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Sade avec Mozart

Lacoste 2014

D 31 août 2014     A par Albert Gauvin - C 1 messages Version imprimable de cet article Version imprimable    ................... PARTAGER . facebook



Les lecteurs de Pileface n’ignorent pas qu’au mois de mai 1983, Sollers se livra à un exercice jamais renouvelé : donner à lire les textes du marquis de Sade et de divers autres écrivains en faisant écouter la musique de Mozart. C’était la concrétisation d’un projet exposé par S., le narrateur de Femmes :

«  [...] Sade et Mozart... Leur parallélisme... [...] Divin génie ; divin marquis... Cette musique est exactement contemporaine de Juliette... Imagine un peu... L’opéra se déroule en arrière plan... Entre les airs, tout s’arrête et on lit à haute voix des passages de Sade... C’est un de mes rêves... Je crois que ça éclairerait tout... Juliette et les prospérités du vice, livret de Donatien Alphonse de Sade, musique de Wolfang Amadeus Mozart... Ce qui était impensable à l’époque, pourquoi ne pas le réaliser aujourd’hui ?... On aurait dû y penser dix fois... » (Folio, p. 629-630)

Cela donna lieu à une série d’émissions intitulées Mozart avec Sade et programmées à une heure tardive sur France Musique. Je les avais enregistrées dans leur intégralité ce qui m’a permis de les présenter (cf. Mozart avec Sade (I)) et de les mettre en ligne, en exclusivité, avec les textes, il y a quelques années (cf. Mozart avec Sade (II) , etc.). Je vous y renvoie.

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Au château de Lacoste

Le Château de Lacoste.

Le château de Lacoste a appartenu à Sade qui y vécut à plusieurs reprises, de 1769 à 1772, puis en 1777 et 1778, entre divers scandales, procès et emprisonnements (affaire Rose Keller à Arcueil, affaire des pastilles à la cantharide à Marseille). Sade y fit construire un théâtre où il fit donner, non sans succès, de nombreuses représentations (pièces de Voltaire, Destouches, Chamfort, Gresset, Regnard, Sedaine, Le Père de famille de Diderot). « Folles dépenses » dira Mme de Montreuil.

« En mai 1966, Claude Chebel, journaliste de l’ORTF, visite avec André Bouër le propriétaire des lieux, le Château du Marquis de Sade de Lacoste.Le domaine est désormais en ruine mais M. Bouër s’attache à le rénover. Il évoque les différentes étapes de la rénovation ainsi que l’historique des propriétaires du Chateau au long de l’histoire, et la vie de Sade dans ce domaine. » (INA)

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Je me souviens que c’est en juillet 1973 que j’ai découvert les ruines du château de Lacoste. C’était le lieu choisi pour une rencontre, ô combien folklorique et anarchique, des éphémères « Fronts politiques de lutte idéologique » (!). Guy Scarpetta y était avec certains de ses étudiants [1]. On me dit qu’il y est retourné. Moi pas.

Pierre Cardin a acquis le château en 2001. On y donne depuis lors divers spectacles chaque été. Sollers s’en fait l’écho avec une ironie mordante dans Une Vie divine :

En ces temps de sexe raté obligatoire et de vampirisme agressif (invasion des extraterrestres, marée des morts-vivants, antidépresseurs qui poussent au suicide), rien n’est plus satisfaisant que de constater la stabilité du vieux bon sens populaire. Ainsi du village de Lacoste où se dressent les ruines autrefois maudites du château de Sade. On vient de le restaurer, et il sert désormais de lieu d’animation culturelle, théâtre absurde, mauvais concerts.
Le nom de Sade, nous dit la presse, continue de faire peur. Il suffit de parler avec les gens du bourg pour comprendre que le souvenir du marquis dérange toujours. Il y a là 417 habitants, et nous sommes dans une ancienne place forte vaudoise très protestante et plutôt rigoriste (une partie du village a d’ailleurs été rachetée par une école d’art américaine). Quand la clientèle chic de l’été a disparu, la petite bourgade digère plutôt mal d’être mêlée toujours et encore aux turpitudes de son ancien seigneur. Style journalistique : « Nous sommes un village comme les autres, martèle la boulangère. » « Il ne se passe rien ici, ajoute un vieil habitant. »
Cette boulangère qui martèle incarne la raison même. Comme toute femme mariée à travers les siècles, elle occupe le centre de l’univers. Ce n’est plus de mariage qu’il s’agit, mais d’état marial, de mariage, en concurrence directe, et perdue d’avance, avec la Vierge Marie enfouie, comme les Vénus millénaires, dans sa grotte préhistorique. Quant aux mâles, on connaît le programme : ils sont mis en orbite satellitaire, en hors-bites, après avoir été prélevés en substance reproductive.
Sade ? Un produit culturel comme un autre.
(Folio, p. 482-483)
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Lacoste 2014

Sade ? Un produit culturel comme un autre ? Qu’on en juge.


C’est, cette année, le 200ème anniversaire de la mort du marquis de Sade. En juillet, Ève Ruggiéri a eu l’idée de monter un spectacle, Sade et Casanova, les amants du siècle des lumières, avec des grands airs d’opéra de Vivaldi, Haendel et Mozart, et avec, dans le rôle du « divin marquis », Stéphane Freiss [2]. On connaît des fautes de goût plus graves.

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Sade avec Mozart

Dans le cadre de son émission quotidienne, sur Radio Classique, « Ève Ruggiéri raconte » la vie du marquis de Sade (28 et 29 août 2014). Elle a donc choisi, là aussi, de mettre la vie de Sade et certains de ses écrits en parallèle avec des airs de Vivaldi et de Mozart. Certes, les textes les plus subversifs de Sade n’y sont pas lus à l’antenne, mais on peut remercier Ruggiéri, avec son air de ne pas y toucher et la légèreté qui la caractérise, d’avoir donné la parole à Sade à une heure matinale. Cette fois, cela m’a mis de bonne humeur.

Crédit : Radio Classique

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Les amours de Sade

Ève Ruggiéri avait déjà inauguré le festival 2013 avec Les amours de Sade.

Un récit écrit et raconté par Ève Ruggiéri, mis en scène par Gérard Chambre. Pauline Courtin, soprano, Irène Candelier, soprano et Christian Helmer, baryton, accompagnés par l’ensemble Prométhée dirigé par Michel Durand.

Extraits

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[1Philippe Forest parle d’un « séminaire » (!!!) et le date de « 1972 » (« Histoire de Tel Quel », Seuil, p. 418), erreur reprise par Christophe Bourseiller (« Les maoïstes », Points, 2008). J’insiste : c’était en 1973 (1972 : c’était le colloque de Cerisy « Artaud/Bataille »). Avis pour d’éventuelles rééditions !

[2Sade et Casanova, les amants du siècle des lumières :
Distribution : Stéphane Freiss (Marquis de Sade), Nicolas Cavallier (Basse), Laurent Kubla (Baryton), Yuree Jang (Soprano), Ambroisine Bré (Mezzo-soprano), Fabrice Di Falco (Contre-Ténor).
Danseurs : Mehdi Heniche, Rota Tuy
Production : Ève Ruggiéri
Directeur artistique et musical : Pierre-Michel Durand
Orchestre : Ensemble Prométhée
Mise en scène : Yves Coudray.

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1 Messages

  • Albert Gauvin | 2 janvier 2016 - 15:48 1

    Lacoste, le château du Marquis de Sade (France Culture - Le monde insolite - 1ère diffusion : 04/02/1973)
    Visite guidée du château et de l’oeuvre de Sade...