Jouer est un travail de la main. La main de Miles Davis.
Véritable Picasso du jazz, Miles Davis, ce héros, cet « anarchiste chinois », révolté, séducteur, indifférent aux modes — c’est lui qui les crée —, accompagnant-traversant toutes les formes (du be-bop au jazz-rock), ne pouvait que toucher l’oreille de Philippe Sollers. On lira ci-dessous le texte publié en 1994 dans La guerre du goût (il se trouve entre Mozart et Haydn, ce qui, on en conviendra, n’est pas rien).
Jamais texte sur Miles Davis n’a visé aussi juste, dans un style aussi concis. Qui n’y entendrait la trompette de Miles ? Son détachement, son ironie. Et même : « le son qui n’existe pas ».

ZOOM : cliquer sur l’image
Exposition Cent ans de jazz (photo : A.G.)
Différence de Miles Davis


Miles Davis, anarchiste chinois, travaille dans le noir et blanc radical. Il me fait penser à Apollinaire, un soir de demi-brume à Londres ("Je ne chante pas ce monde ni les astres, je chante toutes les possibilités de moi-même hors de ce monde et des astres"). Pas de plainte, ni maître ni esclave, jamais banal. La révolte totale se marque dans l’art des fractions. Je traîne le son pour le rendre à sa rage vraie, je le fais éclater de manière rentrée. Les phénomènes passent, je cherche les lois [1]. Un tel retrait féminin est un comble de virilité qui féminise les mâles à vue d’oeil. Je persiste dans l’engloutissement, je fais signe quand même. S’il le faut, je mettrais en scène l’incroyable mauvais goût de l’époque, juste pour dire, à un moment donné : attention la cour. Jugement tranchant, sans emphase. Si la mort parle, ce doit être, au fond sur ce ton.

Bye bye blackbird, Newport, 1958
Le live dont parle Philippe Sollers
Miles Davis avec John Coltrane
Miles Davis sextet : Miles Davis (trompette), Cannonball Adderley (saxophone alto), John Coltrane (saxophone tenor), Bill Evans (piano), Paul Chambers (contrebasse), Jimmy Cobb (batterie).
En dehors de Bye bye blackbird, les morceaux joués à Newport sont : Ah-leu-cha, Fran-dance, Straight no chaser, The theme, Two bass hit.
Voir en ligne : Le site officiel de Miles Davis
So what ?
« Kind Of Blue », 17 août 1959 on Columbia Records.


Interviews de Miles Davis
1. INTERVIEW, 1982 (VO)
2. Nice (1987)
Plateau en direct de Nice avec Miles Davis, venu participer à la Grande Parade du Jazz. Miles Davis, mâchonnant son chewing-gum, répond aux questions de Jean-Jacques Dufour et Norbert Balit, au sujet des différences entre le public Américain et français, il apprécie les cadeaux qu’on lui a apportés : une toile et un chaise faite de trompettes assemblées. Puis il évoque son prochain disque et explique pourquoi il joue dos au public afin d’avoir une sonorité différente. Durant son interview, il se plaint qu’on ne le laisse pas terminer ses réponses. Entre l’interview du musicien, diffusion d’un reportage de Jean-Jacques Dufour diffusé dans le journal télévisé du 04/11/1986 : extrait d’un concert de Miles Davis accompagné de ses musiciens en alternance avec des images de sa conférence de presse donnée au Palais des congrès ce même jour.
(durée : 8’15")
Miles Davis, Isle of Wight (1970)
Miles Davis - "Call It Anything"
présenté par Keith Jarrett
Artists :
Miles Davis - Trumpet
Gary Bartz - Alto, Soprano saxes
Keith Jarrett - RMI ElectraPiano/organ
Chick Corea - Hohner Electra-Piano
Dave Holland - Bass
Jack DeJohnette - Drums
Airto Moreira - Percussion
La légende dit que lorsqu’on lui a demandé comment s’appelait ce qu’il venait de jouer, il aurait répondu de sa voix brisée, définitivement éraillée, depuis qu’un soir de 1956, deux jours après une opération de la gorge, il hurla sur un type d’une maison de disque et se bousilla définitivement les cordes vocales, Call it anything. Le type qui a posé la question a dû avoir des frissons en entendant cette voix et en sentant le regard de Miles plongé dans ses yeux. Call it anything.
When the legend becomes a fact, print the legend, le nom est resté... la suite ici.
[1] Lautréamont, Poésies II.
5 Messages
[EXCLUSIVITE] Miles Davis à Paris en 1984
Miles Davis au Festival de jazz de Paris le 6 novembre 1984.
1ère partie
2ème partie
Miles Davis (trompette, claviers), John Scofield (guitare), Bob Berg (saxophone), Robert Irving (claviers), Darryl Jones (basse), Al Foster (batterie), Steve Thornton (percussions).
On croyait ce document disparu à jamais. Miles Davis y joue avec le quintet franco-américain qui a enregistré la musique d’"Ascenseur pour l’échafaud" deux jours plus tôt... L’INA a retrouvé ces images.
Flash-back : Miles Davis, artisan et popstar du jazz
L’Ina et Nouvelobs.com s’associent pour vous proposer, chaque semaine, une mise en perspective historique d’un sujet d’actualité. Cette semaine, Miles Davis à l’occasion des célébrations du 20e anniversaire de sa disparition.
nouvelobs.com
A signaler la très belle exposition WE WANT MILES à la Cité de la Musique :
exposition miles davisenvoyé par fluctuat
Exposition où, quand vous en aurez pris plein les yeux et les oreilles, vous pourrez encore écouter et voir, sur grand écran, le dernier concert de Miles, donné le 10 juillet 1991, à La Villette précisément, deux mois avant sa mort.
D’autres extraits du concert sur You Tube