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Barthes par lui-même

radio, 1976 (archives sonores : une exclusivité pileface)

D 6 août 2015     A par Albert Gauvin - C 3 messages Version imprimable de cet article Version imprimable    ................... PARTAGER . facebook


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La demande d’amour
Roland Barthes par Roland Barthes, 1975

J’ai déjà eu l’occasion de consacrer un dossier à Roland Barthes — Roland Barthes, tel quel — et d’y faire entendre sa voix, cette voix volontiers monocorde, "neutre" comme il aurait aimé dire. Mais les extraits choisis y faisaient entendre d’abord la voix du professeur. Le numéro que consacre Le Magazine littéraire à Barthes, l’entretien de Philippe Sollers et son titre même — « Sa voix me manque » — m’a incité à réécouter quelques vieux enregistrements. Quelle était donc cette voix si singulière, son "grain" ?

Première mise en ligne le 5 janvier 2009.

Un enregistrement de 1976 a retenu mon attention.
En 1975, Roland Barthes a publié Roland Barthes par Roland Barthes aux éditions du Seuil dans la collection Écrivains de toujours [1]. Un an après il se livre à un exercice qu’il n’aime guère : parler de lui — de sa vie — à la radio pendant un peu plus d’une heure. Puis, lors d’une autre émission — L’invité du lundi —, à laquelle il a convié des amis, il revient sur cette "autobiographie" radiophonique.

L’émission se compose de deux parties :

Dans une première partie, Roland Barthes parle de son enfance et de son adolescence, de la mort de son père alors qu’il est très jeune, de l’« entour affectif » qui fut le sien, de sa solitude, de la lecture qu’il fit très tôt, à dix ou douze ans, des romans, de son « angoisse d’être blessé », de sa maladie (tuberculose), de son apprentissage du chant avec Panzera (il dit avoir eu deux "pères" : Panzera et Brecht), de son « utopie d’un monde où on travaillerait de manière jouissive » et, déjà de son besoin de « délicatesse ».
Barthes nous fait écouter la voix de Panzera, les Pas sur la neige de Debussy et un air de Schubert (Gutte Nacht).

Dans une deuxième partie, Barthes revient en compagnie des amis qu’il a souhaité inviter (ses étudiants, mais il préfère parler d’amis) sur l’autobiographie parlée, les différences, de l’écrit au "parlé", avec le Roland Barthes par lui-même.
Retour aussi sur la spécificité des séminaires : le séminaire "élargi" où, par «  refus du théâtre », il est le seul à parler et le séminaire "restreint" (en général pas plus de quinze ou vingt personnes), « un lieu où on se sente bien », où se joue un « rapport privilégié », « de type affectif », « pas du tout paternel », une relation « presque amoureuse » et où, là, chacun peut parler. Où s’exerce ce que Barthes appelle « une éthique de la délicatesse » [2].
Il est aussi beaucoup question de l’écriture des livres ou, différente, de l’écriture du séminaire lui-même dont Barthes dit : « je l’écris parlé ».

Participaient à cet échange : Evelyne Bachelier, Jean-Louis Bachelier, Roland Havas, Jean-Louis Bouttes [3], Antoine Compagnon (aujourd’hui professeur au Collège de France) et, selon le souhait de Barthes, une amie psychanalyste, Jacqueline Rousseau.

C’est un document que j’ai enregistré en 1976. Il en porte la trace (le son est un peu sourd, cela "grésille" parfois), mais il me paraît assez miraculeusement sauvegardé. Il a en quelque sorte valeur de témoignage y compris sur la radio de l’époque (il est d’ailleurs question du rapport de Barthes à la radio et à sa technique particulière pendant le dialogue).

C’est un Barthes plus intime, très pudique, qui parle. Mais l’écrivain est là.

En voici de larges extraits.

1. Première partie (47’06).

2. Deuxième partie (43’36).



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Le séminaire de R.B. aux Hautes Etudes


Lire également Julia Kristeva La voix de Barthes.


[2J’ai assisté quelquefois au "séminaire élargi" (je ne pense pas que ce fut le "séminaire restreint") avec un ami, Gérard Farasse, qui y présentait une partie de son travail sur Francis Ponge. Ce devait être au début des années 70. Le souvenir que j’en ai confirme cette "atmosphère" assez étrange d’un espace pacifié, sans hystérie, sans agressivité, à une époque où, dans divers lieux où la parole était censée "être libérée", les tensions et les rapports de pouvoir étaient fréquents, souvent dominants et, à vrai dire, "terrorisants".

[3Ces deux derniers font partie des amis remerciés au début de Roland Barthes par Roland Barthes.

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3 Messages

  • Albert Gauvin | 23 octobre 2019 - 14:06 1

    Il y a une dizaine d’années un producteur de France Culture me demandait l’origine de l’enregistrement radio de RB par RB que j’ai mis en ligne ci-dessus. « Ce serait beau de le rediffuser un jour » m’écrivait-il. C’est chose faite en partie. Les nuits de France Culture diffusent en effet cette nuit un extrait de cet entretien diffusé la première fois le 8 mars 1976. La qualité sonore étant meilleure que celle de ma vieille cassette, voici cet extrait.

    1976 |Seul, dans un studio plongé dans le noir Roland Barthes dressait son autoportrait, nous étions en 1976, l’essayiste avait 61 ans, il se racontait. (Extrait : "Les après-midi de France Culture, l’invité du lundi", une émission diffusé la première fois le 08/03/1976).

    GIF

    Roland Barthes (1915-1980), le 21/06/1977.
    ZOOM : cliquer sur l’image.
    GIF

    Le lundi 8 mars 1976, Roland Barthes, 61 ans, alors directeur du séminaire de « sociologie des signes, symboles et représentations » à l’Ecole pratique des hautes études, était l’invité d’une après-midi de France Culture. Comme de coutume pour ce programme, il s’était quelques jours auparavant prêté au jeu de « l’autoportrait radiophonique », enregistré au préalable et diffusé en ouverture de l’après-midi. Étonnant exercice pour lequel l’invité se racontait seul, dans un studio plongé dans le noir. Barthes, qui commence par rappeler qu’il serait bien incapable d’écrire quelque chose comme ses Mémoires, y évoque ses premières années d’enfance dans un univers exclusivement composé de femmes, au sein d’un milieu pauvre et bourgeois ; il se souvient de son rapport à l’ennui et à la lecture, et parle, pour définir son caractère, d’"une angoisse de délicatesse". Il évoque aussi la joie du travail créateur, et nous fait entendre en guise de final La vie antérieure mise en musique par Duparc et chantée par le baryton Charles Penzérat, auprès de qui le jeune Roland apprit à chanter, quelques temps après sa première attaque de tuberculose. Sur son enfance, il disait :

    Mon père est mort à l’autre guerre mondiale, la guerre de 14-18, il est mort quelques mois après ma naissance. J’ai donc eu une enfance, même une première enfance, sans père. J’ai vécu avec ma mère, et dans la famille de mon père, très vite il n’y a plus eu que deux femmes : ma grand-mère et ma tante. Et donc ma famille au sens traditionnel du terme a été une famille essentiellement féminine dans laquelle n’est passée, pour ainsi dire, aucune silhouette d’homme. J’ai connu un peu mon grand-père paternel et mon grand-père maternel mais aucune de ces silhouettes ne m’a vraiment marqué.

    A propose des cours de chant qu’il a pris avec Panzéra :

    J’avais à ce moment-là un ami très cher, Michel Delacroix, ensemble nous avons décidé d’apprendre le chant [...] il y avait deux chanteurs qui nous séduisaient par leur style dans la mélodie, dans le lied, c’était d’une part Pierre Bernac et d’autre part. Charles Panzéra. Nous nous sommes finalement adressés à Charles Panzéra [...] Charles Panzéra, avec une extrême générosité, nous a proposé de nous faire travailler lui-même. De la sorte j’ai travaillé le chant deux ans avec Panzéra. Depuis j’ai gardé une profonde admiration pour Panzéra il m’a appris beaucoup de choses, bien au-delà de la musique, il m’a appris des choses qui concernent l’essentiel de mon travail, à savoir le texte, la textualité. Je ne peux pas repenser à cette époque, immédiatement antérieure à la guerre, sans entendre, par une sorte d’anamnèse extrêmement forte et presque violente, cette voix inimitable de Panzéra.

    Production : Michel Gonzales et André Mathieu
    Extrait : "Les après-midi de France Culture, l’invité du lundi : Autoportrait de Roland Barthes"
    1ère diffusion : 08/03/1976. France Culture.


  • A.G. | 18 mars 2009 - 18:35 2

    Bonjour,

    En réponse à votre message, je vous informe que l’enregistrement de Roland Barthes a été effectué par mes soins le 8 mars 1976 sur un magnétophone d’époque (sans fil de raccordement !).
    _ Sur ma cassette, miraculeusement conservée, je n’ai noté que la date et AUTOBIOGRAPHIE.
    _ Comme indiqué dans ma présentation, l’émission devait s’appeler L’INVITÉ DU LUNDI.
    _ J’avoue ne pas me souvenir de cette émission mais je l’avais enregistrée parce qu’il m’était arrivé de suivre le "petit séminaire" de Barthes et que certains des étudiants qui participaient à l’émission étaient des amis personnels.

    Bien cordialement


  • anonyme | 18 mars 2009 - 15:58 3

    Bonjour,
    Producteur à France Culture, je serais heureux de savoir l’origine de l’enregistrement radio de RB par RB...
    Ce serait beau de le rediffuser un jour,
    Merci de me dire :
    atelierdecreationradiophonique@radiofrance.com

    Frank Smith