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Giacometti. Le jamais vu.

D 6 novembre 2007     C 0 messages Version imprimable de cette Brève Version imprimable   

De passage dans une "grande librairie", je trouve, un peu par hasard, le petit livre (60 pages) de Marcelin Pleynet Giacometti. Le jamais vu, entre d’épais volumes consacrés à l’artiste.

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Giacometti. Femme-cuillère (1926-1927)

Bataille. J’ai déjà eu l’occasion de signaler l’importance qu’avait eu la revue Documents créée par Georges Bataille en 1929 pour des peintres comme Picasso ou Bacon (cf. Crucifixions ou Bataille avant la guerre).
Concernant Giacometti et son "rapprochement" avec le surréalisme (" le malentendu "), Pleynet écrit : " Mais ce sont, n’en doutons pas, ses rencontres avec Michel Leiris et, plus particulièrement, avec Georges Bataille fondant et publiant, en 1929, la revue Documents, qui sont déterminantes. "
L’influence fut-elle réciproque ? Pleynet pose la question. " Georges Bataille a-t-il vu l’oeil de la  Femme-cuillère lorsqu’en 1927 il élabore l’image de L’oeil pinéal (embryon d’oeil, organe photosensible, situé au sommet du crâne) et entreprend d’écrire Histoire de l’oeil ? Faut-il rappeler que la revue Documents, que Georges Bataille publie l’année où Giacometti le rencontre, a pour sous-titre "Doctrine, Archéologie, Beaux-Arts, Ethnographie", et que le premier article que Michel Leiris écrit sur l’oeuvre de Giacometti paraît dans le numéro 4 de la revue ?
Qu’en est-il de la rencontre entre le sculpteur de la Femme-cuillère et l’auteur de l’Histoire de l’oeil ? Qu’en est-il des violences sexuelles qu’illustrent certaines pièces réalisées par Giacometti entre 1929 et 1932, comme Homme et Femme (1928-1929), Objet désagrable (1931), ou Femme égorgé (1932), et de l’intolérance de Breton qui traite Bataille "d’obsédé" ?
[...] Georges Bataille et Giacometti resteront liés. En 1947, Giacometti réalisera un certain nombre d’eaux-fortes pour accompagner la publication de lHistoire de rats de Georges Bataille. "

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Giacometti. Le chariot (1950)

Parménide. En 1938, Giacometti est hospitalisé à l’hôpital Bichat. Il est " émerveillé par le chariot de la pharmacie " à tel point qu’il dira qu’en 1947 il avait vu la "sculpture comme faite devant " lui et qu’il lui sera, en 1950, " impossible de ne pas la réaliser ", déclarant : " Ce n’est pas le seul motif qui m’a poussé à faire cette sculpture. " Marcelin Pleynet ajoute :
" Considérant Le chariot  et "l’émerveillement" qui lui donne naissance, je ne peux qu’évoquer le début du grand Poème de Parménide : " Les cavales qui m’emportent me conduisaient aussi loin que puisse parvenir mon désir, lorsqu’elles vinrent et m’amenèrent sur la voie, riche en paroles, de la divinité, voie qui mène l’homme qui sait. C’est par là que j’étais porté ; car c’est par là que les cavales en leur sagesse m’emportaient, tirant le char, alors que les jeunes filles montraient la voie. L’essieu en s’mbrasant dans les moyeux, faisait jaillir de l’écrou un son flûté, car il était pressé par les deux roues tourbillonnant de chaque côté. "BR>
Giacometti a-t-il lu le Poème de Parménide ? A-t-il lu ceux que l’on dit les "Présocratiques" ? On sait qu’il a lu Héraclite qu’il cite dans un de ses Carnets autour de 1934 : " Aller plus loin, tout recommencer, sculpture, dessins, écrire. Activité indépendante abslolument : Poésie. Poésie-Héraclite-Hegel- On descend et on ne descend pas deux fois le même fleuve. "
Qu’il ait lu ou qu’il n’ait pas lu le Poème de Parménide, ce dont on ne peut douter, c’est qu’il ait fait l’expérience sculpturale de ce qui s’y donne à penser : " Il faut dire ceci et penser ceci : l’être est ; car il est possible d’être, et il n’est pas possible que soit ce qui n’est rien. Voilà ce que je t’enjoins de méditer. " Ou, non moins logiquement, hors des limites de l’opinion, " l’être est, le non-être n’est pas. "

A.G.