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« J’ai péché, péché dans le plaisir » dit par Golshiftech Farahbbi

D 9 mars 2024     C 0 messages Version imprimable de cette Brève Version imprimable   

ou quand la poésie devient une arme contre le fondamentalisme religieux en Iran

Moment de grâce lors de l’émission « La Grande Librairie » du 6 mars 2024. A l’avant veille de la journée internationale du droit des femmes, l’actrice iranienne Golshiftech Farahbbi, qui a dû fuir son pays en 2008, incarne magnifiquement le poème de sa compatriote Forough Farrokhzad « J’ai péché ».

Des mots brûlants, subversifs d’une poétesse dont la courte vie (elle meurt dans un accident de voiture, à l’âge seulement de 32 ans, en 1967), est à l’image de ses poèmes : irradiante, intense, et solaire. Elle laisse cinq recueils, dont le dernier inachevé. Au total 300 pages, et ces textes nous éblouissent, nous bouleversent, ravagent tout.

Toujours inspirés de sa vie, ces poèmes sont un feu clair, un obus, un éclat obscur, dans l’Iran des années 50. Qu’une femme, une jeune femme de 20 ans, dise l’amour et dise le désir qu’elle peut ressentir pour un homme était à peine imaginable. Une femme, en Iran, doit se taire, se soumettre, et taire ses désirs. Pourtant, Forough dit sa douleur de l’absence physique d’un homme, dit la chaleur de bras qui s’ouvrent, de regards qui s’entrecroisent et brûlent de s’aimer, dit le corps qui réclame le corps de l’autre, et le cherche dans un lit vide. Plus encore, elle dit le plaisir – dans un poème comme « Le Péché »1 – si célèbre et si scandaleux à son époque.

Ainsi, un poème n’est-il pas, pour Farrokzhad, simple épanchement de ses peines, mais lutte politique pour émanciper toutes les femmes de la tutelle des mollahs. Qu’elles disent, enfin, leur plaisir. Qu’elles montrent enfin tout leur désir d’un homme, ou d’un corps. Qu’elles soient leurs égales durant l’amour. Et qu’elles puissent, enfin, trouver une langue qui les exprime. Le vœu de Forough Farrokhzad n’est pas encore réalisé, loin s’en faut. Mais sa voix demeure comme une flamme incandescente, une étoile, un feu de langage, nourri des textes poétiques de ceux qui l’ont précédé : .

Un brasier d’encre, nourri des textes poétiques de Hâfiz. Rûmi. Omar Khayyam qui l’ont précédée, et servi, ici, par la belle Golshiftech FarahbbI.

D’après : Cahier critique de poésie (Christian Travaux)

V.K.

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