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Christophe Malavoy revisite le monde de Céline

Suivi de Céline par François Gibault & Céline par Sollers

D 9 novembre 2022     A par Viktor Kirtov - C 0 messages Version imprimable de cet article Version imprimable    ................... PARTAGER . facebook


PARTIE 1. Céline par Christophe Malavoy

L.F. Celine. Le Misanthrope de Meudon

Christophe Malavoy entretient une vieille passion pour l’écrivain Céline, qu’il raconte dans une biographe à la première personne. Le deuxième volume, les dernières années à Meudon, vient de sortir.
AFP

Essai Céline refait surface à travers la publication d’inédits, « Guerre » ou « Londres ». Mais depuis dix ans déjà, Christophe Malavoy proclamen : « Même pas mort ! » Le comédien avait déjà produit le scénario brillant de « La cavale du Dr Destouches » pour la BD des frères Brizzi aux éditions Futuropolis, le passionné prouve encore sa fidélité à l’oeuvre avec une saga biographique illustrée des encres sombres de José Corréa.

«  La cavale du Dr Destouches » donnait déjà une version de Céline en médecin fugitif de retour au pays. Christophe Malavoy reprend cette période dans un nouveau volume illustré par les aquarelles de José Corréa .

FUTUROPOLIS/DR

Après « Les années noires », l’écrivain maudit s’installe à Meudon en 1951, y meurt en 1961. Romans, lettres, etc. éclairent « le veilleur d’une nuit sans fin ». Éternel objet de controverses, l’auteur est visité par ses fidèles, Arletty ou Michel Simon. Comme tout écrivain, il se bagarre avec son éditeur, « Gallimard mon cul, ce pharaon des prix littéraires ».

À ces joutes épiques succèdent d’autres orages intimes. « J’aurais beau faire, j’aurais beau dire… je serai toujours l’affreux jojo, l’infréquentable, l’antisémite, le haineux… » Un texte magnifique.

Tribune de Genève Cécile Lecoultre
06.11.2022

« Le misanthrope de Meudon »
Malavoy-Corréa
Éd. de L’Observatoire, 224 p.
le livre sur amazon.fr

Résumé :

Après un long périple à travers l’Europe, laissant derrière eux les manuscrits de l’écrivain et toute une vie, Céline et son épouse Lucette parviennent à gagner Copenhague en 1945, après avoir traversé un IIIe Reich agonisant. Loin de la France qui réclame la tête du Dr Destouches, le couple pense avoir trouvé un havre de paix, et un peu de répit. Mais leur sursis ne sera que de courte durée... Rattrapé par le gouvernement français qui réclame son extradition et son jugement immédiat, Céline est incarcéré pendant plus d’un an à la prison de Vestre Faengsel, à Copenhague, avant d’être assigné à résidence à Korsor, sur les bords de la Baltique.
Désormais, c’est une véritable vie d’exilé qui commence pour l’écrivain apatride. Un exil de cinq longues années de labeur, dans le froid polaire danois, une épée de Damoclès au-dessus de sa tête, dans la joie parfois, dans la peur souvent.
Porté par les illustrations à l’aquarelle de José Corréa, Christophe Malavoy raconte ces années noires, trop souvent ignorées, au plus près de la psyché de l’auteur du Voyage au bout de la nuit, et parvient à transformer la grande Histoire en un roman d’aventure aussi fascinant que poétique.

A propos de Christophe Malavoy

PORTRAIT. Forcé d’arrêter son spectacle pour cause de Covid, le comédien écrit un livre sur l’écrivain.

Faisant contre mauvaise fortune bon cœur, cet amoureux des lettres profite de sa réclusion en province pour écrire un nouveau livre sur Céline, son auteur de prédilection :Le Misanthrope de Meudon, la « suite » de La Cavale du Dr.Destouches , un roman graphique qu’il a cosigné avec Paul et Gaëtan Brizzi (Éditions Futuropolis, 2015. « J’espère le finir avant le printemps , prévient-il, je reviens sur les dix années qu’il a passées à Meudon. Il souffre de stéréotypes, certains ne le liront jamais, pourtant il faut le lire. » Christophe Malavoy, lui, a tout lu, « le meilleur et le pire ». En mars2021, il publiera Céline, les années noires, un autre roman graphique avec le peintre José Correa (Éditions de l’Observatoire). « Une période méconnue, sa fuite de Paris et ses six années d’exil, son confinement, si je peux dire, au Danemark. »

L’acteur a redécouvert l’auteur du Voyage au bout de la nuit il y a quinze ans. Il a un temps songé à réaliser un film adapté de sa trilogie allemande - D’un château l’autre, Nord et Rigodon -, avec Fabrice Luchini et surtout Jacques Dutronc, mais les chaînes de télévision ont pris peur et il a abandonné son projet. En 2011, l’acteur, qui s’est souvent entretenu avec sa veuve Lucette Destouches avait déjà sorti un essai, Céline : même pas mort ! (Éditions Balland). « Je me suis rendu compte que les gens se hérissaient sur les plateaux de télévision », se souvient-il.

Une douzaine de livres
Se faisant l’avocat de l’écrivain « politiquement incorrect » : « Céline avait un côté misanthrope et doux aussi, il y avait beaucoup de tendresse et d’amour pour l’enfance et l’humanité chez lui. J’aime ses qualités de narration dans Mort à crédit ou Voyage au bout de la nuit, sa poésie », explique son admirateur qui reconnaît que l’intéressé a commis « l’irréparable » avec ses pamphlets antisémites. «  Mais il ne faut pas tout jeter à la poubelle. Il traversera toutes les époques parce qu’il parle de notre fin, de la mort, il nous a alertés sur notre propension au désastre, aux catastrophes, la pandémie en est une… ».

Fils d’un officier de l’armée française et petit-fils d’un soldat mort en Champagne en 1915, Christophe Malavoy a rendu hommage à son grand-père dans un long-métrage, Ceux qui aiment ne meurent jamais, en 2004, il espère un avenir meilleur pour les jeunes générations. Imaginant de nouveaux Victor Hugo ou Chateaubriand en guise de sauveurs. « Au fond de moi, je sais que les hommes sont incorrigibles, mais en tant que père -j’ai trois enfants-, j’essaie de donner l’exemple, sinon le monde va devenir âpre. On dit “Bonjour” sans contact, on se rencontre sans contact, on paie sans contact… On s’éloigne déjà de la nature. »

Je sens que j’ai quelque chose à faire dans l’écriture, elle est proche de la musique. Je veux que les lecteurs ressentent des choses, c’est comme au théâtre.
Christophe Malavoy

Christophe Malavoy a écrit une douzaine de livres, le premier, D’étoiles et d’exils, en 1992. « C’est à la fois une épreuve et libératoire, remarque-t-il. Il faut aussi que ce soit une nécessité, je sens que j’ai quelque chose à faire dans l’écriture, elle est proche de la musique. Je veux que les lecteurs ressentent des choses, c’est comme au théâtre. On sait tous ce que c’est que d’avoir aimé, avoir été aimé, trahi, d’éprouver une grande joie ou une déception, j’essaie de les traduire. »

Le désir de coucher ses sentiments sur le papier vient de sa mère. « J’ai entretenu une correspondance avec elle dès l’adolescence, pendant une quarantaine d’années, à raison d’une lettre par semaine. Elle écrivait très bien, j’envoie encore aujourd’hui des lettres à mes enfants. Celles de ma mère m’ont aidé à tenir dans des moments difficiles. »

Nathalie Simon

Le Figaro, 05/11/2020

L.F. Celine. Les années noires

En novembre 2021, Christophe Malavoy avait aussi publié « Les années noires » aux Editions de l’Observatoire


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Résumé

Après un long périple à travers l’Europe, laissant derrière eux les manuscrits de l’écrivain et toute une vie, Céline et son épouse Lucette parviennent à gagner Copenhague en 1945, après avoir traversé un IIIe Reich agonisant. Loin de la France qui réclame la tête du Dr Destouches, le couple pense avoir trouvé un havre de paix, et un peu de répit. Mais leur sursis ne sera que de courte durée... Rattrapé par le gouvernement français qui réclame son extradition et son jugement immédiat, Céline est incarcéré pendant plus d’un an à la prison de Vestre Faengsel, à Copenhague, avant d’être assigné à résidence à Korsor, sur les bords de la Baltique. Désormais, c’est une véritable vie d’exilé qui commence pour l’écrivain apatride. Un exil de cinq longues années de labeur, dans le froid polaire danois, une épée de Damoclès au-dessus de sa tête, dans la joie parfois, dans la peur souvent. Porté par les illustrations à l’aquarelle de José Corréa, Christophe Malavoy raconte ces années noires, trop souvent ignorées, au plus près de la psyché de l’auteur du Voyage au bout de la nuit, et parvient à transformer la grande Histoire en un roman d’aventure aussi fascinant que poétique.


Louis-Ferdinand Céline. © Dessin de José Corréa
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Lucette et le chat Bebert. © Dessin de José Corréa
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En 2015, Christophe Malavoy racontait déjà "La cavale du Dr Destouches"

La cavale du Dr Destouches
Futuropolis, 2015
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Scénario de Christophe Malavoy. Dessins de Gaëtan Brizzi, et Paul Brizzi

Le comédien Christophe Malavoy signe le scénario de "La cavale du Dr Destouches" (Futuropolis). Un album illustré par les frères Brizzi qui raconte la fuite de Louis-Ferdinand Céline après le débarquement allié en 1944.

Résumé

1944 : Louis-Ferdinand Céline, Lucette son épouse et le chat Bébert quittent Paris bombardé. Traversant l’Allemagne en ruines, ils rejoignent Sigmaringen où s’est réfugiée la communauté française collaborationniste, et où ils retrouvent le comédien Robert Le Vigan qui a quitté le tournage des Enfants du paradis. Cerné par des personnages piteux et minables, voire carnavalesques, le drame tourne à la fable burlesque. De cet épisode historique réel, Céline a écrit D’un château l’autre, Nord et Rigodon. Christophe Malavoy, comédien intuitif et liseur attentif de littérature, féru de l’écriture célinienne, a eu l’envie et l’audace d’adapter la trilogie allemande de l’auteur de Voyage au bout de la nuit avec la complicité des frères Brizzi, ténors du film d’animation français.

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La critique de François Lestave 24/10/2015

Le comédien s’est fait le scénariste de «  La cavale du Dr Destouches  », un album truculent inspiré de l’œuvre de l’auteur de "Voyage au bout de la Nuit", de Louis Ferdinand Céline.

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Christophe Malavoy Patrick Fouque

Vous aimez les Pieds nickelés ? Alors, vous serez ravis d’accompagner Céline, sa femme Lucette, le chat Bébert et l’acteur pétainiste Robert Le Vigan dans leur fuite rocambolesque au cœur de l’Allemagne nazie en 1944.

Une épopée dessinée qui restitue toute la fougue de l’écrivain aussi maudit qu’adulé. Christophe Malavoy, qui a redécouvert l’œuvre de l’auteur du « Voyage au bout de la nuit » il y a dix ans, s’est passionné pour l’impertinent Louis-Ferdinand, au point d’imaginer un film tiré de la trilogie allemande – « D’un château l’autre », « Nord » et « Rigodon » –, avec, pour incarner l’écrivain, pourquoi pas « un acteur comme Luchini ou Dutronc » ? Erreur. Condamné par contumace pour ses pamphlets antisémites, le docteur méduse les producteurs de cinéma comme les programmateurs de chaînes, trop frileux pour accorder du crédit à un auteur bien moins fréquentable que Molière, Camus ou Sartre. « Céline ne cherchait pas à plaire, remarque Christophe Malavoy. A la télé, il n’aurait pas été invité dans beaucoup d’émissions. On n’arrive plus aujourd’hui à mettre un nom sur les choses ; les gens ont peur, se censurent… »

Les frères Brizzi

Gaëtan Brizzi habite seul, dans le XVIIe arrondissement de Paris, mais il travaille en osmose avec son jumeau Paul, basé à Altadena, Los Angeles, avec femme, enfants et petits-enfants. « Nous élaborons ensemble l’adaptation, le scénario. Des dialogues seront ajoutés, une fois les protagonistes posés en situation, en fonction de leur personnalité. Nous nous partageons les séquences et enfin, au moment de l’exécution des dessins définitifs, Paul prend les personnages, je m’occupe des décors. » Ce savant « jeu de passe-passe » à travers les continents, vise « une homogénéité parfaite autant que faire se peut » et relève du secret de famille.

L’acteur, qui envisage alors un film d’animation, entre en contact avec deux spécialistes du genre, les frères Paul et Gaëtan Brizzi, de retour en France après avoir mis leurs crayons au service de Disney pendant quinze ans. Eux sont emballés par le projet, mais les financements tardent à venir. Pas grave ! Pendant deux ans, le trio va s’affairer à une BD, une approche pas si différente finalement d’un story-board. Le résultat est vivant, enlevé. « La difficulté était de ne pas noyer l’album avec un texte trop présent, explique Malavoy, car Céline est prolixe, envahissant. Mais on peut se permettre en BD plus de choses qu’au cinéma, il y a une plus grande liberté d’invention et d’audace. Je trouve que le dessin est un support idéal pour retranscrire son délire, sa folie. Céline, c’est très fellinien ; c’est la poésie, la démesure, la caricature… »

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Céline et son perroquet Toto. «  La cavale du Dr Destouches  » , de Christophe Malavoy, Paul et Ga ë tan Brizzi, éd. Futuropolis, 17 euros.© DR
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Lucette Destouches, 103ans, qui reçoit régulièrement Malavoy dans son pavillon de Meudon pour tailler le bout de gras, a, en tout cas, été enchantée par cet album fort en gueules (70personnages !) qui lui est « naturellement dédié ». Mieux qu’un adoubement, une consécration. « J’ai essayé, avec ce livre, d’aller contre les idées reçues. Céline, il faut le prendre pour le meilleur et pour le pire. » Là, c’est sûr, on tutoie le meilleur.

Commentaires de lecteurs

Ferdinand, en bande dessinée : du grand art !
En parcourant ce magnifique album, il est difficile de ne pas faire la comparaison, avec le fabuleux Tardi, illustrateur emblématique, d’un Voyage au bout de la nuit d’anthologie, il y a de cela une petite trentaine d’année. Les dessins réalisès par les frères Bizzi, stupéfiants de véracités, nous transportent dans cette aventure historique, que fut la cavale danoise du docteur Destouches et de Lucette. La noirceur du fusain, est très appropriée vu le contexte sombre de l’histoire. Une façon originale de faire connaissance avec l’incontournable Céline.
Bruno Vassia, le 3 décembre 2015

Dis moi, Céline.
Je ne connaissais pas les frêres Brizzi [….] Leur travail graphique dans cet album est tout bonnement fantastique et il y a longtemps que je ne m’étais pas autant régalé à la lecture d’une BD. Tous les personnages sont réussis (mention spéciale au coup de crayon pour l’acteur Robert Le Vigan, le méchant des Disparus de St-Agil, vraiment tordant).
[…] Malgré ses presque cent pages, j’ai lu cet album d’une traite, y aura-t-il une suite ?
Hervé J. 25 septembre 2015

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A propos de Christophe Malavoy, VOIR ICI


PARTIE 2. Céline par François Gibault

La biographie de Céline par François Gibault

Signalons aussi la biographie de Céline par François Gibault dont une édition révisée a été publiée en octobre dans la collection [Bouquins. 928 pages et considérée comme la biographie de référence de l’écrivain.

Proche de Lucette Destouches dont il fut le conseil de 1967 à la mort de celle-ci en 2019, François Gibault est l’exécuteur testamentaire de Céline. Il a édité une partie de sa Correspondance et a signé l’Avant-propos du volume inédit Guerre, paru cette année après la rocambolesque histoire des manuscrits retrouvés.

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« Dubuffet et Céline ont refait mon éducation. Pour moi, ces deux génies français du XXe siècle sont inséparables. »

François Gibault


https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2022/11/05/les-diners-tres-selects-de-francois-gibault-le-biographe-de-celine_6148599_4500055.html

Les dîners très sélects de François Gibault

Par Elise Karlin

Le Monde, le 05 novembre 2022

Rencontre L’avocat et écrivain de 90ans a fait de l’art de recevoir une véritable science. Nombreux sont les jeunes loups des médias, de l’édition, du barreau et même du spectacle qui doivent aux agapes de ce pygmalion leur introduction dans le Paris qui compte.


François Gibault, le 10 octobre 2022, dans son hôtel particulier du 7e arrondissement de Paris. Sur la console à côté de lui, un bronze de la main de Françoise Sagan et un autre de la main allongée de Céline. En dessous, sur le parquet, le masque mortuaire de l’écrivain. TIMOTHEE CHAMBOVET POUR M LE MAGAZINE DU MONDE
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Ce soir-là, avant le dîner, François Gibault a proposé à ses hôtes un drôle d’apéritif. En guise d’amuse-gueule, sur la table d’une salle à manger encombrée de livres et de tableaux, le maître de maison a déposé un trésor de papier : les manuscrits inédits de Louis-Ferdinand Céline, dont il est l’exécuteur testamentaire, soit des milliers de feuillets disparus en1944 et réapparus dans des conditions rocambolesques en2020.

« Je vous propose de les consulter pendant deux heures, puis à 19heures nous passerons à table », a lancé l’avocat à ses convives. C’est ainsi qu’avant le champagne et les blinis au tarama, en août2021, le journaliste Jérôme Dupuis, qui venait de publier dans Le Monde une longue enquête sur la restitution des documents, et Emile Brami, romancier, spécialiste de Céline, ont pu feuilleter Casse-Pipe, Guerre (publié chez Gallimard en mai), ou encore Londres (publié en octobre) –, des pages et des pages calligraphiées de la main du sulfureux écrivain…

Une main dont François Gibault, 90ans, conserve un bronze, placé sur une petite console de son bureau. A même le parquet, il a aussi posé le masque mortuaire de l’auteur qui est toujours considéré comme l’un des géants littéraires du XXe siècle malgré la virulence antisémite de ses pamphlets. Gibault lui a consacré une biographie en trois tomes aux éditions Mercure de France – l’une des plus exhaustives, selon les exégètes –, que la collection Bouquin réédite cet automne en un seul volume.

Entre les « céliniens » et l’avocat écrivain, les dîners ont commencé au siècle dernier. Ayant droit de Lucette Destouches, la veuve de Louis-Ferdinand Destouches dit Céline, François Gibault était aussi l’un de ses amis les plus fidèles. Il l’a rencontrée en1962, un an après la mort de son mari. Pour l’entourer, il se met à organiser avec régularité des soirées dans la maison de Meudon que Lucette n’a jamais quittée jusqu’à sa mort, en2019, à l’âge de 107ans.

A la fin des années 1990, après quelques longueurs à la piscine de l’Aquaboulevard à Paris, Gibault a gardé l’habitude de passer chez le traiteur acheter une quiche, des tranches de saumon et du tarama avant de rejoindre la route des Gardes. La plupart du temps, il vient accompagné : jeunes avocats, écrivains connus ou pas, journalistes, chanteurs, tous ceux qu’il a choisi d’intégrer dans ses cercles d’agapes et à qui il annonce, un soir : « Viens, je vais te présenter quelqu’un. »

La veuve de Louis-Ferdinand Destouches reçoit des visiteurs hallucinés sur son canapé, au milieu des peluches et des coussins, dans un salon qui sent l’encens et le poulet rôti. Toto, le perroquet, jacasse par-dessus son épaule

La très vieille dame reçoit des visiteurs hallucinés sur son canapé, au milieu des peluches et des coussins, dans un salon qui sent l’encens et le poulet rôti. Toto, le perroquet, jacasse par-dessus son épaule. On se bouscule dans la cuisine, qui fut autrefois la chambre où « Louis » passa de vie à trépas. On grappille des instants d’histoire en écoutant sa veuve se souvenir de Sigmaringen, la petite ville allemande qui abrita les restes du gouvernement de Vichy à la fin de la guerre.

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DECOUVRIR LA SUITE des Riches Heures de François Gibault dans ses dîners très sélects, chez lui rue Monsieur, dans ses appartements hors du temps où il habite toujours, aux diners du Voltaire, et Chez Lipp,
sur lemonde.fr, (section abonnés).

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« L’avocat a longtemps donné de somptueuses réceptions. Il mélange les jeunes et les vieux, les différents milieux, les célèbres et les inconnus, les habitués et les inattendus. »
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« François a toujours été très silencieux. Il aime que la compagnie soit agréable, que le vin soit fin et que les gens soient heureux de se retrouver. »
Jérôme Béglé, directeur général de la rédaction du JDD

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« C’est une sorte de parrain, une figure paternelle sans ambiguïté, attentionné et attentif. François est aussi l’un des hommes les plus fidèles que je connaisse. »
Nicolas d’Estienne d’Orves, écrivain et journaliste

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Absence de femmes autour des tablées. Gibault ne s’en cache pas, sa curiosité d’esprit le pousse plutôt vers les jeunes hommes. Dans l’ensemble, la gent féminine actuelle l’intéresse peu : « J’ai connu Sagan, la mannequin Bettina, les actrices Arletty et Marie Bell, des héroïnes qui sortaient de l’ordinaire. Aujourd’hui, je n’en vois plus. »

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L’avocat dans ses appartements remplis d’œuvres d’art, à Paris, le 10 octobre 2022.TIMOTHÉE CHAMBOVET POUR M LE MAGAZINE DU MONDE
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L’avocat n’a qu’un regret

« L’avocat n’a qu’un regret, qu’il exprime parfois lors des repas : avoir échoué deux fois à être élu à l’Académie française, en2003 et en2007. Et ce n’est pas faute d’avoir lésiné sur les dîners qu’il a offerts aux Immortels en habits verts. »


Céline par Sollers

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« Je me rappelle très bien le choc que fut la découverte de D’un château l’autre ou de Nord, en 1957 et 1960. Dès la publication d’extraits dans la NRF, j’ai senti qu’il se passait quelque chose d’essentiel. Depuis, ma fréquentation de l’oeuvre de Céline n’a pas cessé. Malgré sa réputation d’infréquentable, alors que son biologisme - ainsi qu’il faudrait définir son racisme - me paraissait en total désaccord avec son génie d’écrivain, j’ai persisté à l’admirer avec constance.
Je sais que cela prendra encore un siècle ou deux, mais il faut débarrasser Céline de ses oripeaux de fou vociférant et, cela va de soi, de son antisémitisme. L’image qui prédominera alors sera celle d’un Céline enfantin. Car c’est sans doute ainsi qu’il faut le voir : un enfant innocent perdu dans un monde coupable. »

Ph. S.

PLUS ICI

MONDE HORS SERIE. Une vie/une oeuvre n°53 : Louis Ferdinand Céline

Hors série de Juin 2022


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Peut-on aimer Céline malgré lui ? Sa responsabilité historique à avoir été le porte-voix des idées les plus nauséabondes du XXe siècle oblitère-t-elle définitivement son indéniable puissance littéraire, qui s’affirma par un chef-d’oeuvre, « Voyage au bout de la nuit », et se poursuivit par un voyage au bout de la haine ? Au moment où la découverte de milliers de pages inédites offre un nouvel éclairage sur son oeuvre, Le Monde dresse le portrait de celui qui se décrivait comme un « infâme et répugnant saligaud ».

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