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H, 1973 (1)

D 5 juin 2007     A par Albert Gauvin - C 15 messages Version imprimable de cet article Version imprimable    ................... PARTAGER . facebook



Première mise en ligne le 25-11-06

H a été écrit juste après Lois. Publié en 1973, ce roman a souvent été présenté comme un roman de transition préparant Paradis. Ce n’est pas faux. Il a pourtant son existence propre qui mérite qu’on le lise pour lui-même. Peu l’ont fait.

Philippe Forest, dans son essai sur Philippe Sollers (1992) le mentionne, bien sûr, mais passe très vite : 40 pages sur Lois, 50 pages sur Paradis, quelques lignes seulement sur H.

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1ère édition, mars 1973.

Heureusement, Roland Barthes, dès 1973, écrivait un très beau texte, Par-dessus l’épaule (repris dans Sollers écrivain, 1979). Avec cette très belle phrase : « Je m’entête donc, et je dis du livre de Sollers qu’il est beau. » Voilà : c’est bien de commencer par là.

Et puis, il y a l’analyse, décisive, de Julia Kristeva : Polylogue, publié dans Tel Quel 57 (printemps 1974 [1]) et repris dans le volume éponyme :

« H explore précisément ce moment que tant de philosophies et de dogmatismes visent à recouvrir : le moment où le matérialisme peut se parler (...). Le sujet se perd dans le procès matériel et historique, mais il se reconstitue, reprend son unité et parle, rythmé, sa dissolution aussi bien que son retour. Le discours matérialiste, lorsqu’il s’énonce en rythme, est d’une gaieté déchirée de douleur. » (p 198)

Est-ce ce matérialisme, ce rythme, qu’on n’a pas voulu comprendre ? On peut le penser. A peu près en même temps, Sollers publie Sur le matérialisme. Qui a lu ce livre ? Personne [2].

Sur la couverture de H, un curieux diagramme. Qui l’a vu ? Qui en a parlé ? Il est pourtant sur la couverture de la première édition comme, vingt-huit ans plus tard, sur celle de la réédition chez Gallimard.

Ce diagramme est de Giordano Bruno. Qui connaît, qui a lu Giordano Bruno ? Pas au programme.


H a été publié en mars 1973 (Le Seuil, coll. Tel Quel).

*


1. H : LA LETTRE

Que désigne cette lettre (la huitième de l’alphabet et la sixième des consonnes) ?

Le dictionnaire nous dit qu’« en musique le H est le "si" naturel dans la notation germanique ».

C’est l’hydrogène, l’élément chimique (la bombe H).

C’est bien entendu le hasch.

Les derniers mots du roman sont : «  sors rentre vite et si la voix crie tombant d’hydrogène alors que crierai-je crie lui toute chair est comme l’herbe l’ombre la rosée du temps dans les voix  » (c’est moi qui souligne. A.G.)

H, c’est aussi le titre d’une des Illuminations de Rimbaud :

« Toutes les monstruosités violent les gestes atroces d’Hortense. Sa solitude est la mécanique érotique ; sa lassitude, la dynamique amoureuse. Sous la surveillance d’une enfance, elle a été, à des époques nombreuses, l’ardente hygiène des races. Sa porte est ouverte à la misère. Là, la moralité des êtres actuels se décorpore en sa passion ou son action. — O terrible frisson des amours novices sur le sol sanglant et par l’hydrogène clarteux ! trouvez Hortense. » (c’est moi qui souligne. Lire, plus bas, le commentaire de Marcelin Pleynet. A.G.)

Dans le numéro 3 d’art press, Sollers notait déjà :

« Wo es war, soll dervich werden. C’est-à-dire : une danse-vertige du "je pense" avec son langage, comme si celui-ci commençait à "pleuvoir" (je note au passage que la lettre h dans les inscriptions runiques vient du mot hagall, qui signifie : grêle). »
« H, hydrogène, haschich (Rimbaud établit l’équivalence). Mais aussi cette citation d’Artaud disant qu’au Mexique il a vu un peu partout dégagée par le feu, cette lettre, " le H de la génération en somme ". Rappel du HCE de Finnegans Wake. Dans l’écriture ogamique par entailles le A et le H s’écrivent d’un seul trait et H, huitième lettre de l’alphabet pour nous, devient la première (voir l’étude de Stephen Heath dans Tel Quel 54 et en partie consacrée à Joyce — voir article). H hiératique des hiéroglyphes. H où vous entendez le tranchant du A, son sifflement aspiré. Marque indiquant qu’il s’agit d’opérations portant sur des ensembles et, comme Lacan a raison de le rectifier, la lettre ne désigne pas des ensembles, elle les fait. »...

L’entretien intégral d’art press.
Voir aussi plus bas mon commentaire du 7 février 2007.

*


2. GIORDANO BRUNO [3]

H est contemporain de l’écriture de Sur le matérialisme, publié peu de temps après (janvier 1974).

Sollers y parle de Giordano Bruno :

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Giordano Bruno

« Giordano Bruno, brûlé en 1600* (notamment à cause du maintien de la virginité de la Vierge), est ici l’acteur clé de cette pluralisation et de cette infinitisation dramatique.

« Voici celui, dit-il de lui-même, qui a franchi les espaces, pénétré dans le ciel, enjambé les étoiles, dépassé les frontières du monde, pulvérisé les murailles fantastiques des première, huitième, neuvième, dixième sphères et de toutes celles qu’auraient pu y ajouter les vains calculs des mathématiciens et l’aveugle obstination des philosophes vulgaires...Il a donné des lumières aux taupes, la lumière aux aveugles. »

(Ici, un rappel de biais : Joyce). Et pourtant, Bruno s’est arrêté, il n’a pu admettre les "éléments impies" (de Démocrite). Il "reconnaît au contraire l’existence d’un haut esprit paternel par lequel tous ces éléments sont gouvernés". Ah, ce "père" ! Il prend partie contre le "clinamen" (la déclinaison épicurienne), ce concept ou plutôt cette surdétermination de tout concept d’une extrême importance pour toute l’histoire de notre pensée, et contre le hasard. » (p 59)

et plus loin : « Pour Bruno, l’atome est un minimum, non un terme. Il est source de nombre et le monde est un texte écrit d’une infinité de mots. Les mots sont formés par un nombre limité de signes (lettres ou accents) qui eux-mêmes consistent en points. Les mots représentent l’infinie variété des objets sensibles ; les lettres sont les corps élémentaires dont ces objets sont composés ; les points sont les éléments (minimaux) en lesquels, en définitive, tout se résout. Conception traditionnelle du matérialisme. Question d’écriture. De division et d’hétérogénéité. La « fente » qui mène au matérialisme est aussi ce passage dans un autre état du langage. Question de fission atomique. » (p 63).

* Si Sade a été "prisonnier sous tous les régimes", Giordano Bruno, lui, a été excommunié par toutes les Eglises : par la communauté calviniste à Genève, la communauté luthérienne en Allemagne ; puis finalement, après huit années de procès, il a été condamné à mort par l’Eglise de Rome et son pape Clément VIII. L’inquisition a fait son office (celle de Venise avait été plus "clémente"). Curieusement, c’est en France que, sous la protection de Henri III, Bruno a connu un peu de tranquillité (de 1578 à 1583). (Cf. Giordano Bruno l’insoumis)

Un numéro de la revue Europe sur Giordiano Bruno (mai 2007)

*


3. LE DIAGRAMME DE LA COUVERTURE : FIGURA INTELLECTUS

ZOOM : cliquer sur l’image

Figura intellectus de Giordano Bruno. Le « Traité contre les mathématiciens et les philosophes de ce temps » (Articuli centum et sexaginta adversus huius tempestatis mathematicos atque philosophos) est publié à Prague en 1588.

Il est intéressant de noter que c’est la même année 1588, que Montaigne publie la 2ème édition des Essais et que Tintoret peint « Le Paradis ».

Trois diagrammes (fig. IIa, b, c) sont des variations sur le thème de l’intersection des cercles. Le premier diagramme représente la « mens universelle », le deuxième (qui se trouve sur la couverture de H), l’intellectus, et le troisième, la « figure d’amour » qui harmonise les contraires et unifie la multiplicité dans l’un. Ces trois figures, dites les plus « fécondes », représentent la trinité hermétique comme elle est définie par Bruno dans les « Trente Statues ». La troisième, l’amoris figura (fig. IIc) porte même les lettres du mot « Magic » inscrites dans le diagramme. Bruno se servait dans ce traité de l’étoile pour signifier « amor ».

*


4. L’INFINI

Et ne nous dites pas que la référence à Bruno n’annonce rien [4] !

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*


5. DERNIÈRE DÉCLARATION

Sollers écrit dans Mystérieux Mozart :

Il n’est pas inutile de rappeler ici les derniers moments de Giordiano Bruno, brûlé à Rome en 1600 :

« Sa dernière déclaration fut pour dire : 1. Qu’il n’avait pas le désir de se repentir. 2. Qu’il n’y avait pas lieu de se repentir. 3. Qu’il n’y avait pas de matière sur laquelle se repentir. En conséquence de quoi, on décidé de brûler : 1. Les livres. 2. Leur auteur. 3. Des branches de chêne-liège. »

*


H, « LES COULISSES DU PARADIS »

note du 7 février 2007

Dans le 11ème entretien avec Ligne de risque intitulé « Les coulisses du Paradis » et publié dans Poker en 2005, Sollers évoque un livre d’André Padoux, L’énergie de la parole, qui traite de la dimension mystique de la vâk, de la parole, dans la tradition indienne, védique. Il revient sur la lettre H :

«  Avec la lettre H, voici l’union rituelle du yoga tantrique. Le dynamisme propre à cette lettre est lié au va-et-vient des yeux de l’adepte à ceux de sa partenaire pendant l’échange sexuel. La partenaire, grave question, avec tout ce que vous imaginez de romances, d’impasses, de ratages - bref d’enlisement sexuel sur fond d’illusion. Suzette aurait pu être ma partenaire, Lou aussi, et Anna... Qui est la partenaire ? La mère des enfants ? Eh non. Le dynamisme que procure la lettre H est sans limites : l’adepte va et vient sans arrêt. Sa sexualité ne connaît aucune borne. Un mystique commente : "La pensée totalement immergée dans la joie la plus intense, émettant ce son de façon ininterrompue, dans le bonheur de l’union, avec une femme au corps harmonieux. Les maîtres du yoga, à l’esprit totalement détaché, atteignent ainsi à l’union suprême." J’ai connu, de manière indubitable, cette immersion de la pensée dans la joie intense. C’était après avoir pris des substances, et dans la compagnie de femmes au corps harmonieux. J’ai été ainsi emmené dans les parages de la "Voyante" ».

Selon Sollers, André Padoux distingue dans la Parole « quatre quarts » : au plus haut degré, la « parole suprême », « entièrement différente du langage humain, et qui l’enveloppe », la « parole voyante », la « Moyenne » ou l’« Intermédiaire » et l’« Etalée » (la plus vulgaire, qui sert à communiquer) .

Sollers nous parle de la « Voyante » en ces termes : «  Elle inclut tout ce qui a trait à l’organique dans le langage : la gorge, le palais, la glotte, la langue, etc... Elle est avant tout une vibration. Elle résonne dans le son. Energie de la volonté, et non plus de repos (...), elle soutient le désir de connaissance. Ce n’est plus un murmure intérieur, mais un murmure subtil. La "Voyante" a la rapidité de la foudre. Elle se déplace à l’instant. Elle est également ce qui porte la mémoire (...) »

Cet entretien s’appelle, rappelons le, Les coulisses du Paradis. Evoquant la lettre H, Sollers ne parle pas de son roman H. On ne peut éviter d’y penser.
H a été écrit juste avant Paradis.
Il n’est peut-être pas excessif de penser que Paradis touche à la "parole suprême".

«  La "parole suprême" est "émerveillement indifférencié, et comparable à un signe de tête intérieur". La parole à son état suprême : salut dans la clarté. Elle est, cette parole, "éveillé, indestructible, éternelle" : elle configure un "Je absolu" dont une tête en liberté [allusion au roman de François Meyronnis] pourrait faire l’expérience. Avec cette parole suprême, nous sommes avant la manifestation (...) Avec la parole suprême, vous frayez dans une dimension qui ignore l’inertie. Le corps humain s’inclut en elle, devenant immédiatement résurrectionnel — et cela sans avoir à produire un cadavre, encore moins un squelette à balayer. » [c’est moi qui souligne. A.G.]

Sollers a dit souvent avoir écrit Paradis dans un état de « grand repos ».

Le passage de H à Paradis serait celui de la "parole voyante" (on pense aussi au "voyant" de Rimbaud), encore prise dans "l’énergie de la volonté" sans repos, au repos (mais un repos — paradoxal — qui refuserait l’inertie) de la "parole suprême". Il marquerait, pour la première fois, dans le roman , le "saut", le « salut dans la clarté hors de la métaphysique de la volonté » (Heidegger), la sortie du nihilisme.

Voir Vers la notion de Paradis (I).

*

Voir en ligne : Giordano Bruno



H, Mallarmé, Nietzsche et Rimbaud, Sollers

par Marcelin Pleynet

Dans son journal, à la date du 28 février 2004 (cf. "Situation", L’Infini n°88, automne 2004), Marcelin Pleynet revient sur une conférence de Sollers faite le même jour dans le cadre du séminaire de Pierre Brunel (auteur de nombreux essais sur Rimbaud), à l’auditorium des cours de Civilisation française de la Sorbonne. La conférence s’intitulait Nietzsche et Rimbaud. Sollers la dédia à Cesare Battisti.
Pleynet écrit (extrait) :

« Si je me souviens bien, c’est en association avec la question du surgissement de l’hystérie que Sollers aborde la lecture de H, en signalant la très vraisemblable lecture, par Rimbaud, en 1871, dans le deuxième Parnasse contemporain, de l’Ouverture d’ "Hérodiade " de Mallarmé. Ce qui fait très efficacement évènement dans l’éclaircissement du face-à-face conflictuel et sans merci des deux écrivains.

Donc Mallarmé " Hérodiade " — H. dans le Parnasse contemporain de 1871, où Sollers prélève :

« J’aime l’horreur d’être vierge et je veux
Vivre parmi l’effroi que me font mes cheveux
Pour, le soir, retiré en ma couche, reptile
Inviolé, sentir en la chair inutile
Le froid scintillement de ta pâle clarté,
Toi qui meurs, toi qui brûle de chasteté
Nuit blanche de glaçons et de neige cruelle !
 »

Comment mieux comprendre ce qu’il en est de Bottom et de H qu’en imaginant les proses de Rimbaud comme une réponse à Mallarmé — du cavalier à la danseuse.

H
« Toutes les monstruosités violent les gestes atroces d’Hortense. Sa solitude est la mécanique érotique, sa lassitude, la dynamique amoureuse. Sous la surveillance d’une enfance elle a été, à des époques nombreuses, l’ardente hygiène des races. Sa porte est ouverte à la misère. Là, la moralité des êtres actuels se décorpore en sa passion ou en son action — Ô terrible frisson des amours novices sur le sol sanglant et par l’hydrogène clarteux ! trouvez Hortense. »

Sollers insiste sur le Rimbaud latiniste entendant avec " Hortense " : hors en tension — dans le " hors-temps " en tension, manière de tendre... et encore "Hortense " : horreo — se tenir raide, "horrens", "hortus" — jardin, "hortulanus" — jardinier, "hortensis" de jardin, "hortensia" nom de fleur formé sue le prénom Hortense féminin du latin "hortensius" sur la base de "hortus" — Hortensia (XVIIIe siècle en latin, XIXe en français), nom formé par le botaniste Commerson en l’honneur d’Hortense Lepaute, femme d’un célèbre horloger du XVIIIe siècle. Hortense : la reine Hortense, mère de Napoléon III.
Usage érotique de soi-même... en son jardin... H — Hortense — Hortensia, Rimbaud est aussi l’auteur humoriste de « Ce qu’on dit au poète à propos des fleurs ». [5]

H se trouve manuscrit sur le même feuillet que Bottom d’abord intitulé Métamorphoses et qui le précède. (Shakespeare, Le Songe d’une nuit d’été). Bottom est un tisserand transformé en âne. Dans le poème de Rimbaud Bottom, le narrateur se métamorphose tour à tour en « gros oiseau gris-bleu », en « un gros ours aux gencives violettes », en « âne claironnant et brandissant son grief, jusqu’à ce que les Sabines de banlieue vinrent se jeter à mon poitrail ». Sur le même feuillet, H fait immédiatement suite avec : « Toutes les monstruosités violent les gestes atroces d’Hortense. » « Geste — gestus : dur, farouche. Figures des métamorphoses érotiques (Picasso), usage érotique dynamique amoureuse du corps en sa parole, en son jardin.

Nietzsche et Rimbaud . Quelques maigres questions à la suite de l’intervention de Sollers. Pas une seule sur le livre qu’il a publié sous ce titre H, en 1973. Ce premier livre, entièrement sans ponctuation, publié huit ans avant Paradis, a été réédité chez Gallimard dans la collection "L’Imaginaire" en 2001 [6], avec en quatrième de couverture ce texte de 1973 qui peut peut-être en effet éclairer ce qui se joue, dans cette actuelle intervention sur Nietzsche et Rimbaud, quant à l’essence de la liberté « qui ne vient proprement au regard que si nous nous enquérons de la liberté comme fondement de la possibilité du Dasein, alors elle est elle-même en son essence plus originelle que l’homme. » [7]

Je note donc, en quatrième de couverture de ce livre publié en 1973 : « Les raisons pour lesquelles ce livre ne peut pas comporter de présentation seraient sans doute aussi longues à exposer que ce livre lui-même. Il faut donc éprouver son rythme : dictions, timbres, accents, ponctuation latente, tourbillon, flot, appel. Au-delà de l’automatisme un calcul joue, veille, critique, partant à la fois de tous les points de l’histoire. Ce calcul se dit par masses dans l’unité discontinue de ses coupes. Il module, frappe, chuchote, apostrophe, marque, efface, compte, signale l’absence mouvante mais cependant adressée, dialoguée, de toute langue de fond. Voilà, détendez-vous, c’est clair. Restez sur le sens, c’est simple... »
Qui pensera qu’aujourd’hui [8] Sollers s’est peut-être essentiellement adressé à ce texte publié alors que se préparait le voyage de Tel Quel en Chine ? Je dois encore avoir, dans les archives de ce voyage en Chine, des photos où l’on voit Sollers portant en bandoulière une sacoche sur laquelle se trouve très visiblement imprimée la lettre H.
Nietzsche et Rimbaud, ce qui se pense infiniment en lieu et place de cette pensée où l’homme habite poétiquement... to be at the bottom.


[1De très larges extraits dans une traduction anglaise :

PDF - 1.5 Mo
Julia Kristeva. Polylogue (1974)

[2Voir : Sur le matérialisme.

Dans le dernier volume de son Journal hédoniste, Michel Onfray — l’auteur de la Contre-histoire de la philosophie écrit plaisamment : « ... Philippe Sollers — dont je ne retrouve pas Sur le matérialisme dans ma bibliothèque, tant mieux pour lui, dommage pour moi... » D’accord : ça ne veut pas dire qu’il ne l’a pas lu. Note du 21-11-07, A.G.

[3

[5Je souligne. A.G.

[6

[7Heidegger.

[8c’est-à-dire le 28 février 2004.

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15 Messages

  • A.G. | 15 octobre 2013 - 11:45 1

    De Gaulle : Votez Sollers !

    (Message intergalactique du 13 octobre 2013)

    (voir ici).


  • A.G. | 25 juin 2013 - 17:23 2

    Dans un récent interview, Sollers revient sur l’utilisation de certaines... substances.

    ...j’allais vous parler de votre réécriture de Michaux dans Discours parfait...

    Ph S. : Michaux est important comme explorateur des drogues. C’est ce qu’il a fait de mieux. De très loin. Toute la poésie lourde, le reste, ce n’est pas très intéressant. En revanche, ces expériences hallucinogènes sont du plus grand intérêt. (cf. L’infini de Michaux )

    Et les vôtres ? Est-ce que vous seriez déçu que, comme Michaux, on ne retienne de vous que votre livre, H ?

    Ph S. : Si quelqu’un le découvre, ce sera une nouvelle importante puisqu’à ma connaissance personne n’en parle jamais. La seule interview qu’il y a eu, dans le Monde, « Comment écrivent les écrivains ? », était celle d’un mec qui s’appelait Rambures (Jean-Louis de Rambures, NDLR) , je crois. C’est la seule fois qu’on m’a interrogé là-dessus. Aucune question sur la question.

    Moi je vous la pose !

    Ph S. : Je vais beaucoup plus loin que Michaux. Michaux est encore un descripteur d’expérience. Moi j’essaie d’attraper l’expérience elle-même.

    Quand vous dites que c’est une expérience de vie, c’est une expérience provoquée, non ? Vous l’avez faite pour pouvoir écrire un livre, c’est ça ?

    Ph S. : Non. Quelle horreur que vous disiez ça ! J’ai été amené à prendre ce genre de substance quand Mai 68 était à l’endroit. Tout simplement parce que j’ai rencontré un certain nombre de personnages féminins. Si on est seul, c’est pas tout à fait la même chose. Il faut une sorte d’accompagnement. Donc le haschich Afghan de l’époque, très noir, très très puissant, m’était obligeamment roulé par une femme que j’ai beaucoup aimée. Il vaut mieux être accompagné, je vous dis, parce que l’herbe colombienne de l’époque, très puissante, provoquait des états de possession quand même assez étonnants. Le haschich c’est deux choses : un fou rire généralisé et inextinguible, qui vous fait apparaître toute chose sous leur vrai jour c’est-à-dire leur ridicule. Deuxièmement, ça peut perturber vos relations amoureuses, sentimentales, etc. parce que vous découvrez que votre partenaire du moment n’est pas celui ou celle que vous devriez fréquenter, mais quelqu’un qui se trouve la et qui, brusquement est revêtu d’une auréole magique. L’herbe que j’ai fumée, à haute dose à un moment donné, là c’est autre chose. Il y a une expérience qui est de l’ordre chamanique, vaudou, de l’ordre de la possession. L’Afrique fantôme, il y a des choses étonnantes de Leiris, là-dessus (cf. Portraits de Michel Leiris) . Donc je me souviens très bien, c’est comme si c’était hier, que mon corps étant devenu un cheval, je le manoeuvrais de façon particulièrement acrobatique dans l’appartement où je me trouvais, à la grande surprise des gens plus ou moins camés qui me regardaient. Mais ils m’ont raconté après que j’étais un excellent cavalier...

    Ça a duré longtemps ?

    Ph S. : Un certain temps. H est publié en 1973, sauf erreur. Avant vous avez un livre qui s’appelle «  Lois » et qui est particulièrement explicite (cf. Lois ou " la libération du territoire ") . Le type est particulièrement à l’ouest. Ou à l’Est, en Chine, déjà. 1968... Paradis. Oui, quand même, presque 20 ans. Maintenant, je ne fume plus que des Camel, où il y a, paraît-il, un certain degré d’opium. Il y a un moment où ça va comme ça. Sauf que, éventuellement, et ça sera dans un prochain roman, je me repique au truc pour une accélération physico-mentale conséquente. N’oubliez pas les amphétamines qui sont quand même parties prenantes dans cette affaire, que j’ai prises à très haute dose. J’ai avalé beaucoup de corydrane, mais ça a disparu bientôt parce que Sartre se poivrait au corydrane comme vous le savez et ça lui a fait perdre la vue. Il y a eu, tout ça est retiré, c’est très surveillé. Je peux vous citer, même si je crois que c’est défendu, de citer...

    Josyane Savigneau : Le captagon ?

    Ph S. : Ah ! Le captagon était une merveille. Décollage immédiat !

    Jo S. : Mais atterrissage difficile ?

    Ph S. : Pas vraiment. Il faut prendre ses précautions, faut pas trop mélanger.

    Jo S. : Il ne faut pas être angoissé, aussi...

    Ph S. : Ce n’est pas pas ma nature profonde.

    Y a-t-il des auteurs qu’il faut lire avec des substances ?

    Ph S. : Absolument pas. C’est d’ailleurs pour ça que personne ne lit. Tout le monde est intoxiqué de très mauvaises substances, à commencer par le cinéma...tographe.

    Crédit : le rideau.fr, juin 2013.


  • anonyme | 27 novembre 2012 - 15:39 3

    La lettre H est formée par deux verticales, reliées l’une à l’autre par leur milieu

    C’est là le signe de deux polarités unifiées, le suprême de l’homme liant ciel et terre

    Couché à l’horizontal, ce signe évoque le caractère chinois pour roi, wang


  • YM | 15 juillet 2011 - 21:43 4

    Bonjour,

    je vous écris rapidement pour signaler que la couverture du livre de René Guénon sur Dante, "L’ésotérisme de Dante", arbore la même figura intellectus que le roman "H" de Sollers. Je ne sais pas si des liens existent entre les deux, mais au cas où, peut-être une nouvelle piste, ou une simple lecture.

    Merci,

    YM B


  • anonyme | 19 mai 2010 - 22:29 5

    D’après certains analystes, Bottom fait référence au "songe d’une nuit d’été". Quant à H, ce poème évoquerait l’onanisme.

    Mais je me disais, au sujet de Bruno... Ne nous dites pas que...


  • anonyme | 19 mai 2010 - 01:50 6

    La divinisation des lettres de l’alphabet parait à priori une idée trop primitive, même si les dédales d’une possible erreur ne sont pas nécessairement inintéressants.


  • D. | 8 juin 2007 - 16:16 7

    Oups, je n’avais pas vu l’annonce qui était faite de cette parution ici-même... Pardon pour le remuement d’air...
    Cordialement !

    D.


  • D. | 7 juin 2007 - 10:44 8

    Eh bien voilà, l’annonce des mémoires de Sollers semble officielle : elle apparaît sur le site du Nouvel Observateur :

    « Un demi-siècle après « Une curieuse solitude », son premier roman, Philippe Sollers va publier, en octobre prochain, ses Mémoires chez Plon, sous le titre « Un roman vrai ». Il y racontera son parcours « tout en sinuosités et redressements spectaculaires » et son refus de « toute repentance ».
     »

    Voir en ligne : http://livres.nouvelobs.com/


  • D. | 6 juin 2007 - 13:55 9

    Quant à Femmes, outre le Women de Bukowski, signalons que c’était le titre d’une discrète plaquette, aujourd’hui épuisée, de Claude Simon, publiée avec des peintures de Miró, en 1966, et dont le texte a reparu seul aux éditions de Minuit sous le titre La chevelure de Bérénice. Texte sans ponctuation, hormis les blancs des paragraphes.

    Et puis... il semble que Derrida (Derrida, par G. Bennington, Seuil, "les contemporains"), vers 1979, ait eu la tentation d’appeler Femmes son livre sur Nietzsche. Finalement, il a appelé ça Eperons. Les styles de Nietzsche. Pourquoi ? Parce que ce titre était réservé pour tout autre chose ?

    (Je signale enfin ceci : c’est peut-être un canular, mais sur le blog de "Sollers" (?), (voir lien ci-dessus), un internaute anonyme indique que les mémoires de Sollers vont paraître en octobre chez Plon, sous le titre : Un roman vrai. Un autre internaute plaide pour un autre titre que celui-là... Bon... A voir !)

    Voir en ligne : http://sollers.jubiiblog.fr/blog.ph...


  • D. | 6 juin 2007 - 13:33 10

    Dans Vision à New York, Sollers signale également l’enchaînement suivant :

    H se finit ainsi :

    toute chair est comme l’herbe l’ombre la rosée du temps dans les voix

    Et Paradis (I) commence avec :

    voix fleur lumière écho des lumières

    ... et se termine ainsi :

    il commande un express serré qui lui est aussitôt servi le boit avale un verre d’eau glacée bâille deux fois de sommeil allme une cigarette puis soudain relâché léger renverse négligemment la tête au soleil

    Sur quoi commence Paradis II :
    soleil fleur lumière écho des lumières soleil coeur lumière rouleau des lumières...


  • A.G. | 9 novembre 2006 - 22:41 11

    Des extraits de H furent publiés dans Tel Quel 51 (automne 72) sous le titre Das Augenlicht (en hommage à Anton Webern).

    Dans le numéro 3 de la revue "art press" (mars-avril 73), Sollers donnait un long interview à Jacques Henric. Sous une photo de Sollers, la reproduction d’une partition d’Arnold Schoenberg (Drittes streichquartett opus 30, 1927).

    Il faudrait tout citer, ce serait trop long. Je me contenterai de citer ce qui est en rapport avec la première partie de mon article et que je relis - que je relie - seulement maintenant.

    Sollers : " Wo es war, so dervich werden. C’est-à-dire : une danse-vertige du "je pense" avec son langage, comme si celui-ci commençait à "pleuvoir" (je note au passage que la lettre h dans les inscriptions runiques vient du mot hagall, qui signifie : grêle)."

    "H, hydrogène, haschich (Rimbaud établit l’équivalence). Mais aussi cette citation d’Artaud disant qu’au Mexique il a vu un peu partout dégagée par le feu, cette lettre, "le H de la génération en somme". Rappel du HCE de Finnegans Wake. Dans l’écriture ogamique par entailles le A et le H s’écrivent d’un seul trait et H, huitième lettre de l’alphabet pour nous, devient la première (voir l’étude de Stephen Heath dans Tel Quel 54 et en partie consacrée à Joyce). H hiératique des hiéroglyphes. H où vous entendez le tranchant du A, son sifflement aspiré. Marque indiquant qu’il s’agit d’opérations portant sur des ensembles et, comme Lacan a raison de le rectifier, la lettre ne désigne pas des ensembles, elle les fait."...

    Où l’on remarquera l’allusion à Joyce déjà faite à propos de Giordano Bruno. Il faudra y revenir.


  • DB | 9 novembre 2006 - 18:53 12

    Et H, de l’intérieur...

    "Ph S : (...) je passe au livre qui s’appelle H, qui est un brouillon, à mon avis, un "journal" très enfiévré, très nerveux. J’écris ça, vraiment, dans un état de débordement. Il y a des nuits entières passées là-dessus. Je me jette sur ma machine. La Bible me tombe dessus ; je suis obligé de la ramasser en passant. Et puis, je vais craquer, n’est-ce pas, c’est à dire je ne pourrais pas tenir sans cet état extrêment rapide, parce que tout se précipite...

    DH : Lois et H...

    Ph S : H tout de suite après, oui. J’enchaîne sans transition. ça se passe entre 1971 et 1973. C’est pour moi un moment de très grande fébrilité, de très grande créativité. Je ne me préoccupe pas tellement de savoir si c’est réussi ou pas, s’il y a des déchets ou pas, si c’est plus ou moins de bon ou de mauvais goût. Enfin, je suis happé ; je suis obligé de suivre. Je ne choisis pas du tout. Je ne m’installe pas en me disant : "Tiens, je vais écrire d’une façon systématique, rigoureuse." Non, je suis entraîné. ça se passe comme une sorte de flux et, comme je te disais tout à l’heure, de catastrophe, d’état vraiment subi où j’essaye seulement d’être là en état de veille, de ne pas dormir pendant ce temps-là, disons. Et puis, un beau jour, ça va se dégager. Alors, là, je sais que je vais entrer dans un long, long travail. Et c’est Paradis qui s’annonce, que je commence finalement fin 1973...(...)" oct 1978

    in Vision à New York, p117/118, Grasset, 1981


  • A.G. | 7 novembre 2006 - 23:26 13

    Mais encore : Femmes (Cukor, De Kooning,... Chardonne !), La divine comédie (Dante), Illuminations (Rimbaud), Fleurs (Rimbaud), ...


  • viktor | 7 novembre 2006 - 16:58 14

    Sollers n’a pas hésité à reprendre, à la manière d’hommages actifs, des titres classiques : Lois (Platon), Nombres (Bible), H (Rimbaud), Paradis (Dante), Les Folies Françaises (Couperin), Portrait du joueur (Joyce, Dostoïevski)...

    Stéphane Zagdanski
    Fini de rire
    (Sollers en spirale)
    Pauvert, 2003, p. 154.


  • viktor | 6 novembre 2006 - 22:18 15

    "H" a été écrit juste après "Lois" éreinté par la critique. Publié en 1973, ce roman le sera aussi.

    Pacal Louvrier, dans "Philippe Sollers, mode d’emploi" nous aide à comprendre le contexte de la critique au moment de la parution de ces deux livres. Sollers peut déjà anticiper ce qui l’attend en publiant H. Il a déjà été balloté dans les "vagues sismiques" provoquées par Lois.

    [En 1980, nous dit Pascal Louvrier, Sollers reviendra sur cette période] :Après avoir précisé que ce livre fut son « insurrection personnelle » - une insurrection réussie, selon lui -, il avouera : «  C’est une déclaration de guerre à beaucoup de choses à la fois et notamment à l’esprit de sérieux, ce qui n’est pas rien. C’est-à-dire que c’est aussi un livre très gai, que j’ai écrit avec une sorte de rire permanent ( ... ). Le changement principal, c’est l’arrivée de cette tonalité de dérision, où le savoir et la philosophie sont tournés à la moulinette de la dérision. C’est une entreprise de destruction tout à fait ouverte. »

    Impossible comme ça de pouvoir récupérer le trublion Sollers. Ni la droite, ni la gauche, ni l’université. Personne.

    Un an après Lois, Sollers remet à nouveau en cause le mode de fonctionnement de la société en présentant H, roman ressemblant au tracé d’une longue et serpentante autoroute sans péage, c’est-à-dire texte allégé de toute ponctuation. Une fois encore, la critique, stupéfaite de cette innovation, se déchaîne contre son auteur qui jubile de constater que ses livres dérangent de plus en plus les gardiens de la pensée Kleenex. Avec H, il faut reconnaître que Sollers a poussé un peu loin la provocation. Il s’en est pris au très vieux tabou sur lequel repose l’histoire de l’humanité. Il a abordé le sujet de l’inceste en le renversant. Extrait : «  Je demande qui a pu peut pourra embrasser ainsi sa mère profonde à la bouche et sentir monter rayonnante la triple et une jouissance celle du point médian du milieu doré noces noces. »

    La story mythique de Jocaste et d’ ?dipe revue et corrigée. La mère ne se suicide plus, le fils ne se crève pas les yeux, la castration devient geste grotesque. L’inceste, ici, est vécu comme une réussite. Mieux même, comme acte libérateur du potentiel sexuel du fils. Remontée des ténèbres... Navigation joyeuse à l’envers sur le Styx... Claque au destin... Étéocle et Polynice enfin fiers de leur concepteur... Antigone bouleversée de désir dans l’attente de la visite du père, ce héros ...

    Bon. Là, je subodore subito l’émotion du lecteur.

    Envie de poser le livre, d’éteindre la lumière, de plonger l’esprit dans un doux sommeil, d’oublier toutes ces ignominies. Je pourrais tenter de vous faire revenir dans le récit, lecteur voyeur, en vous parlant par exemple de la mort du père de l’écrivain. Oui, je le pourrais, mais serait-ce raisonnable ? Vous me paraissez si fatigué.


    Pascal Louvrier
    Philippe Sollers, Mode d’emploi,
    Editions du Rocher, 1996, p. 88-89.