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Julia Kristeva au cœur du prochain séminaire de Normale Sup. Thème :Intertextualité et influence

D 16 octobre 2020     A par Viktor Kirtov - C 0 messages Version imprimable de cet article Version imprimable    ................... PARTAGER . facebook


L’intertextualité, une vieille lune des années 1960, apportée dans ses bagages par une jeune étudiante bulgare Julia Kristeva ? Non, toujours d’actualité puisqu’elle est le thème du prochain séminaire de la prestigieuse ENS Paris. De quoi donner le sourire à Julia Kristeva !

Paris, 29 rue d’Ulm

Vendredi 23 octobre, salle Paul Langevin, 29 rue d’Ulm, de 15h à 18h.

Dans le cadre de la première séance du Séminaire littéraire des Armes de la critique, séminaire qui entend approcher les phénomènes littéraires et culturels d’un point de vue matérialiste, c’est-à-dire en les réinscrivant dans le contexte historique, économique et sociologique de leur production, nous nous intéresserons aux notions littéraires d’intertextualité et d’influence.

Dans leur ouvrage consacré au Sujet lecteur, Annie Rouxel et Gérard Langlade critiquaient la « conception autoréférencée de la littérature » conduisant à une « utilisation à la fois réductrice et systématique de la notion d’intertextualité » : « La littérature parle en priorité de la littérature et lire une œuvre consiste avant tout à installer celle-ci dans un réseau de références intertextuelles 1. » Mais une autre utilisation de l’intertextualité est-elle possible ? Cela ne va pas de soi, l’intertextualité pouvant être considérée comme l’une des bêtes noires d’une conception externaliste du fait littéraire, précisément désireuse de « ne pas regarder les textes comme des systèmes clos ni comme des réseaux d’intertextes 2 ».

Cette immanence textuelle est inhérente à la première définition de l’intertextualité que propose Julia Kristeva dès les années 1960. En effet, le terme apparaît d’abord sous sa plume pour désigner le « croisement dans un texte d’énoncés pris à d’autres textes 3 ». Chaque mot compte : l’idée de croisement renvoie au dialogisme bakhtinien tel qu’il avait été développé en 1929 dansProblèmes de la poétique de Dostoïevski,avec néanmoins une extension de sens notable, puisque le dialogisme bakhtinien ne concernait en aucun cas tous les textes, comme ce sera le cas chez Kristeva 4. Quant au terme detexte, il doit être entendu comme un « système de signes » englobant, comme le rappelle Laurent Jenny, « œuvres littéraires, langages oraux, systèmes symboliques sociaux ou inconscients5 ». Le pouvoir de la notion telle qu’elle a été définie par Kristeva était donc d’étudier des objets qui transcendaient le texte tout en respectant l’exigence d’immanence textuelle du groupe Tel Quel6.

Or cette clôture du texte propre à l’intertextualité ne peut se comprendre qu’en opposition à d’autres approches littéraires, comme lacritique des sourcesou l’influence. Ce sont bien à ces dernières que Roland Barthes, en 1973, oppose sa définition de l’intertexte : « L’intertexte, condition de tout texte, quel qu’il soit, ne se réduit évidemment pas à un problème de sources ou d’influences ; l’intertexte est un champ général de formules anonymes, dont l’origine est rarement repérable, de citations inconscientes ou automatiques, données sans guillemets7. » En d’autres termes, l’intertextualité conteste l’influence en ce qu’elle n’a nul besoin de « prouver le contact entre l’auteur et ses prédécesseurs8 ». Au modèle de la « dérivation philologique » s’est donc substitué celui de la « ressemblance structurale9 », attentive au rapport de texte-à-texte et, plus précisément, à la transformation par le texte de son intertexte (là où l’influence s’intéressait davantage au « trajet de la source au point d’arrivée »

Programme de la séance

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1) Esther Demoulin (Sorbonne Université), « À quelles conditions une conception matérialiste de la notion d’ intertextualité est-elle possible ? »

Nous proposerons dans un premier temps un panorama des différentes définitions données par la critique à la notion d’intertextualité, de Séméiotikè (1969) de Julia Kristeva à Palimpsestes (1982) de Gérard Genette. Si l’on peut convenir, avec Jean-Michel Adam, qu’« [o]n ne compte plus les synthèses qui retracent l’origine et le devenir du concept d’intertextualité11 », reste que ces synthèses s’arrêtent souvent aux années 1980, et il s’agira également d’interroger les usages contemporains de la notion chez des critiques aussi divers que Rainer Rocchi ou Valérie Buchelli12. Dans un deuxième temps, nous nous attarderons sur les quelques applications matérialistes qui ont pu être proposées de l’intertextualité – ce sera alors l’occasion d’aborder les travaux de Pierre V. Zima et de Marc Angenot13, notamment. Enfin, dans un troisième et dernier temps, nous tenterons de suggérer quelques modifications à apporter à la définition de cette notion-phare pour son utilisation dans une étude de l’œuvre littéraire qui prendrait en considération son contexte de production.

Le programme complet, ICI

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Dialogue et intertextualité dans l’essai de Kristeva sur Dostoiëvski

Parmi les lectures sédimentées que traverse le livre, il y en eut une plus féconde que les autres, qui suivit la découverte de l’ouvrage de Mikhaïl Bakhtine, La Poétique de Dostoïevski (Seuil, 1970). L’écrivain et critique russe repérait chez l’auteur des Frères Karamazov une logique profonde : celle du « dialogue ». Le mot fait événement pour Julia Kristeva, alors étudiante en philologie et littérature comparée. Elle quitte la Bulgarie pour la France, emportant pour tout bagage son exemplaire du Bakhtine « et 5dollars ». Dans un coin de sa tête, il y a l’idée qui donnera naissance à la notion d’intertextualité dans son premier livre, Sémeiotiké. Recherche sur une sémanalyse (Seuil, 1969) : appliquer l’analyse du dialogisme bakhtinien à l’échelle du texte lui-même. Autrement dit : considérer que l’on ne peut écrire ou lire un texte sans les textes avec lesquels il dialogue, même très indirectement.

Elle prend encore l’exemple de Dostoïevski. « Ses romans répondent au roman européen, qui lui-même répond à la satire ménippéenne, qu’on peut définir comme la forme littéraire de l’incertitude, parce qu’on y entend en même temps l’énoncé et son autre. » Dans cette forme utilisée dans l’Antiquité par Lucien de Samosate et dont on trouve des résurgences dans toute la littérature moderne, on n’affirme une chose que pour immédiatement engager le lecteur à examiner son contraire. Se trouve alors mis en abyme, « dans les textes », le dialogue qui a lieu « entre les textes ». Et ce dialogue omniprésent et perpétuel (« qui n’est pas un moyen, mais “le” but », écrit Kristeva en conclusion de sa préface) est le lieu où réside la beauté de l’œuvre littéraire.

PLUS ICI dans « Dostoïesvski : Portes dans le multivers de Julia Kristeva »

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L’intertextualité aussi évoquée par Jean Ricardou, membre du groupe Tel Quel

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Le nouveau roman a pour autre particularité de s’inscrire dans une fiction plus vaste, dans laquelle la plupart des écrivains veulent s’insérer. Son rapport intratextuel suppose des rapports intertextuels. Des liens avec des textes déjà écrits, du même auteur, ou non, explique Jean Ricardou, qui prend pour exemple La Mise en scène, de Claude Ollier, où se lisent certaines allusions très nettes à des romans de Flaubert : "On aurait là une espèce de fiction générale où tout le monde puiserait des éléments et où chacun arriverait à faire de nouveaux rapports."

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"On a désormais une notion nouvelle, où il y a en somme une expansion de la fiction.( …) On peut peut-être grouper plusieurs livres pour en faire des fictions plus importantes, ou introduire certains éléments d’autres fictions pour comprendre les éléments peu compréhensibles ou inaperçus d’une fiction nouvelle."

PLUS Sur Jean Ricardou, théoricien du Nouveau Roman

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Keren Mock Gitaï, psychologue clinicienne, philosophe et traductrice.

Comme pour Julia Kristeva, sa langue maternelle n’est pas le français. Pour elle, c’est l’hébreu. Sa thèse, intitulée « La genèse intertextuelle de l’hébreu moderne : Réinvention d’une langue maternelle », a été dirigée par Julia Kristeva.

PLUS ICI
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Différentes approches de l’intertextualité

On date l’apparition du terme « intertextualité » de 1967. Les pionniers de l’intertextualité que sont Mikhaïl Bakhtine, Julia Kristeva, Laurent Jenny, Michael Riffaterre et Gérard Genette, sont des théoriciens venus d’horizons très divers. Dès sa naissance, le dialogisme défini par Bakhtine est constitué de deux facettes. Il est, d’une part, inhérent à l’écriture : tout énoncé, par sa dimension linguistique, renvoie à d’autres textes. Un énoncé ne peut pas ne pas être intertextuel. Tout mot a déjà servi. D’autre part, il appartient à telle ou telle esthétique, et procède, dans la Satire Ménippée ou dans le roman, d’un choix formel. Cette bivalence ne trouve pas vraiment de résolution chez les successeurs de Bakhtine. En 1969, J.Kristeva pose les fondements de l’intertextualité : « le mot (le texte) est un croisement de mots (de textes) où on lit au moins un autre mot (texte) » [1] Avec l’article de L.Jenny publié dans Poétique en 1976 [2], et qui fait date, on s’éloigne un peu plus du champ de la philosophie pour entrer véritablement dans la pratique textuelle. L.Jenny propose ainsi un modèle d’interprétation poétique de l’intertextualité. M.Riffaterre explore depuis la fin des années 70 sa théorie de l’intertextualité, dans le cadre d’une théorie de la réception. Enfin, dans son livre paru en 1982, Palimpsestes [3], G.Genette s’attache avec exhaustivité à étudier tous les faits d’intertextualité, qu’il a rebaptisée du nom plus large de transtextualité. La poétique, selon lui, ne doit pas se borner au texte, mais étudier la transtextualité.

Crédit : journals.openedition.org/


[1https://journals.openedition.org/na... Semeiotikè, recherches pour une sémanalyse, Paris, Seuil, 1969, p.145.

[2https://journals.openedition.org/na...« La stratégie de la forme », Poétique n°27, 1976, p. 257-281.

[3https://journals.openedition.org/na... Palimpsestes, la littérature au second degré, Seuil, 1982.

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