Sur et autour de Sollers
vous etes ici : Accueil » NOTES » Lacan – Le désir et son interprétation – texte établi par J.-A. (...) par : PileFace.com
  • > NOTES

Lacan – Le désir et son interprétation – texte établi par J.-A. Miller

D 10 juillet 2013     C 0 messages Version imprimable de cette Brève Version imprimable   

JPEG - 39.1 ko
Couverture : Allégorie avec Vénus et Cupidon
Bronzino (v. 1545).
"Jadis, je m’imaginais que la couverture du Séminaire VI serait illustrée de l’Ophélie de Millais. Au pied du mur, j’ai calé. Comme illustration du désir, on peut mieux faire. J’ai préféré le corps sinueux, lumineux, de la Vénus de Bronzino, au milieu de figures énigmatiques dont le secret n’a pas été parfaitement percé. Lacan, aimait ce tableau." (JAM)

Que montre Lacan ? Que le désir n’est pas une fonction biologique ; qu’il n’est pas coordonné à un objet naturel ; que son objet est fantasmatique. De ce fait, le désir est extravagant. Il est insaisissable à qui veut le maîtriser. Il vous joue des tours. Mais aussi, s’il n’est pas reconnu, il fabrique du symptôme. Dans une analyse, il s’agit d’interpréter, c’est-à-dire de lire dans le symptôme le message de désir qu’il recèle.

Si le désir déroute, il suscite en contrepartie l’invention d’artifices jouant le rôle de boussole. Une espèce animale a sa boussole naturelle, qui est unique. Dans l’espèce humaine, les boussoles sont multiples : ce sont des montages signifiants, des discours. Ils disent ce qu’il faut faire : comment penser, comment jouir, comment se reproduire. Cependant, le fantasme de chacun demeure irréductible aux idéaux communs.

Jusqu’à une époque récente, nos boussoles, si diverses qu’elles soient, indiquaient toutes le même nord : le Père. On croyait le patriarcat un invariant anthropologique. Son déclin s’est accéléré avec l’égalité des conditions, la montée en puissance du capitalisme, la domination de la technique. Nous sommes en phase de sortie de l’âge du Père.

Un autre discours est en voie de supplanter l’ancien. L’innovation à la place de la tradition. Plutôt que la hiérarchie, le réseau. L’attrait de l’avenir l’emporte sur le poids du passé. Le féminin prend le pas sur le viril. Là où c’était un ordre immuable, des flux transformationnels repoussent incessamment toute limite.

Freud est de l’âge du Père. Il a beaucoup fait pour le sauver. L’Église a fini par s’en apercevoir. Lacan a suivi la voie frayée par Freud, mais elle l’a conduit à poser que le Père est un symptôme. Il le montre ici sur l’exemple d’Hamlet.

Ce que l’on a retenu de Lacan - la formalisation de l’OEdipe, l’accent mis sur le Nom-du-Père - n’était que son point de départ. Le Séminaire VI déjà le remanie : l’OEdipe n’est pas la solution unique du désir, c’est seulement sa forme normalisée ; celle-ci est pathogène ; elle n’épuise pas le destin du désir. D’où l’éloge de la perversion qui termine le volume. Lacan lui donne la valeur d’une rébellion contre les identifications assurant le maintien de la routine sociale.

Ce Séminaire annonçait « le remaniement des conformismes antérieurement instaurés, voire leur éclatement ». Nous y sommes. Lacan parle de nous.

Jacques-Alain Miller

*
Jacques-Alain Miller invité de Laurent Goumarre
pour son émission Le RenDez-Vous
le mercredi 10 juillet de 19h à 20h
à écouter sur France Culture
*
Jacques-Alain Miller et Clotilde Leguil invités par Philippe Petit
pour Les Nouveaux chemins de la connaissance consacrés à « Lacan : le désir dans tous ses états »
le vendredi 12 juillet de 10 à 11h
à écouter sur France Culture
***