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Julia Kristeva : Dostoïevski, l’écrivain de sa vie

Le Temps des écrivains par Christophe Ono-dit-Biot

D 22 mars 2020     A par Albert Gauvin - C 3 messages Version imprimable de cet article Version imprimable    ................... PARTAGER . facebook


Une rencontre, et ses conséquences, entre le prince de la noirceur romanesque et une jeune bulgare devenue écrivain.

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Julia Kristeva. Crédits : Christophe Ono Dit Biot

"La foi existe pour Dostoïevski mais sans s’incliner, sans en faire un culte. Continuons de réfléchir et d’en faire des romans." Julia Kristeva.

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Cette semaine dans Le Temps des écrivains, une rencontre au sommet entre Julia Kristeva et Fiodor Dostoïevski. Une rencontre qui n’allait pas de soi, son père, dont c’était l’auteur préféré, ayant déconseillé à sa fille de le lire pour ne pas troubler l’esprit cartésien qu’elle devait, selon lui, acquérir pour sortir de « l’intestin de l’enfer », comme il surnommait la Bulgarie. « Destructeur, démoniaque et collant, trop c’est trop, tu n’aimeras pas du tout, laisse tomber ! », lui disait-il. Et pourtant, la rencontre a eu lieu, et quelle rencontre ! Elle fait aujourd’hui l’objet d’un livre, au titre simple, mais efficace, puisqu’il s’agit de « Dostoïevski », tout simplement, publié chez Buchet Chastel dans la collection « Les auteurs de ma vie ».

"Les corps chez Dostoïevski ne sont pas dessinés. Ils sont à l’unisson avec un paysage brumeux ou nuageux. Sa vision consiste à dissoudre les apparences et à entrer dans la chair des mots." Julia Kristeva.

Julia Kristeva est l’une nos plus grandes théoriciennes de la littérature. Née en Bulgarie en 1941, elle vit en France depuis 1966 et elle a publié plus d’une trentaine de livres, salués dans le monde entier. Elle est aussi linguiste, psychanalyste, professeur émérite à l’université de Paris 7 Diderot, professeur honoris causa de nombreuses universités aux Etats-Unis, au Canada et en Europe, où elle enseigne régulièrement. Lauréate de nombreux prix (le prix Holberg en 2004, le prix Hannah Arendt en 2006, le prix Vaclav Havel en 2008), elle a signé des essais où la littérature tient une place cruciale (comme « La Révolution du langage poétique. L’avant-garde à la fin du XIXe siècle », sur Lautréamont et Mallarmé, « Le Temps sensible. Proust et l’expérience littéraire », « Le Génie féminin », sur Hannah Arendt, Melanie Klein et Colette, ou encore « Beauvoir présente ») mais aussi des romans tels que « Le Vieil Homme et les loups », « Possessions », ou « Meurtre à Byzance ».

En ces temps de confinement, 1 h avec #Dostoievski est une option enrichissante. Surtout vu par Julia Kristeva et incarné par la Nastassia Filippovna de « L’Idiot », "une féministe en herbe qui s’ignore" dans un "pressentiment de #metoo" — Ch. Ono-dit-Biot (@C_Ono_dit_Biot)

Abjection et sainteté

A cette longue liste, elle ajoute donc aujourd’hui ce « Dostoïevski », composé d’un essaie et d’une anthologie qui commence par ces mots sur l’auteur de « L’idiot », des « frères Karamazov », ou de « crime et châtiment » : « Épris d’absolu et explorateur clinique dans le "sous-sol" des passions humaines, en proie à l’angoisse de mort et à la quête infinie de sens, sur le fil du crime et du sublime, de l’abjection et de la sainteté, Dostoïevski (1821-1881) hante la conscience européenne et mondiale depuis un siècle et demi.  »

Nastassia, « féministe en herbe »

« Hante » ? Y circulerait donc comme un fantôme ? Mais pour nous dire quoi, aujourd’hui ? Dans ce « Temps des écrivains », Julia Kristeva évoque la formidable actualité de Dostoïevski et de ses héros et héroïnes, dont la Nastassia Filippovna de « L’Idiot ». « Elle se dresse d’abord comme une féministe en herbe qui s’ignore », dit Kristeva, « contre Totski, son vicieux bienfaiteur, cet homme envers lequel elle nourrit une répulsion inhumaine ». Mais aussi du style tout en sfumato, entre boue et neige mouillée de Dostoïevski, de l’art du roman, aussi, et de ce qu’est, enfin, une vraie rencontre entre eux auteurs qui auraient pu ne jamais se rencontrer…

"La lecture de Dostoïevski permet d’entrer dans les plis de la société qui viole" — Ch. Ono-dit-Biot (@C_Ono_dit_Biot)

Les choix musicaux de Julia Kristeva :

Anton Webern. "Das Augenlicht". Orchestre symphonique de Londres. Direction P.Boulez choeur John Alldis.
Ella Fitzgerald. "Blue Skies."
Vivaldi. "Griselda". "Agitata da due venti". Cecilia Bartoli.

LIRE : Dostoïesvski : Portes dans le multivers de Julia Kristeva

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3 Messages

  • Albert Gauvin | 19 décembre 2020 - 23:20 1

    Entretien avec Julia Kristeva

    La Revue Française de Psychanalyse, décembre 2020.

    Rfp : Julia Kristeva, vous publiez dans la collection « Les auteurs de ma vie », chez Buchet Chastel, un Dostoïevski. Le principe de cette collection consiste à proposer un choix de textes de l’auteur précédé d’une introduction consistante (70 p.). Pourquoi le choix de ce « géant russe » dont votre père vous déconseillait la lecture ? Au-delà de la curiosité qui ne pouvait qu’être sollicitée, comment la jeune Bulgare puis l’étudiante en philologie française a-t-elle « plongé » dans « Dosto » au point d’en faire « l’auteur de [sa] vie » ? LIRE ICI.


  • Albert Gauvin | 23 juin 2020 - 09:57 2

    Chère Julia,

    « Je me voyage », le témoin de notre navigation autour des grands continents de vos mémoires, est paru en 2016. Il vous fallait poursuivre seule cette odyssée que vous m’aviez offerte de partager à vos côtés pour la raconter. [...]
    Enfin, il prend toute la place, toute la page, « Dostoïevski », sans sous-titre, écrit en lettres capitales, rouges sur une couverture blanche, publié le 5 mars, dans un monde replié, « souterrain » diriez-vous avec le génie russe. LIRE ICI.


  • Albert Gauvin | 27 avril 2020 - 19:09 3

    De l’expérience intérieure comme approbation de la vie jusque dans la mort : une brèche dans le confinement avec Dostoïevski

    LA PERSONNALITÉ DE LA SEMAINE par Patricia Martin, France inter, 26 avril 2020, Julia Kristeva. VOIR ICI.