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Guy Debord, « Une étrange guerre »

D 21 janvier 2011     C 0 messages Version imprimable de cette Brève Version imprimable   

Guy Debord, « Une étrange guerre »

« ... suivre la voie que déterminent les nécessités de notre étrange guerre, qui nous a menés si loin.
Car notre intention n’avait été rien d’autre que de faire apparaître dans la pratique une ligne de partage entre ceux qui veulent encore de ce qui existe, et ceux qui n’en voudront plus.
 »

Guy Debord, In girum imus nocte et consumimur igni, 1978 [1].

C’est après la publication des Commentaires sur la société du spectacle, et, surtout, après celle du premier tome de Panégyrique en 1989, que Sollers dit, à plusieurs reprises, son admiration pour Guy Debord. Citons, pour mémoire, trois de ses articles : « Guy Debord, vous connaissez ? » (1989), « L’art extrême de Guy Debord » (1997) et « L’étrange vie de Guy Debord » (1999) [2].

En 1989, Sollers écrit :

«  Guy Debord, écrivain français dont quelques amateurs savent qu’il est, de loin, le penseur le plus original et le plus radical de notre temps. »

et, à propos de Panégyrique :


«  j’ai acheté ce livre de quatre-vingt-douze pages pour 80 F, je l’ai lu immédiatement dans la rue, acte impensable pour tout autre auteur vivant. D’où mon avis aux comploteurs du marché fantôme : hausse fulgurante et incontrôlable à prévoir — pas nécessairement de façon posthume. »

Son suicide prématuré en novembre 1994, la publication simultanée de ses principaux écrits chez Gallimard, dans la collection "blanche" (qui en fait «  un révolutionnaire classique »), a précipité de manière fulgurante la "reconnaissance" médiatique et institutionnelle de Debord... au point qu’il est aujourd’hui considéré comme un « trésor national » ! Qu’en aurait pensé celui qui n’avait de cesse de revendiquer jusqu’au bout sa « mauvaise réputation » ?

Depuis quinze ans, pas un article de la presse spectaculaire qui ne se réfère à la critique que Debord faisait de la société du spectacle pour, souvent, la réduire à une critique des "médias" ou des "médiatiques"... en oubliant — donc en falsifiant — deux des premières thèses de La société du Spectacle (sa base "marxiste" si l’on veut) :

« Toute la vie des sociétés dans lesquelles règnent les conditions modernes de production s’annonce comme une immense accumulation de spectacles. Tout ce qui était directement vécu s’est éloigné dans une représentation. » (Thèse 1)

« Le spectacle n’est pas un ensemble d’images, mais un rapport social entre des personnes, médiatisé par des images. » (Thèse 4)

A l’inverse, mais c’est complémentaire, l’oubli est fréquent que, comme l’écrit Sollers en octobre 1999 dans L’étrange vie de Guy Debord :

« Il ne s’agit pas non plus ici de « théorie », rien pour les colloques, les débats, les expositions, les thèses, les vernissages : « Aucune époque vivante n’est partie d’une théorie : c’était d’abord un jeu, un conflit, un voyage. » C’est parce qu’il était un grand poète métaphysique d’un enfer social sans poètes que Debord reste, aujourd’hui même, révolutionnaire  »

Article qui se conclut par cette citation de Debord :

« Ceux qui, un jour, auront fait mieux, donneront librement leurs commentaires, qui eux-mêmes ne passeront pas inaperçus. »

L’année suivante, Philippe Sollers donnait librement ses commentaires en réalisant un portrait complexe et émouvant de Guy Debord dans un film conçu avec Emmanuel Descombes [3] pour la série « Un siècle d’écrivains » présentée par Bernard Rapp sur France 3 [4].

Le film, projeté le 19 octobre 2000, « ne passera pas inaperçu » si l’on en juge par les réactions de "proches" de Guy Debord (ah ! les "proches" !). Dans Le Canard Enchaîné du 15 novembre 2000, on pouvait lire, à la rubrique Ecrits et Chochottements :

« DEBORD (Guy) : ses proches qui veillent à l’édition de ses oeuvres chez Gallimard s’emportent de plus en plus ouvertement contre Philippe Sollers, qui, avec le temps, s’est promu " attaché de presse officieux " de feu l’auteur de La société du spectacle. Ils reprochent au nouveau stratège des prix littéraires (prix Goncourt pour son auteur Schuhl), à l’ami du pape, au thuriféraire de Jospin, etc., ces attitudes, qui auraient, selon eux, horrifié Debord. Du coup, du côté de la Rue Sébastien-Bottin, les rumeurs vont bon train sur l’expulsion de Sollers du cercle des amis de l’écrivain disparu. La société du spectacle n’aime pas les spectaculaires ? »


[1Guy Debord, Oeuvres cinématographiques complètes, Gallimard, 1994, p. 259.

[2Voir notre dossier Panégyrique de Guy Debord.

[3La filmographie d’Emmanuel Descombes sur wikipedia.

[4Vous trouverez la liste non exhaustive de ces "épisodes" sur le site de l’émission.


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