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PP ou Parler Parlire

Philippe Sollers, Centre dans Lacan Quotidien

D 16 mars 2018     A par Albert Gauvin - C 0 messages Version imprimable de cet article Version imprimable    ................... PARTAGER . facebook


Centre, p. 52, « Raptus » :

« Malgré tous ses dévoiements et ses atermoiements, la psychanalyse reste un scandale possible dans un monde où plus rien ne peut faire scandale. Vous me direz que ça ne risque pas d’arriver : l’analyse est dépas­sée, décriée, exténuée, débordée par le spectacle mon­dial et les neurosciences, elle ne peut plus intéresser que de vieux croûtons viennois qui rêvent de leur belle époque. Je connais pas mal de psys français ou fran­çaises, je lis leurs brochures, notamment le Lacan quotidien qui se traîne toujours. Je constate que ces braves gens vont beaucoup au cinéma, au théâtre, qu’ils font même parfois de la critique littéraire fade et précieuse (toujours des livres étrangers), bref que l’horreur de la tragédie humaine leur échappe dans un confort de défense professionnelle. Lacan appelait ça "les petites pointures". Allons plus loin : ce sont, désormais, les chaussons pour bébés. »

C’est évidemment une réplique aux interpellations répétées dont Sollers fut l’objet de la part de Lacan Quotidien pendant la dernière campagne présidentielle (cf. Voici Sollers !). Sollers poursuit :

« Prenez le cas de Pierre Joly, meurtrier de ses trois enfants pour se venger de sa femme. Il ne veut d’abord qu’un enfant, elle en fait trois : Laetitia, Yannick et Samantha. Des enfants gais, ravissants, envers lesquels ce père forcé se montre épatant, affectueux, protecteur, "papa poule". Mais voilà : il a une maîtresse, et sa femme, Myriam Joly, veut divorcer en ayant la garde exclusive des petites merveilles, qu’il ne pourra visiter qu’en terrain neutre. Là, le père prend feu. Il commence par Laetitia, avec une mauvaise carabine. Elle dort dans son lit, il ne réussit qu’à la blesser à la tête. Epouvantée, elle va s’enfermer aux toilettes. Joly lui parle à travers la porte, la cajole, la supplie d’ouvrir pour qu’il la soigne. Elle ouvre, il la lave, lui masse le dos, et finit par la noyer dans la baignoire. Même noyade avec Yannick et Samantha. Après quoi, il détruit l’appartement, et s’enfuit chez sa maîtresse, à laquelle il ne dit rien.
Il est vite arrêté, avoue sans difficultés, affirme à son procès qu’il ne se souvient de rien, est classé comme victime d’un "raptus mélancolique" par les psychiatres. Il écope de 30 ans de prison, dont 20 de sécurité incompressible, change son nom et son prénom, et purge sa peine. Myriam, elle, se sent détruite (c’était le mobile de son mari). Un psychiatre raconte ce détail stupéfiant : elle s’est fait tatouer sur le pubis, "sur les ovaires", dit-elle, les premières lettres des prénoms de ses enfants. Laetitia, Yannick , Samantha, ça donne LYS. L’Annonce faite à Myriam-Marie a sa fleur de lys, mais Pierre Joly était loin d’être un archange. Appelez-le maintenant Pierre Jolys, mari de Myriam Jolys, et regardez bien ce Y masculin (Yannick) coincé, sur les ovaires, entre deux filles. Est-ce que tout ça n’aurait pas ravi Sherlock Lacan ? »

La réponse, dans le Lacan Quotidien du 15 mars, viendrait cette fois d’Italie. Elle est signée, non pas Sherlock Lacan, mais Laetitia Pianore. Ô joie ! Qui pourrait être plus avisé qu’une nouvelle « Laetitia » pour répondre au « raptus mélancolique » (ici un détour par « Latin », Centre, p. 104, est nécessaire et, s’il ne suffit pas, il faut ouvrir le dictionnaire Gaffiot) ? S’agit-il du Pseudonyme d’une Psy ? Une pépée ?

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PP ou Parler Parlire
Philippe Sollers, Centre

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par Lætitia Pianore
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Pépé ? Papy ? Ding dang dong : perdu.

PP, c’est Psychanalyse Pseudonyme.

Elle fut nommée ainsi il y a deux ou trois lustres à Paris – était-ce au CNAM ou déjà à Dejazet, il faudra vérifier. La voici en tout cas, citation implicite campée en quadragénaire dotée de tous les talents et charmes afférents, incognita de surcroît – telle la lettre qu’elle porte cachetée sous son manteau de chimney-speaking. Réfractaire au programme de sa résorption dans la Kultur à défaut de psychologie générale concocté de longue main par ses fossoyeurs, elle s’aventure du côté de chez PhS, qui la prend dans ses bras – le reste est silence – pour en faire un roman.

« Lacan s’ennuyait de plus en plus […]. Freud était un juif stoïque, Lacan un catholique furibard. » (p. 96). PhS a décidé quant à lui de (s’-a)muser et de persévérer dans son âme, ce vide intérieur où il accumule les variations sur le thème de son autoportrait en Chinois.

Centre fait vibrer l’absence : l’aficionado du Séminaire parisien que PhS fut et demeure endosse cette mission secrète. Il explore, de ce centre, la topologie complexe, d’exclusion interne en enveloppements paradoxaux et débusque sur les bords qu’il tire mine de rien, une version pluralisée de PP. Par ordre d’entrée en scène, voici les « petites pointures » (p. 52), puis les « postures postiches » (p. 98), attrapées au vol après une implosante diatribe sur le bel aujourd’hui où tout est post, en passant par les papas poules, qui ne sont pas ceux que vous croyez. Autant de stations discrètes pour qui douterait de l’état de la sociomanie ambiante.

N’était la poésie, orpheline, et la promesse de son initiale (Première Parole).

PhS y croit. ID qui lui écrit de Montevideo a son oreille.
Ô les beaux jours que le comte de L* a devant lui, et nous et nous et nous avec lui, si le cœur nous en dit – reste à bien, ce cœur, l’accrocher.

S’il a laissé filer quelques flèches du Parthe – fichées sur le seuil du paradis des amours enfantines « où Baudelaire de dieu, il s’en passe de vertes » (p. 45) – PhS, « le moins nobélisable des écrivains » et non moins pseudonyme, détecte à tire-larigot, fictionne urbi et orbi et rémunère à foison le lent gage, avec de frais plagiats truffés de prestes fulgurances.

Ô surprise, ça s’lit !

Et si ça s’lit si bien… n’est-ce pas qu’il s’y démontre à l’envi que cet aparté nous parle, du fond de notre joie la plus digne ?

Traduit de l’italien par NGL (prononcez angel)

Centre
Philippe Sollers
Gallimard, Paris, 2018 (112 p., 12,50 €).

LACAN QUOTIDIEN 769 pdf

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