un chef-d’oeuvre de Jean-Louis Ferrier disponible en édition poche). Leda a les traits de Gala qui a pose pour son mari. Observez bien la main gauche de Léda-Gala, elle porte un anneau à son annulaire. Même en Léda, Gala reste l’épouse de Dali


Savador Dali, Leda atomica, 1947-1949
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Leda atomica, géométrie de la composition

Alors que Véronèse, Michel Angle ont choisi de représenter l’étreinte, on se situe, plutôt ici, dans la phase de séduction, avant l’acte sexuel. J-L Ferrier voit même dans les quelques gouttes qui semblent tomber du corps du cygne, de possibles gouttes de sperme échappées de Zeus dans son impatience de séduire Léda. Avec aussi, les contradictions du monde de Dali : l’oeuf en bas du tableau est déjà pondu et éclos. « Je fais de mes contradictions une véritable cohérence » dit d’ailleurs Dali.br /

On aperçoit aussi au fond du tableau, deux immenses falaises, à gauche et à droite. Il s’agirait des rochers abrupts du cap Norfeo, qui évoque la terre natale de Dali, souvent présente dans ses oeuvres.
« J’ai canalisé mon délire par la raison, comme en art j’ai trouvé mon expression par le classicisme. » nous dit également Dali.br /Ce classicisme se retrouve dans la composition en triangle et pentagone, et le respect des rapports harmonieux . Les architectes, artisans, mathématiciens du monde grec se sont beaucoup intéressés à cette notion de proportion ou de rapport.

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Leda atomica, les rapports harmonieux du pentagone

Le langage usuel s’en est emparé, ne dit-on pas avoir de bons rapports ou mauvais rapports avec quelqu’un, comme on parle aussi de rapports sexuels... br /Il n’existe pour Dali que l’art maîtrisé, composé, construit. D’ailleurs, l’équerre jaune, ou l’espace de règle sous le cygne sont là pour nous le rappeler.br /Comme signalé plus haut tous les motifs proposés (« l’exception du cygne et des rochers ) sont en état d’apesanteur. Selon J-L. Ferrier, la lévitation des choses et des êtres joue le rôle de détonateur visuel. La lévitation suggère l’antigravitation, l’antimatière. L’imagination et la créativité de Dali sont excitées par les hypothèses les plus audacieuses de la science contemporaine. Les rèves de lévitation semblent être associés à des rêves de pureté. Et, bien que le titre de la toile se réfère à la physique atomique la toile a aussi une origine psychanalytique.

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On peut, pour le titre, se souvenir que la toile a été peinte en 1949, seulement quatre ans après Hiroshima alors que le monde venait de découvrir, avec stupeur, la puissance fantastique de l’énergie cachée dans la matière. Quant à l’origine psychanalytique liée au monde de l’esprit, par opposition au monde de la matière, la psychanalyse a commencé, aussi, d’en dévoiler toute la puissance cachée. Le pouvoir de l’homme sur la matière et sur l’esprit. Alors pourquoi ne pas rêver l’homme et les choses en lévitation ? <br /<Seulement vingt ans plus tard, en 1969, des cosmonautes en lévitation, avec leur brosse à dent en lévitation, à bord de leur module Eagle (tiens donc, encore un volatile !) de la mission Apollo XI, volaient vers la Lune. Un peu plus tard, une Léda et son mari, tous deux astronautes, s’envoleront ensemble dans l’espace, la NASA n’avait pas prévu d’artiste peintre dans l’équipage, et les autres membres du vol tournèrent pudiquement leur regard ailleurs. Seules les caméras techniques embarquées gardent la représentation de leur étreinte en lévitation..

Ce n’est pas la première fois qu’un artiste ou un écrivain, dans ses intuitions ou ses délires, anticipe sur la science. Dali, grand prêtre de « l’irrationalité concrète » aura été, ici, un peu en avance sur son temps - expression qui signifiait, pour lui, quelque chose comme le passage à la réalité de ce que la conscience habituellement piétine, refoule ou écarte en accord avec la raison... Cet adepte de la paranoïa contrôlée disait aussi :« Je peux dire que je ne sais pas quand je commence à simuler et quand finit le délire, mais la seule différence entre un fou et moi c’est que je ne suis pas fou ».

Depuis, la physique atomique a progressé, ouvrant encore plus grand le champ des possibles avec ses nouvelles particules et le renforcement de la mise en évidence des symétries. Dans la structure atomique fine ainsi qu’entre matière et antimatière, autrement dit ...il y a matière à nouveaux mythes encore plus fantasmatiques que les premiers. Le problème pour nous, c’est que notre langage usuel ne suffit plus pour les raconter, ils ne s’expriment bien que par les mathématiques, et le physicien Georges Charpak, prix Nobel - lu ses Mémoires en vacances (c’est très mal écrit) - nous l’affirme, cependant : les physiciens n’ont de cesse de peaufiner leurs équations pour qu’elles soient harmonieusement belles et mettent en évidence des proportions bien sous tous rapports.

PLUS sur Leda et le cygne

ISBN-10 : 2282301668


[1auteur d’une biographie de Gala parue chez Flammarion, et d’un article « L’amante » dans le hors-série « C’était Dali », Le Figaro , à qui nous empruntons de larges extraits

[2Dominique Nora, L’amante, Hors série Figaro : C’était Dali, p. 91, 2012

[3Fiona Levis, C’était Dali, Hors série Le Figaro, p.72, 2012

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1 Messages

  • Pierre Vermeersch | 5 décembre 2023 - 15:17 1

    En sa leçon du 9 mars 1976 Lacan déclarait : « L’avantage qui résulte de la façon dont j’ai présenté la chaîne borroméenne, c’est que ça simule la sphère armillaire, comme je l’ai fait remarquer à Dali avec qui je m’en suis entretenu je ne sais plus quand. » [Le Séminaire, L. XXIII, Le sinthome, p. 109]
    Il ne peut s’agir que de l’entretien rapporté par Pamela Tytell entre Dali et Lacan, qui eut lieu à New York en décembre 1975. Ils ne s’étaient vus depuis presque quarante ans. Le psychanalyste et le peintre eurent un échange autour des nœuds borroméens [Roudinesco E., Jacques Lacan- Esquisse d’une vie, histoire d’un système de pensée, Fayard, 1993, p.487].
    Or cette structure de la simulation de la sphère armillaire Lacan l’avait présentée à Columbia University le premier décembre 1975 et le jour suivant au Massachusett Institute of Technology [‘’Conférences et entretiens dans des universités nord-américaines’’, in Scilicet 6/7, le Seuil, 1976]. Elle a en commun avec l’hyper cube, objet de la préoccupation de Dali, l’auto enveloppement (dont on trouve des animations sur le net) qui est le propre du plan projectif arguésien
    Ainsi dans cette leçon du 9 mars 76, Lacan fait la présentation de la prise d’un rond par le jeu des dessus-dessous au croisement de deux droites infinies, légendée ‘’Représentation projective de la chaîne borroméenne’’ [L. XXIII, p.108]. Cette présentation est reprise sous la forme de ‘’La chaîne borroméenne en sphère armillaire’’ [p. 109] ; puis après avoir évoqué le fait qu’il en avait fait part auprès de Dali, il précise : « …Parce que la fausse sphère que je vous ai dessinée là est supportée de cercles, il y a une façon de la manipuler qui consiste à la retourner sur elle-même ».
    Nous retrouvons la disjonction entre les deux espaces sphérique et projectif qui hante le problème du pictural dans la peinture et qui ne put qu’être la condition de l’échange entre Lacan et Dali.

    Voir en ligne : Dali tenant le tessaract (hyper cube)

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