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Dante : un appareil à capter l’avenir

Po&sie 177-178. Entretien avec Danièle Robert

D 18 mars 2022     A par Albert Gauvin - C 0 messages Version imprimable de cet article Version imprimable    ................... PARTAGER . facebook


Michel Deguy est mort le 16 février 2022 [1]. Il avait fondé la revue Po&sie en 1977. Le numéro 177-178 dont la publication était annoncée pour septembre 2021, est paru ce 23 février après de multiples reports. Vous pouvez le commander ou vous abonner à la revue [2]. Un important dossier est consacré aux écrits de Dante.

Voici le contenu du numéro.

«  Il s’ouvre par deux hommages : le premier à Philippe Jaccottet (avec des inédits et des contributions de Josée-Flore Tappy, Mathilde Vischer, Fabio Pusterla, et un dessin d’Anne-Marie Jaccottet), le second à Jude Stéfan (avec des contributions de Michel Deguy, Bénédicte Gorillot, Tristan Hordé).

Il se poursuit par un fort dossier de poèmes français (pour plusieurs poètes il s’agira de leur première publication en revue) : Anna Ayanaglou, Bruno Aubert, Régine Borderie, Salah Diab, Alexander Dickow, Gabriel Meshkinfan, Pascal Mora, Antoine Morisod, Daniel Pozner, Jonas Waechter).

Après des proses d’art (Christian Bonnefoi et Laurent Jenny) et des proses théoriques (Francesca Serra et Jeremy Filthuth),

la revue célèbre le sept-centième anniversaire de la mort de Dante.

Elle le fait en proposant une retraduction du Monarchia (suivi d’un texte de Claude Mouchard sur Claude Lefort et Dante [3], en publiant des articles classiques de spécialistes italiens de Dante trop mal connus en France (M. Tavoni, G. Contini), mais aussi de spécialistes français (D. Ottavinani et I. Rosier) et en interrogeant des grands traducteurs qui ont récemment retraduit Dante : René de Ceccatty, Michel Orcel, Danièle Robert. Le dossier se poursuit par des études sur Dante et certains poètes du 20ème siècle (cette partie s’ouvre par le texte de M. Deguy : « Réponses à un questionnaire sur Dante »). On peut également y lire de Yannick Haenel, « "Dante en français", autobiographie d’un lecteur ». »

LE SOMMAIRE pdf

«  Impossible de lire les Chants de Dante, écrit Mandelstam dans son Entretien sur Dante, sans les attirer vers l’époque contemporaine. C’est dans cette intention qu’ils ont été écrits. Ils sont des appareils à capter l’avenir. Ils appellent un commentaire au futur.  »

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Voici l’entretien que Danièle Robert m’a transmis. Qu’elle en soit remerciée.

Entretien avec Danièle Robert

par Martin Rueff

1. Avant d’affronter Dante, vous aviez traduit Paul Auster, Ovide (par deux fois même dans cette revue) et Guido Cavalcanti. Pourriez-vous nous dire comment est né le projet de vous tourner vers la Comédie ? Comment il s’est imposé à vous ? Comment il a mûri en vous ?

Danièle Robert : Lorsque je me suis lancée dans la traduction des Métamorphoses [4], une dizaine d’années avant leur publication en 2001, j’étais déjà dans la fréquentation de la Commedia en tant que lectrice assidue ; l’analogie des destins politiques d’Ovide et de Dante – pour l’un la relégation à vie, pour l’autre l’exil et la condamnation à mort – me parlait tout autant que la dimension universelle de leur œuvre respective et la puissance de leur génie poétique ; s’y ajoutait le rapport étroit qui unit Dante à Ovide dans le poème, presque aussi important que celui qui le lie à Virgile. Mais il ne me paraissait pas encore pensable de m’affronter à la Commedia en prenant en compte chacune des pierres qui composent cette formidable cathédrale : la tâche me semblait insurmontable.
J’ai poursuivi, après les Métamorphoses, mon exploration de la lyrique ovidienne [5] puis entrepris celle de Catulle [6] dont la langue verte, la saveur des charges satiriques et la fougue des accents passionnels m’avaient toujours fascinée, sans savoir que l’approfondissement de son écriture par la traduction me faisait faire un pas de plus vers celle du poème dantesque. Il en a été de même, mais sur un autre registre, lorsque j’ai découvert et traduit en 2009 le premier recueil de poèmes de Michele Tortorici [7], dont le phrasé ample, le contrôle du souffle, la force des images m’ont immédiatement marquée.

Puis est arrivé le projet de traduire l’œuvre poétique de Guido Cavalcanti [8], primo amico de Dante et son aîné de quinze ans, et j’ai été littéralement éblouie à la fois par la virtuosité formelle de ces poèmes réputés extrêmement difficiles, la puissance émotionnelle qui s’en dégage et surtout leur profonde modernité. Les trois sonnets de Dante qui sont inclus dans le corpus cavalcantien – selon un jeu de répons entre poètes tel qu’on le pratiquait au Moyen Âge – m’ont rapprochée encore davantage du Sommo Poeta.

Enfin, j’ai découvert Antonio Prete à travers deux ouvrages : un essai, À l’ombre de l’autre langue [9], et un recueil de nouvelles, L’Ordre animal des choses [10], qui ont enrichi ma réflexion sur le langage et sur l’art de traduire, selon un mode de pensée avec lequel je me sens en profonde affinité. Mais le déclic qui a été déterminant pour que je me lance dans l’aventure dantesque est le dialogue qui s’est instauré lors d’une rencontre organisée par Fortunato Tramuta à la librairie Tour de Babel au cours de laquelle Antonio Prete et moi avons fait une lecture croisée de ma traduction des Rime de Cavalcanti et de sa propre traduction en vers rimés des Fleurs du Mal [11] : là s’entendaient avec évidence, dans la souplesse de l’endecasillabo et le chatoiement des sonorités, les vers d’un Baudelaire devenu soudain Italien sans rien avoir perdu de son identité profonde. Rencontre, au sens le plus fort du terme. À la fin de la soirée, c’est le public franco-italien qui m’a donné le coup d’envoi en me pressant de traduire la Commedia selon les principes que j’avais mis en place pour Cavalcanti, analogues à ceux d’Antonio pour Baudelaire.

2. Pour recourir au lexique d’Antoine Berman, il semble que Dante soit une mise à l’épreuve d’exception des catégories d’analyse de la traductologie (« projet de traduction », « idéal de traduction », « horizon traductif »). Pourriez-vous préciser quelles sont les grandes options qui vous ont guidée ?

Danièle Robert : la traduction est pour moi une expérience vécue de l’intérieur, dans une tension qui s’apparente à l’expérience amoureuse, selon les propres mots d’Antonio Prete [12], et qui voit se confronter deux langues, deux textes, deux personnalités, deux époques, deux cultures, dans un pari audacieux, sorte de joute à la fois exaltante et risquée.
Mes options se résument de façon générale à deux règles que j’ai toujours observées pour chacun de mes projets de traduction, quels que fussent le genre et la nature des textes originaux : le respect absolu de l’intégrité de l’œuvre – ce qui exclut toute suppression ou réduction, ainsi que tout allongement ou ajout abusif : d’un côté comme de l’autre il y en a, et encore très récemment, dans les traductions proposées de la Commedia – et la mise en évidence de sa modernité telle qu’elle est apparue au moment de sa conception, constituant ce que Bruno Pinchard appelle « un laboratoire de l’avenir [13] ».
Dans le cas précis de la Commedia, à laquelle s’applique au plus haut point cette expression, cela s’est concrétisé par l’observation des moyens mis en œuvre par Dante sur les plans structurel, métrique, prosodique, lexical et syntaxique, étant entendu que c’est la forme qui crée le sens et non l’inverse. Dans cet esprit, j’ai donc adopté les principes suivants : une alternance souple de décasyllabes et d’hendécasyllabes afin de rendre perceptible au lecteur la flexibilité du vers italien ; l’adoption de la tierce rime qui scande le poème selon un rythme ternaire destiné à inscrire dans le corps même du texte la foi de Dante en la Trinité, ce qu’il révèle clairement au chant XIV du Paradis : « Ce un et deux et trois qui toujours vit / et toujours règne en trois et deux et un, / non circonscrit et qui tout circonscrit… » ; la prise en compte de la diversité des registres et niveaux de langue qui font la richesse stylistique du poème ainsi que les particularités concernant l’usage des temps de verbes, les expressions dialectales, les tournures syntaxiques et, bien évidemment, les néologismes, le tout inscrit dans un mouvement où la pensée est inséparable du souffle, ainsi que le formule le comédien Nicolas Bouchaud : « Le poème tout entier est contenu dans le souffle de celui qui l’écrit, de celui qui le lit et de celui qui l’écoute [14]. » J’ajoute « de celui qui le traduit » car c’est à mes yeux une tâche essentielle pour le traducteur, celle qui conditionne la possibilité de faire entendre la voix du poète.

3. Depuis la traduction d’André Pézard, les traductions françaises de la Comédie n’ont pas manqué. Pourriez-vous nous dire si vous vous inscrivez en continuité ou en rupture avec cette histoire ?

Danièle Robert : Je peux dire sans hésitation, même si cela peut paraître a priori paradoxal, que je m’inscris à la fois dans la continuité de la stratégie traductive d’André Pézard et de celle de Jacqueline Risset, bien que je n’aie suivi concrètement ni les choix spécifiques de l’un ni ceux de l’autre.

La démarche de Pézard, qui tente de faire résonner dans sa traduction l’écho des textes poétiques médiévaux italiens et français – dont il avait une connaissance intime – pour être au plus près de la langue de Dante est en parfaite cohérence avec son considérable savoir de philologue et son oreille musicale, ce qu’a souligné avec force François Wahl dès 1965 pour répondre aux attaques que Pézard subissait déjà : « La langue de Dante est une langue à l’état naissant. Et c’est cela justement que le texte de Pézard nous fait retrouver. Qui parlera de langue désuète n’y aura rien entendu [15]. »
C’est cette cohérence que j’apprécie ainsi que la radicalité courageuse de la position de Pézard, tout en préférant, pour ce qui me concerne, à la poétique intertextuelle et archaïsante qu’il a mise en place une autre approche qui privilégie la lisibilité, l’accessibilité pour le lecteur d’aujourd’hui au texte de la Commedia ; en cela, je me situerais plutôt du côté de Jacqueline Risset qui a « délié » le texte de ce qui l’avait rendu corseté, touffu, voire étouffant dans ce qu’elle appelait une « solennité paralysante » caractéristique de maintes traductions du passé.
En revanche, sur la question de la rime je suis en désaccord avec l’un et l’autre, comme on peut s’en douter et en dépit de toute l’estime que je leur porte, car leurs points de vue là-dessus ne me semblent pas aussi cohérents que le reste de leur argumentation : Pézard reproche à une traduction respectant la rime « d’introduire dans le texte original des thèmes ou des couleurs à quoi le poète ne songeait nullement » ou encore d’arrêter « l’attention, montant par échos sur elle-même, accrochée en des points saillants comme les degrés d’un interminable escalier [16] » : je ne vois pas bien comment la rime employée avec bonheur par l’auteur d’un poème – en l’occurrence Dante dans la Commedia – pourrait produire de façon générale des effets aussi contraires en français ; et l’on sait que la tierce rime a été mise en pratique à chaque époque par des traducteurs de langue anglaise, russe, espagnole, portugaise, catalane, roumaine, allemande, serbe, hongroise avec des résultats souvent remarquables.

Quant à Jacqueline Risset, sa critique de l’usage de la rime en français n’est pas plus convaincante lorsqu’elle parle de « répétition excessive, perçue comme tout à fait arbitraire », de « mécanicité redondante » alors qu’elle dit à propos de la tierce rime dantesque : « La flèche de la tierce rime ne cesse pas, la surprise emmène le voyageur, le rythme des vers impairs dépayse l’oreille comme un vers libre. C’est là, dans ce mouvement fébrile que Dante est proche, qu’on entend sa voix, et que cette voix nous concerne [17]. » J’entends, pour ma part, dans cette affirmation d’une grande justesse, une véritable incitation, au contraire, à employer la tierce rime dans une traduction qui se donne pour objet de souligner la « vitesse » du poème, selon le terme que Jacqueline chérissait – je parlerais plutôt de sa pulsation. Je suis sûre que nous aurions pu avoir sur ce point un débat certes vif mais dénué de toute acrimonie, empreint au contraire de bienveillance par l’affection qui nous liait. Nous nous entrelisions. Nous étions amies.
C’est donc sur cette question de la rime que je me trouve en rupture avec les traductions qui refusent encore de prendre en compte cet élément essentiel de composition de la Commedia, par conséquent de la pensée de Dante ; car ce que les adversaires de ce choix considèrent comme relevant d’une attitude passéiste, sorte de reconstitution à la Viollet-le-Duc, je le vois au contraire comme une restitution de ce qui a fondé sa modernité [18].
Mais cela ne m’empêche nullement d’admirer les beautés de traductions qui ont suivi d’autres chemins, voire de m’en sentir proche.

4. Tiphaine Samoyault a su montrer récemment que la violence n’était pas absente de la traduction et de son histoire : n’hésitez pas à nous faire part de vos refus car il n’est pas impensable de supposer que vos choix aient été aussi dictés par ces refus. Il n’est pas impensable non plus qu’ils portent la trace de certaines admirations.

Danièle Robert : Il découle de ma précédente réponse que je ne traduis pas contre les traductions qui m’ont précédée ni contre les traducteurs qui ont des options différentes des miennes ; je ne me situe pas dans un rapport de rivalité avec eux. Lorsqu’un musicien aborde une partition comme les Variations Goldberg, il ne fonde pas son interprétation sur le refus de celles de Gustav Leonhardt, de Rosalyn Tureck, de Glenn Gould ou de l’immense Tatiana Nikolayeva (pour ne citer qu’eux) ; au contraire il s’en nourrit, s’en imprègne, s’en enrichit sans pour autant les imiter. Les différents artistes, souvent très éloignés les uns des autres, qui ont donné vie par leur talent à la partition initiale, vont lui permettre de trouver sa voie et de mettre au jour sa relation profonde à l’œuvre ; son interprétation pourra se situer à cent lieues de la leur, elle aura bénéficié de leur existence. De la même façon, la traduction d’une grande œuvre littéraire est une lecture sans cesse renouvelée, à la fois dans le temps, l’espace et à l’intérieur d’une même époque ou d’un même pays, par des individus dont l’histoire personnelle, la culture, la sensibilité, la connaissance intime de la langue étrangère et surtout la maîtrise de leur propre langue constituent le terreau sur lequel se bâtit un nouveau texte, issu du premier : il s’agit d’une « interprétation » de l’œuvre originale au sens musical du terme. Je rejoins en cela Anne Cauquelin pour qui plus une œuvre est grande, plus « les interprétations auxquelles elle donne lieu multiplient la possibilité qu’elle a de durer. […] La capture d’un de ces possibles ne préjuge pas de l’existence d’autres versions. Et si la version choisie n’est pas ou ne reflète pas la “chose” elle-même dans sa totalité, on ne peut pas dire qu’elle soit fausse, ni non plus qu’elle soit vraie [19] ». C’est à cette lucidité à la fois modeste et hardie que se reconnaît un vrai traducteur ; loin de défendre un pré carré illusoire, il s’attache à entrer intimement dans l’univers de l’auteur qu’il traduit et non à lui substituer le sien ; mais il le fait avec les moyens dont il dispose, qui n’appartiennent qu’à lui.

5. Entrons mieux dans votre travail. Pourriez-vous nous faire part d’une solution dont vous êtes satisfaite et nous expliquer la raison de votre satisfaction ? De la même manière pourriez-vous nous indiquer un passage dont vous n’êtes pas satisfaite et nous expliquer pourquoi ?

Danièle Robert : Je prendrai volontiers un extrait du chant XXIII du Paradis (v. 97-111), au moment où Dante voit apparaître, dans le ciel Étoilé, Marie en majesté accompagnée de l’archange Gabriel qui érige autour d’elle une auréole de lumière immédiatement assimilée à un chant mélodieux. Durant cinq terzine, Dante dispose un jeu de rimes en -ira et -iro étroitement entrelacées, qui se poursuit par trois rimes en -ia – l’accent tonique tombant évidemment toujours sur le i –, l’ensemble étant destiné à nous faire saisir par l’oreille la sonorité dominante de ce chant de louange qui psalmodie le nom de Maria. J’ai repris vers à vers, rime à rime, ces sonorités afin que le lecteur attentif goûte en français l’effet produit par le texte italien, ce que je n’aurais certainement pas trouvé spontanément si je n’avais été “contrainte” par la tierce rime qui, chez Dante et beaucoup plus souvent qu’on ne le croit, pousse le traducteur à la créativité dans le respect de la forme qui fait sens.

Quant aux passages dont je n’ai pas été entièrement satisfaite, je les ai revus et corrigés à chaque relecture, même lorsque j’ai repris le poème en vue de sa publication en livre de poche [20] ; les modifications que j’ai faites alors sont d’ordre prosodique exclusivement. On trouve toujours, à chaque relecture, de nouveaux détails à corriger ; c’est inévitable et, sans doute aussi, une manière inconsciente de ne pas totalement se détacher de l’œuvre, devenue si familière au fil du temps. Mais je ne saurais donner un exemple précis de ce que je pourrais appeler un échec car j’assume pleinement ce que je signe aujourd’hui, sans pour autant prétendre à la perfection. Aucune traduction n’est parfaite, ni définitive, on le sait bien.

6. La bibliothèque des commentateurs de Dante est considérable. Pourriez-vous nous indiquer quelques-uns des essais qui vous ont accompagnée ? Marquée ?

Danièle Robert : J’ai effectivement lu un très grand nombre de commentateurs italiens et français, comme en témoigne la bibliographie générale qui clôt ma traduction et, pour certains d’entre eux, il s’est agi d’un compagnonnage régulier beaucoup plus que d’une simple lecture ; ainsi du recueil d’études de Roger Dragonetti réunies sous le titre Dante. La langue et le poème, réflexion fondamentale sur la poésie et la pensée de Dante dont le dernier chapitre intitulé « André Pézard, traducteur de Dante » offre une analyse extrêmement subtile de l’art de celui que Dragonetti nomme poète-traducteur et dont il dit : « La tentative d’André Pézard fut celle d’un poète préoccupé uniquement d’extraire de sa propre langue maternelle des effets musicaux suscités par le modèle [21]. »
J’ai été également très requise par Le Bûcher de Béatrice [22] de Bruno Pinchard, pour ses fulgurances lyriques au sein de l’argumentation ; par Stanze [23] de Giorgio Agamben, pour son analyse de la fantasmologie médiévale et des fondements de la lyrique troubadouresque ; par Il realismo di Dante [24] d’Edoardo Sanguineti, pour l’acuité de ses commentaires à partir d’un chant extrait de chacune des trois cantiche, et qui s’étendent bien au-delà ; par Un’idea di Dante, de Gianfranco Contini, pour son érudition philologique et son art de la mise en relation ; c’est dans cet essai que j’ai découvert une citation de l’Ottimo qui a orienté mes choix lexicaux dans bien des cas – comme par exemple celui de « gauchie » pour smarrita au vers 3 du chant I de l’Enfer au regard des autres occurrences du terme tout au long du poème : « Moi, écrivain, j’ai entendu dire à Dante que jamais la rime ne l’entraînait à dire autre chose que ce qu’il avait l’intention de dire mais que très souvent il faisait dire aux termes à la rime autre chose que ce qu’ils signifient dans le langage courant [25]]. » De même, le commentaire décisif du chant XXVI de l’Enfer par Jean-Louis Poirier, Ne plus ultra [26], a puissamment orienté ma lecture de Dante sur un plan philosophique, en décrivant Ulysse comme l’homme de la transgression et de l’échec, et sorte de double de Dante dans la mise en question de la fiabilité du monde. J’ai enfin été soutenue durant tout mon travail par la lecture de La musica delle parole [27], de Michele Tortorici, par l’originalité de sa réflexion sur le texte poétique et ses audaces interprétatives ; il en a été de même pour À l’ombre de l’autre langue, réflexion majeure d’Antonio Prete sur l’art de traduire.

7. Pourriez-vous suggérer le rôle que vous imaginez pouvoir faire jouer au poème de Dante dans le paysage de la poésie contemporaine ? Certains poètes contemporains ont-ils exercé une influence sur votre traduction ? Traduire Dante a-t-il influencé votre propre écriture poétique ?

Danièle Robert : Restitué à sa forme, en français, le poème de Dante ne peut que faire paraître bien pâle la petite mouvance néoclassique qui prend actuellement des couleurs dans la poésie française contemporaine. Les nouveaux Oronte fleurissent comme colchiques et tout à coup se gargarisent des formes fixes. Mais, quant à une pensée de la forme, on repassera… Ne parlons même pas de ce qui porte la Commedia de bout en bout : la pensée en poème.
La poésie italienne moderne et contemporaine est profondément marquée par l’œuvre de Dante, il va sans dire. Tout comme l’étaient ses grands temps historiques (Foscolo, Leopardi…). Néanmoins, je retiendrai, parmi les poètes qui m’ont confortée dans mes principes de traduction, Pier Paolo Pasolini, notamment pour Le ceneri di Gramsci [28] et Poesia in forma di rosa [29], en raison de l’usage très libre qu’il fait de la tierce rime dans ces recueils [30] ; et, par ailleurs, Edoardo Sanguineti et son magnifique Laborintus II [31]], écrit pour le sept-centième anniversaire de la naissance de Dante [32]. Du reste, les poètes qui composaient, dans les années 1960, le groupe des Novissimi : Nanni Balestrini, Alfredo Giuliani, Elio Pagliarani, Antonio Porta et Sanguineti lui-même, se situaient clairement dans le sillage de la poésie avant-gardiste des stilnovistes – ainsi que de celle des poetæ novi de la Rome antique – et l’une des revues fondées par le groupe 63, dont les Novissimi étaient en quelque sorte le foyer, s’intitulait… Malebolge.
Quant aux poètes français qui ont nourri mon travail par leurs propres engagements de traduction, je citerai en premier lieu Anne-Marie Albiach qui, dans A-9 (première partie) [33], s’attache, d’une maestria douce, au vers rimé adopté par Louis Zukofsky dans le poème par lui créé à partir de la célèbre canzone « doctrinale » de Cavalcanti : « Donna me prega ». (On sait l’importance que ce texte-manifeste a eu pour Dante et pour l’ensemble des stilnovistes.) Cette traduction est de toute beauté (mais aussi : de toute exactitude). Je ne peux me lasser de la lire – souvent à haute voix.
Un autre grand poète-traducteur m’a accompagnée : Jean Pierre Faye. Il est, on le sait, d’abord traducteur de l’allemand : on a en esprit sa splendide anthologie de poèmes de Hölderlin, proposée alors qu’il avait quarante ans [34]. Au cœur de ses rares traductions de l’italien, toutes publiées en revue, il a donné une version saisissante de quelques « Variations belliqueuses » d’Amelia Rosselli [35], que j’ai moi-même traduite en 1991 pour Banana Split. La poésie de Rosselli est très complexe, déchirée, plus qu’énigmatique si souvent, jouant des sauts de sens et des rythmiques avec violence. (On se souvient qu’elle fut très marquée par John Cage.) Elle s’est trouvée sans réserve dans la voix de Faye, qui l’a portée avec une impeccable intelligence du tempo.
Enfin, je dois beaucoup à Yves Bonnefoy qui m’a, sinon influencée – mais j’ai lu et relu « La communauté des traducteurs » [36] –, du moins apporté le soutien de son ouverture d’esprit et de sa généreuse amitié durant les dix dernières années de sa vie, pendant lesquelles nous avons correspondu régulièrement. On connaît ses positions quant à la traduction rimée et notamment pour ce qui concerne la Commedia : elles rejoignaient en tous points celles de Jacqueline Risset, divergeaient donc des miennes. Or, lorsqu’il a reçu mon édition des Rime de Cavalcanti, il m’a dit : « Vous m’avez convaincu ; la poésie est là. » Et il me l’a par la suite confirmé pour l’Enfer, à quelques semaines de son décès. Il est le codédicataire de ma traduction.
Mais ce sont d’abord les musiciens qui, au cours de ces dix années d’écriture, m’ont donné le la : entre autres Bach (comment s’en étonner ?), Sarah Vaughan (pour le portamento), Bill Evans (pour le musaïque, l’harmonie – c’est-à-dire l’essentiel).
À votre toute dernière question, je répondrai non : le fait de traduire Dante n’a pas influencé ma propre écriture poétique dans la mesure où je ne suis poète qu’à travers l’écriture du poète que je traduis, selon une alchimie que définit lumineusement Antonio Prete : « Quiconque traduit poétiquement un poète est, nécessairement, au cours de cette expérience de traduction, lui-même poète, même s’il n’a jamais publié ses propres vers [37]. »

(Propos recueillis par Martin Rueff.)

Le site de la revue Po&sie

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Antonio Prete. Deux livres des passages

Par Danièle Robert

Par une belle coïncidence, les éditions chemin de ronde publient dans leur collection Stilnovo, entièrement consacrée à la littérature italienne, deux livres d’Antonio Prete, « L’Ordre animal des choses » et « A l’ombre de l’autre langue. Pour un art de la traduction », au moment où celui-ci se voit décerner le prestigieux Premio La Ginestra 2013 pour l’ensemble de son œuvre et, plus particulièrement, pour ses travaux sur Leopardi, dont il est aujourd’hui le premier spécialiste.

***

Le premier de ces ouvrages, L’Ordre animal des choses (L’ordine animale delle cose), est un ensemble de récits puisés à la fois aux sources de la mémoire, de l’imaginaire et de la réflexion sur les rapports qui unissent « les animaux et leurs hommes », comme aurait dit Paul Éluard ; rapports d’attirance ou de crainte, de bienveillance ou de cruauté, de domination ou d’empathie, c’est-à-dire induisant les comportements les plus divers et les sentiments les plus complexes. Ce qui lie tous ces textes, c’est le rapport à la langue : à celle qui est propre à chaque être vivant mais aussi à l’autre langue, étrangère voire étrange, qu’il faut apprivoiser, comprendre, s’approprier ou partager.

Dans ces récits où le langage articulé des humains est, par la force des choses, dominant, Antonio Prete donne par moments la parole aux animaux, soit que ceux-ci s’avèrent capables de parler la langue des hommes à force de vivre à leur contact – c’est le cas des chiens –, soit qu’il s’agisse d’êtres dont la nature se situe entre l’humain et l’animal (comme on le verra dans « La Fuite ») ou bien dans un univers imaginaire. Parfois aussi les animaux gardent le silence, privilégiant un autre mode d’expression pour manifester leur présence, ou s’expriment au contraire dans leur propre langue, incompréhensible à l’homme ; certains encore, victimes innocentes d’un ordre qui les nie, n’ont d’autre possibilité que crier leur détresse.

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Antonio Prete

Le lecteur est ainsi entraîné dans un voyage où le rêve côtoie l’observation directe du réel, où les fantasmes de l’enfance sont mêlés à des souvenirs précis ; il suit avec aisance toutes les pistes pour lui tracées, il partage l’enjouement de l’auteur, son émotion, son humour, sa tendresse, et découvre dans ce nouvel ordre des choses qu’on lui présente, étranger seulement en apparence, l’harmonie à laquelle il aspire et la réponse à ses questions pourvu qu’il fasse sienne la réflexion d’Amelio, le « philosophe solitaire » qui étudie la « langue des oiseaux » :

Il y a quelque chose qui passe, indéchiffré, dans la langue des hommes et appartient aussi à la langue des oiseaux. Il y a quelque chose plutôt qui unit toutes les langues des hommes, leur pluralité disséminée, et qui est commune à la langue des oiseaux. C’est le vent qui est dans nos voyelles, le bruissement qui tremble dans les syllabes, le silence qui soutient la phrase, la courbe musicale qui vibre dans l’intonation.

L’Ordre animal des choses est en fait très étroitement lié – quoique sur le mode de la fiction – à l’autre livre d’Antonio Prete que présente la collection « Stilnovo » : les deux ouvrages vivent en écho l’un de l’autre, en parfaite syntonie.

Ce deuxième livre est un essai sur la traduction du texte poétique intitulé À l’ombre de l’autre langue (All’ombra dell’altra lingua) dans lequel l’auteur se situe à l’opposé de toute théorie corsetée, de tout manifeste péremptoire : il expose simplement, dans une langue fluide, élégante, aux multiples résonances, le fruit de lectures et réflexions s’étendant sur plusieurs années et ayant alimenté sa propre pratique du traduire.

Sa position est fondée sur deux données essentielles à ses yeux : la traduction est en soi un acte d’écriture ; la traduction est la meilleure interprétation que l’on puisse donner d’un texte. À la fois création et exégèse, elle possède les vertus d’hospitalité, d’écoute, d’imitation, de musicalité, d’imagination, de capacité à transposer et métamorphoser qui donneront lieu non pas à une pâle copie de la langue originale, non pas à une trahison de son auteur mais à un nouveau texte écrit dans une autre langue – qui a ses propres sons, ses rythmes, ses formes, sa structure – grâce à laquelle le traducteur peut lire, explorer, interroger la première et qui joue le rôle d’une camera oscura comme le souligne Leopardi dans le Zibaldone : « De sorte que l’effet sur notre esprit d’un texte écrit en langue étrangère est semblable à celui des perspectives reproduites et vues à l’intérieur d’une chambre noire, lesquelles ne peuvent être distinctes et correspondre vraiment aux objets et perspectives réels que si la chambre noire est adaptée pour les rendre avec exactitude ; si bien que tout l’effet dépend de la chambre noire plutôt que de l’objet réel. »

L’ouvrage est placé sous la double égide de Leopardi et de Baudelaire, dont Antonio Prete a traduit Les Fleurs du mal, illustrant à la perfection ce qu’il nomme une « esperienza d’amore » comme en témoigne le premier quatrain de « L’albatros » :

Souvent, pour s’amuser, les hommes d’équipage
prennent des albatros, vastes oiseaux des mers,
qui suivent, indolents compagnons de voyage,
le navire glissant sur les gouffres amers.

Spesso, per divertirsi, uomini d’equipaggio
catturano degli albatri, vasti uccelli dei mari,
che seguono, compagni indolenti di viaggio,
il solco della nave sopra gli abissi amari.

L’édition française a tenu à offrir aux lecteurs – et tout particulièrement, même s’il ne s’agit pas à proprement parler d’un ouvrage à caractère universitaire, aux étudiants, chercheurs et enseignants – un véritable outil de travail en adjoignant au texte un appareil de notes qui ne figure pas dans l’édition italienne, ainsi que les originaux des exemples cités par l’auteur.

Danièle Robert, 27 novembre 2013.

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L’Ordre animal des choses, traduit par Danièle Robert, les éditions chemin de ronde, coll. « Stilnovo », 96 pages, 11€ (dist. Vrin).

À l’ombre de l’autre Langue. Pour un art de la traduction, traduit par Danièle Robert, les éditions chemin de ronde, coll. « Stilnovo », 128 pages, 14€ (dist. Vrin). Lecture de Maïca Sanconie.

L’auteur :

Antonio Prete, originaire du Salentin, est professeur émérite de littérature comparée à l’université de Sienne. Spécialiste incontesté de l’œuvre de Leopardi et de celle de Baudelaire, il a collaboré à La storia della letteratura italiana (la célèbre Cecchi-Sapegno) ainsi qu’à de nombreuses revues littéraires tant italiennes (Il piccolo Hans, Il gallo silvestre, dont il est le directeur depuis 1989) que françaises (Europe, Critique, Po&sie…), dans lesquelles il réfléchit notamment sur le langage poétique en relation avec les autres langages et formes du savoir. À ses activités d’essayiste, de traducteur et de théoricien de la traduction s’ajoute une œuvre de poète (Menhir en 2007, Se la pietra fiorisce en 2012) et d’auteur d’ouvrages de fiction (L’imperfezione della luna, en 2000, Trenta gradi all’ombra en 2004, L’ordine animale delle cose, en 2008. Ses deux derniers ouvrages sont Meditazioni sul poetico (Moretti & Vitali, 2013) et Compassione. Storia di un sentimento (Bollati Boringhieri, 2013).

En savoir plus :

Lien : Ad Antonio Prete il Premio « La Ginestra » 2013

La leggerezza dell’elefante : intervista a Antonio Prete.

Julianne VanWagenen, dottoranda in studi italiani a Harvard, intervista Antonio Prete (Università di Siena) sul suo libro « All’ombra dell’altra lingua. Per una poetica della traduzione » (Bollati Boringhieri).

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Danièle Robert sur Pileface

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Autres traducteurs de Dante

VOIR LES EXPLICATIONS DE :

René de Ceccatty, Introduction à la Divine Comédie
René de Ceccatty, Le Banquet de Dante Alighieri (nouvelle traduction)
Michel Orcel : Traduire Dante
Michel Orcel : La Comédie, Genève, 2018-2022
Jean-Charles Vegliante : Itinéraires autour d’un poète
Entretien avec Jean-Charles VeglianteNote de lecture d’Antonio Prete .
Jean-Charles Vegliante : Quelques traces d’un Dante français

VOIR AUSSI :
Dante, Purgatoire, chant XXI : trois traductions (Robert, Risset, Vegliante).
Dante : la Divine Comédie au Cerf (partie 1)
Dante : la Divine Comédie en Pléiade (partie 2)


[2Cf. Po&sie 177-178 et Po&sie.

[4Ovide, Métamorphoses, texte établi, traduit du latin, présenté et annoté par Danièle Robert, édition bilingue, Arles, Actes Sud, coll. « Thesaurus », 2001. [Rééd. : Actes Sud, coll. « Babel », n° 1573, 2018.]

[5Ovide, Écrits érotiques [Amours, Soins du visage féminin, L’Art d’aimer, Remèdes à l’amour], texte établi, traduit du latin, présenté et annoté par Danièle Robert, édition bilingue, Arles, Actes Sud, coll. « Thesaurus », 2003.

[6Catulle, Le Livre de Catulle de Vérone, texte établi, traduit du latin, présenté et annoté par Danièle Robert, édition bilingue, Arles, Actes Sud, coll. « Thesaurus », 2004.

[7Michele Tortorici, La Pensée prise au piège [La mente irretita, 2008], traduit de l’italien et préfacé par Danièle Robert, édition bilingue, Marseille, vagabonde, 2010.

[8Guido Cavalcanti, Rime, traduit de l’italien, préfacé et annoté par Danièle Robert, édition bilingue, Senouillac, vagabonde, 2012.

[9Antonio Prete, À l’ombre de l’autre langue. Pour un art de la traduction [All’ombra dell’altra lingua, 2011], traduit de l’italien par Danièle Robert, Cadenet, les éditions chemin de ronde, coll. « Stilnovo », 2013. Cf. Entretien avec Danièle Robert.

[10Antonio Prete, L’Ordre animal des choses [L’ordine animale delle cose, 2008], traduit de l’italien par Danièle Robert, Cadenet, les éditions chemin de ronde, coll. « Stilnovo », 2013.

[11Charles Baudelaire, I fiori del male [Les Fleurs du mal, 1861], traduzione dal francese e cura di Antonio Prete, Milano, Feltrinelli, 2003.

[12Antonio Prete, À l’ombre de l’autre langue, op. cit., p. 9.

[13Bruno Pinchard, Le Bûcher de Béatrice. Essai sur Dante, Paris, Aubier, coll « Philosophie », 1996, p. 211.

[14Nicolas Bouchaud, Sauver le moment, préface et notes de Véronique Timsit, postface de Georges Banu, Arles, Actes Sud, coll « Le Temps du théâtre », 2021, p. 157.

[15François Wahl, « Comment retrouver Dante », Le Nouvel Observateur (Paris), 12 janvier 1966, p. 28.

[16André Pézard, « Avertissement », in Dante, Œuvres complètes, Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », n° 182, 1965, p. XX-XXI.

[17Jacqueline Risset, « Traduire Dante », in Dante, La Comédie. L’Enfer, traduit de l’italien, préfacé et annoté par Jacqueline Risset, édition bilingue, Paris, Flammarion, 1985, p. 22.

[18S’il s’agissait de parler de reconstitution, il faudrait plutôt aller voir du côté de la traduction de L’Enfer qu’a donnée, en ancien français et en décasyllabes rimés, terzine et tierces rimes respectées, Émile Littré (Hachette, 1879 ; non pas, donc, une « œuvre de jeunesse » mais, au contraire, le dernier travail original publié par le lexicographe). Encore que ceci puisse donner lieu à discussion (cf. Alain Corbellari, « Le dantesque à l’épreuve de la rétroversion. La traduction en ancien français de L’Enfer par Littré », in Giuseppe Sangirardi et Jean-Marie Fritz (dirs.), Dantesque. Sur les traces du modèle, Paris, Classiques Garnier, coll. « Rencontres », série « Civilisation médiévale », n° 35, 2019, p. 17-28).

[19Anne Cauquelin, Les Machines dans la tête, Paris, Presses universitaires de France, 2015, p. 62 et 63.

[20Dante Alighieri, La Divine Comédie, traduction, préface, notes et bibliographie de Danièle Robert, Arles, Actes Sud, coll. « Babel », n° 1734, 2021.

[21Roger Dragonetti, Dante. La langue et le poème, études réunies et présentées par Christopher Lucken, Paris, Librairie classique Eugène Belin, coll. « Littérature et politique », 2006.

[22Bruno Pinchard, op. cit.

[23Giorgio Agamben, Stanze. Parole et fantasme dans la culture occidentale [Stanze. La parola e il fantasma nella cultura occidentale, 1977], traduit de l’italien par Yves Hersant, Paris, Christian Bourgois Éditeur, série « Énonciations », 1981. LIRE ICI .

[24Edoardo Sanguineti, Il realismo di Dante, Firenze, Sansoni, coll. « Nuova Biblioteca », 1980. [Editio princeps : 1966.].

[25Gianfranco Contini, Un’idea di Dante. Saggi danteschi, Torino, Giulio Einaudi editore, coll. « Piccola Biblioteca Einaudi », n° 275, 1976. [Editio princeps : 1970.

[26Jean-Louis Poirier, Ne plus ultra. Dante et le dernier voyage d’Ulysse, préface de Vincent Carraud, Paris, Les Belles Lettres/essais, 2016.

[27Michele Tortorici, La musica delle parole. Come leggere il testo poetico, Roma, Anicia, coll. « Teoria e storia dell’educazione », 2016.

[28Pier Paolo Pasolini, Le ceneri di Gramsci, Milano, Garzanti, 1957.

[29Pier Paolo Pasolini, Poesia in forma di rosa, Milano, Garzanti, 1964.

[30Je me permets de renvoyer, sur ce point et d’autres questions techniques, à « On dévore un enfer neuf », l’entretien que j’ai réalisé avec Liliane Giraudon pour Poezibao [mis en ligne le lundi 30 mai 2016].

[31Edoardo Sanguineti, Laborintus II [1965], traduit de l’italien et postfacé par Vincent Barras, édition bilingue, L’Ours Blanc (Genève), n° 6, printemps 2015, p. 2-33. [Editio princeps – texte original seul : Manteia (Marseille), n°14-15, 1972, p. 14-28.

[32Laborintus II est une composition de Luciano Berio de trente-cinq minutes et de moyen format : quatre voix, seize instruments, chœur parlé à huit voix et bande magnétique. Écrite de 1963 à 1965, il s’agit d’une commande de l’ORTF pour le septième centenaire de la naissance de Dante. Une première version du texte de Sanguineti – qui fut le récitant de l’œuvre – en constitue le livret.

[33Louis Zukofsky, « A » 9 (première partie), traduit de l’anglais (États-Unis) par Anne-Marie Albiach, Marseille, Éric Pesty Éditeur, 2011. (La traduction d’Anne-Marie Albiach a été publiée pour la première fois – il y en aura quatre publications – au printemps de 1970 dans le dernier numéro, n° 12, de Siècle à mains, revue qu’elle dirigea à Londres (puis à Neuilly) avec Michel Couturier et Claude Royet-Journoud. La republication de la traduction (cette fois bilingue) dans Argile (n° XIII-XIV, printemps-été 1977, p. 122-131) est précédée d’un texte extrêmement important d’Anne-Marie Albiach : « Contrepoint » (p. 117-121). Il s’agit, là aussi, d’un manifeste (indirect). Si je puis dire, d’un manifeste traductif – de l’intelligence traductive.

[34Friedrich Hölderlin, Poèmes, traduits de l’allemand par Jean Pierre Faye, édition bilingue, Paris, Guy Lévis Mano, 1965.

[35Amelia Rosselli, « Variations belliqueuses », traduit de l’italien par Jean Pierre Faye, Change (Paris), n° 39 (“L’Italie changée”), mars 1980, p. 135-145. (Variazioni belliche a été publié dans son intégralité en 1964 chez Garzanti.)

[36Yves Bonnefoy, « La communauté des traducteurs » [1999], in L’Autre Langue à portée de voix. Essais sur la traduction de la poésie, Paris, Éditions du Seuil, coll. « La Librairie du XXIe siècle », 2013, p. 307-326. Au cœur de ce texte, p. 312 : « […] traduire pourra être considéré non plus comme une tâche ancillaire, aux marges de la véritable invention, mais, presque, comme l’activité primordiale de la pensée au travail. »

[37À l’ombre de l’autre langue, op. cit., p. 31.

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